Commission
Le maire peut-il décider de remplacer un membre de la commission des finances par un autre sur seule délibération du conseil municipal ? Des règles s’y opposent, ne serait-ce que celle qui régit la participation de l’opposition aux commissions municipales. Sans compter les dispositions qui protègent le statut d’élu.
Les faits
Au lendemain des élections municipales qui ont eu lieu en mars 2014, Alain Marchand intègre la commission des finances au conseil municipal de Beaumont-du-Gâtinais (1 164 hab., Seine-et-Marne) en tant qu’élu d’opposition. Mais peu de temps après sa participation à la première réunion de la commission, en novembre, le maire, Hugues Moncel, décide d’octroyer ce même siège à un autre élu, en tête de la liste minoritaire à l’issue du scrutin mais qui avait, depuis, rejoint la majorité. Contestant son exclusion pour des motifs fallacieux, Alain Marchand a fini par obtenir gain de cause, plus d’un an après les faits, devant le tribunal administratif de Melun pour « éviction abusive ». Il a fait valoir les droits de l’opposition à participer à différentes commissions dans les communes de plus de 1 000 habitants, inscrits dans le Code général des collectivités territoriales (CGCT).
La réaction de l’opposition
[caption id="attachment_68357" align="alignleft" width="279"] Alain Marchand, élu d'opposition à Beaumont-du-Gâtinais[/caption]
« L’obligation d’un siège pour l’opposition n’est qu’un minimum. Il n’est pas interdit au maire, avec l’accord du conseil municipal, d’en accorder un deuxième. »
Quand on évoque son exclusion de la commission des finances, qu’il a depuis réintégrée, Alain Marchand pointe du doigt « un caprice » et « beaucoup de désinvolture » de la part du maire qui voulait le remplacer en cours de mandat par un autre élu de l’opposition, celui-ci ayant entre-temps rejoint la majorité. D’abord parce que la participation de l’opposition à ce type de commission est clairement régie par le CGCT dans son article L.2121-22 : « Dans les communes de plus de 1 000 habitants, la composition des différentes commissions, y compris celles d’appel d’offres et les bureaux d’adjudications, doit respecter le principe de la représentation proportionnelle pour permettre l’expression pluraliste des élus au sein de l’assemblée communale », est-il écrit. « Et encore, l’obligation d’un siège pour l’opposition n’est qu’un minimum. Il n’est pas interdit au maire, avec l’accord du conseil municipal, d’accorder un deuxième siège aux élus minoritaires. Surtout que la commission n’est que consultative… », explique Alain Marchand.
Beau joueur. Mais ce sont surtout les conditions de son éviction qui auraient dû faire réfléchir le maire à deux fois. Car un conseiller ne peut être exclu que s’il est à l’origine de troubles ou de dissensions, issues par exemple d’injures publiques, ou s’il est… décédé. Ce qui n’était manifestement pas le cas de l’élu. Le tribunal administratif a donc indiqué que le motif de son remplacement « était étranger à la bonne administration des affaires de la commune », d’autant plus que la qualification de l’élu pour siéger dans cette commission n’était pas en cause. En conséquence, Alain Marchand a réintégré la commission des finances par une nouvelle délibération du conseil municipal du 31 mars 2016.
De cet épisode, l’élu d’opposition, se montrant beau joueur, n’en conclut pas pour autant qu’il faille amender la loi, « la réglementation étant assez précise et jamais contestée. Certains disent qu’il faut renforcer la place de l’opposition ; je ne partage pas ce point de vue, qui est celui des perdants. Disposer d’une majorité large et stable pour le gagnant est logique ». Ce qu’il demande, c’est tout simplement l’application stricte du droit… et des réunions de commission un peu plus régulières et consistantes.