Vanik Berberian (Maires ruraux) : « Sans les conseils généraux, nous sommes morts »

Martine Kis
Vanik Berberian (Maires ruraux) : « Sans les conseils généraux, nous sommes morts »

Vanik Berberian, président de l’AMRF : « Les maires ruraux ne baissent pas les bras ! »

© L. Habib

Vanik Berberian, président de l'Association des maires ruraux de France (AMRF), apprécie que la ruralité ait désormais sa ministre. Si la fin de la disparition des départements ne l'étonne pas, il verrait bien une réduction encore plus importante du nombre des régions. Il déplore la mise en cause par le Premier ministre du niveau d'investissement des collectivités locales et un nouvel appel à la mutualisation qui fait fi de la réalité.

Courrierdesmaires.fr. Sylvia Pinel, ministre du Logement et de l’Egalité des territoires, s’est vu attribuer la ruralité. En êtes-vous satisfait ?

Vanik Berberian. Naturellement. Lors d’une rencontre avec le Premier ministre, Manuel Valls, je lui ai exprimé mon sentiment que, depuis un bon moment, les territoires ruraux sont négligés. Le problème du vote Front national dans le monde rural, le résultat des élections européennes en sont le résultat. Manuel Valls a reconnu cet oubli.

Comment voyez-vous l’avenir des départements ?

V. B. Peu après l’annonce de la nouvelle carte régionale, j’ai dit à Manuel Valls combien l’échelon du conseil général est une nécessité pour les territoires ruraux. Si nous n’avons pas d’échelon de proximité et que notre interlocuteur est seulement la région, nous sommes morts.

Les régions sont dans une dynamique de concurrence entre elles, elles mènent une politique de forte attractivité de la capitale régionale. Nous sommes loin de cela.

Attendez-vous quelque chose des Assises de la ruralité qui sont annoncées pour le mois de septembre ?

V. B. Avant d’avoir des Assises, il faut des annonces concrètes. C’est ce que j’ai dit à Sylvia Pinel lorsque je l’ai rencontrée.

Les élus ont le souvenir des assises de la démocratie territoriale qui ont débouché sur des décisions contraires à ce qui y a été dit”

Les élus sont échaudés. Ils ont le souvenir des assises de la démocratie territoriale qui ont débouché sur des décisions contraires à ce qui y a été dit. Si le Premier ministre veut que les élus ruraux jouent le jeu, il faut des annonces fortes.

L’annonce du maintien des départements en milieu rural n’en est-elle pas une ?

V. B. Si. Bien que je n’ai jamais cru possible de les supprimer. Cela poserait trop de problèmes insurmontables.

Que pensez-vous de la réduction du nombre de régions ?

V. B. On pourrait n’en imaginer que 6 ou 7. Voyez la carte des grands opérateurs nationaux. Ils sont sur des périmètres plus grands que les futures régions. Et voyez la carte des élections européennes. Les Français sont attachés aux régions pour leur dimension symbolique, historique, culturelle, culinaire. Ils ne sont pas attachés aux conseils régionaux.

L’un des sujets est identitaire, l’autre technique. Il ne faut pas les confondre. On pourrait avoir des régions appelées Grand Ouest, Sud Ouest, pour éviter la confusion. Bien sûr, le véritable sujet est celui des compétences.

Ces régions devraient avoir quelques compétences structurantes, d’aménagement du territoire, correspondant à des investissements lourds, si elles en ont les moyens, tels le haut débit, la mobilité, la recherche, la transition énergétique. Et il faudrait laisser les autres aux conseils généraux. Ce sont eux qui ont la réactivité, par exemple pour s’occuper des lycées et des collèges.

Etes-vous confiants dans l’avancée des réformes ?

V. B. Je m’interroge. Comment mener des réformes si importantes avec un président de la République qui recueille un tel taux de mécontentement, avec 80% de perte de confiance des Français vis-à-vis des partis politiques ?

Les entreprises sont soumises à des tâches administratives absurdes et coûteuses. Il y a un gros toilettage de simplification à faire.”

Le monde politique est totalement décrédibilisé. Il faudrait changer tout le personnel politique. Les 150 premiers caciques des partis devraient dégager pour faire remonter les suivants. En espérant qu’ils soient meilleurs…

Comment voyez-vous l’inflexion de la politique en faveur des entreprises ?

V. B. Entreprises, collectivités, nos destins sont liés, nous sommes dans le même contexte. Je verrai bien le soutien aller plus loin en faveur des PME qui irriguent les territoires ruraux.

Elles ont beaucoup de difficultés, sont soumises à des tâches administratives absurdes et coûteuses. Il y a un gros toilettage de simplification à faire. C’est plus important que de s’intéresser à l’architecture territoriale.

Le Premier ministre, dans son discours devant les élus de la FNESR, le 28 août, a critiqué l’augmentation des dépenses de fonctionnement, de 3%, des collectivités et les a poussées à la mutualisation des services.

V. B. C’est du baratin de technocrate ! Ce genre de phrase sort de think tanks, on l’agite dans tous les sens et on finit par croire que c’est vrai.

Nous n’avons pas attendu Manuel Valls pour faire de la mutualisation. Mais il est faux de croire que la fusion des communes permettrait des économies. On économiserait le chauffage et l’électricité d’une mairie, un peu de secrétariat, les 580 euros d’indemnité d’un maire. Mais tout le reste du boulot reste à faire ! Déplacer les activités ne fait pas faire d’économies ! Ce genre d’arguments ne fait qu’alimenter les propos anti-fonctionnaires et anti-collectivités locales.

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