La réponse de Nadia Ben Ayed, avocate à la cour, cabinet Seban et associés.
La chambre criminelle de la Cour de cassation a considéré que le maire qui prive de parole un conseiller municipal, au motif qu’il porte un signe religieux, se rend coupable de discrimination dès lors qu’il n’est pas établi que le seul port d’un signe d’appartenance religieuse soit constitutif de troubles à l’ordre public et qu’aucune disposition législative ne permet au maire dans le cadre des séances du conseil municipal d’interdire aux élus de manifester publiquement leur appartenance religieuse((Cass. crim. 1er sept. 2010, n° 10-80.584.)).
Le maire ne saurait donc a fortiori interdire la présence d’un élu aux séances du conseil municipal au seul motif qu’il porterait un signe d’appartenance religieuse.
Neutralité de l’agent public
En effet, si le principe de neutralité du service public fait obstacle à ce que les agents disposent dans le cadre du service public du droit de manifester leurs croyances religieuses, aucun texte, ni aucune jurisprudence n’étend ce principe aux élus.
En l’occurrence, le Conseil d’Etat considère qu’un agent ne peut sans méconnaître ses obligations, manifester dans l’exercice de ses fonctions ses croyances religieuses, notamment en portant un signe destiné à marquer son appartenance à une religion((CE, avis, 3 mai 2000, n° 217017.)).
Or ce raisonnement ne saurait être transposable aux élus, notamment aux conseillers municipaux qui ne sont pas des agents publics. En revanche, le principe de neutralité devrait s’appliquer au maire et à des adjoints en leur qualité d’officiers de police judiciaire((Article L.2122-31 du CGCT.)) et officier d’état civil.
Liberté du candidat
Plus largement, cette question rejoint celle de la possibilité pour un candidat de porter un signe distinctif religieux. Elle s’était posée pour une candidate aux élections cantonales qui portait un voile islamique ainsi qu’une candidate aux élections municipales qui portait une croix de façon très distincte.
Le Conseil d’Etat a apporté une réponse très claire en affirmant que « la circonstance qu’un candidat à une élection affiche son appartenance à une religion est sans incidence sur la liberté de choix des électeurs ; qu’aucune norme constitutionnelle, et notamment pas le principe de laïcité, n’impose que soit exclues du droit de se porter candidates à des élections des personnes qui entendraient, à l’occasion de cette candidature, faire état de leurs convictions religieuses »((CE, 23 déc. 2010, n° 337899.)).
Manola - 17/02/2015 22h:11
OK pour la candidate puis la conseillère municipale lors des séances du Conseil municipal. Mais que se passe-t-il si elle célèbre des mariages ? (ce qui est parfaitement possible pour une conseillère ayant délégation) Que se passe-t-il lorsqu’elle représente la municipalité dans un Conseil d’école ou dans une instance officielle ? Que se passe-t-il si elle obtient une délégation et non pas un poste de maire-adjoint ? A quel moment est-elle Mme X et à quel moment est-elle une élue dans l’exercice de ses fonctions ?
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