Transparence de la vie publique : les principales mesures en lecture définitive à l’Assemblée nationale

Xavier Brivet

Les députés examineront, le 11 septembre, en lecture définitive, les projets de loi relatifs à la transparence de la vie publique. Après l’échec de la commission mixte paritaire, le 17 juillet, ces textes ont été adoptés en nouvelle lecture le 23 juillet par l’Assemblée nationale et le 25 juillet par le Sénat.

A l’issue de leur adoption par la Haute assemblée, fin juillet, voici les principales mesures du projet de loi organique et du projet de loi ordinaire.

1. Les élus locaux concernés par les déclarations de patrimoine et d’intérêt

Les élus concernés
A l’instar des ministres et des parlementaires (y compris au Parlement européen), plusieurs milliers d’élus locaux devront adresser, en début et en fin de mandat, au président de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique, une déclaration de situation patrimoniale et une déclaration d’intérêt.

Le projet de loi ordinaire fixe la liste des élus locaux concernés et leurs obligations dans les deux mois qui suivent leur entrée en fonction.

  • Les présidents des conseils généraux et régionaux, les maires des communes de plus de 20 habitants, les présidents des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre dont la population excède 20 000 habitants ou dont le montant des « recettes de fonctionnement » est supérieur à 5 millions d’euros.
  •  Les conseillers généraux et régionaux, ainsi que les adjoints aux maires des communes de plus de 100 000 habitants et les vice-présidents des EPCI à fiscalité propre de plus de 100 000 habitants et du conseil de la métropole de Lyon seront également concernés, lorsqu’ils sont titulaires d’une délégation de signature du président ou du maire.
  • Les présidents des syndicats intercommunaux seront également visés par ces obligations, dès lors que leurs structures ont des recettes de fonctionnement dont le montant dépasse 5 millions d’euros.
  • Les présidents et directeurs généraux des offices publics de l’habitat mentionnés à l’article L.421-1 du Code de la construction et de l’habitation gérant un parc comprenant plus de 2 000 logements au 31 décembre de l’année précédant celle de la nomination des intéressés.
  • Les présidents et directeurs généraux des sociétés et autres personnes morales, quel que soit leur statut juridique, autres que celles mentionnées aux 1° et 3° du présent II, dont le chiffre d’affaires annuel, au titre du dernier exercice clos avant la date de nomination des intéressés, dépasse 750 000 €, dans lesquelles les collectivités régies par les titres XII et XIII de la Constitution, leurs groupements ou toute autre personne mentionnée aux 1° à 4° du présent II détiennent, directement ou indirectement, plus de la moitié du capital social ou qui sont mentionnées au 1° de l’article L.1525-1 du Code général des collectivités territoriales.

A noter. Les directeurs et chefs de cabinet des élus locaux ne sont pas visés par le texte. « Cette catégorie générale a vocation à être traitée dans le cadre du prochain projet de loi relatif à la fonction publique, qui revalorisera le rôle de la commission de déontologie de la fonction publique », a précisé le ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement, Alain Vidalies.

La déclaration : procédure et sanction

  • Toute modification substantielle de la situation patrimoniale ou des intérêts détenus donne lieu, dans un délai de deux mois, à une déclaration.
  • L’ensemble des élus concernés devront adresser au président de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique une nouvelle déclaration de situation patrimoniale, deux mois au plus tôt et un mois au plus tard avant l'expiration de leur mandat ou de leurs fonctions ou, en cas de dissolution de l'assemblée concernée ou de cessation du mandat ou des fonctions pour une cause autre que le décès, dans les deux mois qui suivent la fin du mandat ou des fonctions.
  • Le fait, pour une personne concernée de ne pas déposer l’une des déclarations prévues, d’omettre de déclarer une partie substantielle de son patrimoine ou de ses intérêts ou de fournir une évaluation mensongère de son patrimoine est puni d’une peine de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende. Peuvent être prononcées, à titre complémentaire, l’interdiction d’éligibilité, ainsi que l’interdiction d’exercer une fonction publique selon les modalités prévues à l’article 131-27 du Code pénal.

2. Publication de la déclaration de patrimoine

C’est le principal désaccord entre l’Assemblée nationale et le Sénat.

En première lecture (25 juin), les députés ont amendé le projet gouvernemental en votant une disposition prévoyant que pour les parlementaires et principaux responsables exécutifs locaux, les déclarations de patrimoine seront consultables dans les préfectures de département par tout électeur du département, à condition de ne pas les divulguer, sous peine de lourdes sanctions. Les personnes qui viendront consulter en préfecture seront inscrites sur un registre. Chaque citoyen pourra saisir la future Haute autorité chargée de contrôler ces déclarations s’il soupçonne que l’une d’entre elles est mensongère ou inexacte. Ces « lanceurs d’alerte » bénéficieront d’une protection.

Les sénateurs ont supprimé ce dispositif (15 juillet) et sont revenus à la version originale du projet gouvernemental en votant, le 25 juillet, en nouvelle lecture, un article prévoyant que les déclarations de situation patrimoniale, assorties des éventuelles observations de la personne concernée, « sont rendues publiques par la Haute autorité pour la transparence de la vie publique et publiées au Journal officiel ».

3. Déclaration d’intérêt

Les ministres, parlementaires, principaux responsables d’exécutifs locaux notamment devront aussi remplir des déclarations d’activités et d’intérêts (dont les activités professionnelles rémunérées, activités de consultant, activités des conjoints, parents et enfants, etc.) remontant jusqu’à cinq ans avant leur prise de fonctions, publiées sur le site de la Haute autorité.

Les déclarations d’intérêts seront rendues publiques par la Haute autorité de la transparence de la vie publique, selon des modalités déterminées par décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés.

Les électeurs pourront adresser à la Haute autorité toute observation écrite relative à ces déclarations d’intérêts.

4. Conflit d’intérêt

L’article 2 du projet de loi ordinaire prévoit qu’« au sens de la présente loi, constitue un conflit d’intérêts toute situation d’interférence entre un intérêt public et un intérêt privé pouvant indûment influer sur la façon dont les personnes (…) s’acquittent des missions liées à leur mandat ou fonction, pouvant les conduire ainsi à privilégier leur intérêt particulier face à l’intérêt général et compromettre l’exercice de leurs fonctions ».

Lorsqu’ils estiment se trouver dans une telle situation, « sous réserve des exceptions prévues au deuxième alinéa de l’article 432-12 du Code pénal, les personnes titulaires de fonctions exécutives locales sont suppléées par leur délégataire, auquel elles s’abstiennent d’adresser des instructions ; les personnes chargées d’une mission de service public qui ont reçu délégation de signature s’abstiennent d’en user ; les personnes chargées d’une mission de service public placées sous l’autorité d’un supérieur hiérarchique le saisissent ; ce dernier, à la suite de la saisine ou de sa propre initiative, confie, le cas échéant, la préparation ou l’élaboration de la décision à une autre personne placée sous son autorité hiérarchique ».

Un décret en Conseil d’Etat fixera les modalités d’application de ces dispositions.

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