Lors de l’examen le 19 novembre de la proposition de modification du règlement de l’Assemblée nationale, le président de la commission des lois, Jean-Jacques Urvoas, a fait adopter deux amendements créant un statut de collaborateur parlementaire et leur consacrant un contrat de travail spécifique de droit privé. Une initiative saluée par les deux organisations syndicales de collaborateurs parlementaires.
[caption id="attachment_42535" align="alignleft" width="278"] Aux collaborateurs des grands hommes, la patrie reconnaissante ?[/caption]
Les quelque 2 090 collaborateurs parlementaires qui assistent les 577 députés devraient bientôt bénéficier d’un statut, négocié entre leurs organisations professionnelles et les députés. C’est du moins le sens de deux amendements adoptées en commission des lois lors de l’examen de la proposition de modification du règlement de l’Assemblée nationale portée par son président, Claude Bartolone.
Signés du président de la commission des lois, Jean-Jacques Urvoas, ces textes prévoient :
- d’une part, de consacrer dans le règlement « la possibilité pour les députés de recruter des collaborateurs parlementaires, au moyen d’un contrat de travail de droit privé, ainsi que l’existence du crédit collaborateur permettant de les rémunérer » ;
- et, d’autre part, que ces collaborateurs bénéficient d’un statut à même « de mettre en place des contrats adaptés à la réalité du métier de collaborateur » et ainsi « de clarifier les zones de flou juridique et de réduire ainsi les contentieux entre salariés et employeurs », justifie le député du Finistère.
Licenciements « d’une légalité douteuse »
Car « les collaborateurs sont liés par un contrat de droit privé à leur député-employeur, ce qui les assimile à des salariés de très petites entreprises ne bénéficiant ni d’une convention collective ni d’aucun statut défini. Cette situation constitue une exception sur le marché du travail », note, dans le texte de son amendement, Jean-Jacques Urvoas, lui-même ancien assistant parlementaire.
« De plus, n’étant pas rattachés à une branche, les collaborateurs ne peuvent pas non plus bénéficier d’accords collectifs. Cela en fait des salariés particulièrement vulnérables », déplore-t-il. Une situation qu’avait récemment dénoncée, pour l’ensemble des collaborateurs de cabinet, le président de l’Association représentative des collaborateurs d’élus (Arcole), Olivier Berlioux, à l’occasion de l’enquête du Courrier des maires auprès de ces derniers .
Et le député de développer : « A titre d’exemple, dès la 36e heure de travail non déclarée comme heure supplémentaire, les députés employeurs devraient se trouver dans l’illégalité, dans la mesure où il est strictement impossible de déroger à la règle des 35 heures de travail hebdomadaire en l’absence d’accord collectif […]. De même, sont extrêmement fragiles juridiquement les ruptures de contrat de travail en fin de législature, qui prennent la forme d’un licenciement pour motif personnel, avec une préconstitution contractuelle du motif de licenciement, d’une légalité douteuse », analyse-t-il.
« Nécessité d’un accord collectif »
Si ces amendements étaient adoptés en séance publique – examen le 26 novembre –, les questeurs du Palais Bourbon seraient alors chargés de « déterminer et mettre en œuvre les conditions du dialogue social et de la négociation d'un statut entre les députés et leurs collaborateurs employés sous contrat de droit privé », via une négociation « avec les organisations de collaborateurs ».
Quant aux 577 députés, ils seraient désormais officiellement autorisés à « employer sous contrat de droit privé des collaborateurs parlementaires, qui les assistent dans l’exercice de leurs fonctions et dont ils sont les seuls employeurs ». Et bénéficieraient à ce titre « d’un crédit affecté à la rémunération de leurs collaborateurs. »
"Dissiper le flou"
Très rapidement, les deux organisations représentatives des collaborateurs parlementaires se sont félicitées de cette initiative. « Les débats en commission ont montré la nécessité d’une élection professionnelle et d’un accord collectif tant la confusion règne encore sur des points essentiels comme la représentation syndicale, le contrat de travail, les clauses de licenciement ou encore la rémunération », a réagi le Syndicat national des collaborateurs parlementaires (SNCP-FO).
« Si toutefois elles étaient confirmées en séance publique, ces dispositions contribueraient à dissiper le flou qui entoure la fonction de collaborateur parlementaire et ouvriraient ainsi la voie à une véritable reconnaissance de ces professionnels, salariés de droit privé, qui assistent les députés dans l’exercice de leur mandat », a pour sa part appuyé l’Association française des collaborateurs parlementaires (AFCP).