« Territoires zéro chômeur longue durée » à quelques mois de l'expérimentation

Denis Solignac

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« Territoires zéro chômeur longue durée » à quelques mois de l'expérimentation

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Ayant bénéficié d'une procédure accélérée, la proposition de loi d'expérimentation portée par ATD-Quart Monde a été adoptée en seconde lecture le 10 février à l'Assemblée nationale, après un examen en commission paritaire le 2 février. Le texte doit encore passer devant le Sénat le 18 février, mais la cause semble acquise. Seule interrogation : bénéficiera-t-il des moyens nécessaires ?

Le projet d'expérimentation élaboré depuis plusieurs années par ATD-Quart Monde((Le projet d’ATD-Quart Monde.)), rejoint progressivement par Emmaüs puis le Secours catholique et épaulé par Le Pacte civique((Le collectif d’associations Le Pacte civique.)), porte une ambition : lutter contre le chômage de longue durée.

Sa mise en œuvre s'inscrit dans des territoires bien définis – communes ou groupement de communes – ne dépassant pas 40 000 habitants. Pour commencer, dix territoires seront sélectionnés où, si le projet suit son cours, des « entreprises à but d'emploi » seront créées d'ici le mois de juillet (date d'entrée en vigueur de l'expérimentation).

Elles auront vocation à salarier des personnes, aujourd'hui au chômage de longue durée, qui occuperont des emplois nouveaux. « Nouveaux » au sens où les activités en question n'existent pas actuellement dans ces territoires.

Créations nettes d'emploi

Pour autant, les besoins auxquels elles répondront sont déjà bien réels. Toute la difficulté réside dans le respect de cette frontière, les emplois créés dans le cadre de l'expérimentation devront répondre à un besoin local sans pour autant faire concurrence à des activités marchandes existantes. En d'autres termes, il ne s'agit pas de créer des emplois pour en tuer ailleurs.

Pour contrôler que la démarche respecte bien ce critère et que les emplois créés seront de qualité (stables et dans des conditions de travail raisonnables et respectueuses du Code du travail), des comités locaux d'expérimentation seront installés dans les territoires pionniers. Ce sont eux qui passeront convention avec les futures « entreprises à but d'emploi ».

Gouvernance locale

S'ils devraient être présidés par le maire ou le président de l'intercommunalité, le texte de loi ne précise pas la composition de ces instances.

« Tous ceux qui ont un mot à dire pour contrôler le respect de ces critères seront invités à y participer, insiste Patrick Valentin, porteur du projet pour ATD-Quart monde. La composition sera volontairement expérimentale. » Les décrets d'application ne devraient donc pas entrer dans les détails de composition.

A l'échelle nationale, un comité d'expérimentation sera aussi mis en place. « Tout le monde voulait entrer au conseil d'administration de ce comité. Heureusement, une députée de droite a tranché le sujet en proposant que le fait de siéger au CA ne soit pas indemnisé. Cela devrait limiter le nombre de candidatures », espère Patrick Valentin.

Un texte très travaillé

Les amendements à la proposition de loi que défendait le député (PS) Laurent Grandguillaume, ont été très nombreux mais sans grandes conséquences sur le volet opérationnel de l'expérimentation.

Par exemple, le titre de la proposition de loi a été modifié. Les parlementaires ont troqué proposition de loi d'expérimentation « Territoires zéro chômeur de longue durée » pour proposition de loi « d'expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée », un intitulé plus « tiède » qui engage moins le législateur à un résultat radical mais qui ne changera rien au fond du projet.

Les cordons de la bourse

Les tenants du projet sont confiants et assez satisfaits de la tournure que prend celui-ci. « Nous avons passé toutes les étapes de cette première phase d'élaboration, disons théorique, sans trop de problèmes », reconnaît Patrick Valentin.

« Territoire zéro chômeur de longue durée » a beaucoup fait parler de lui dans les médias de sorte que de nombreuses collectivités locales, intéressées, contactent depuis plusieurs semaines ATD-Quart Monde.

A cet effet, une journée d'étude sera organisée le 9 mars à l'Assemblée nationale. Il s'agira de présenter le projet : les territoires déjà mobilisés et qui ont toutes les chances de ce fait de faire partie des 10 premiers territoires à entrer en expérimentation, exposeront les démarches qu'ils ont initiées depuis un ou deux ans.

L'après-midi sera politiquement plus stratégique. « Nous voulons élargir le mouvement de soutien au projet et créer un comité de vigilance national qui, si nécessaire, en cas de blocages, de décisions qui n'iraient pas dans le sens du projet initial, sera à même de réaffirmer notre volonté collective ».

Cet « amical rapport de force soucieux du bien commun », comme le décrit Patrick Valentin, anticipe la sortie des décrets d'application.

Besoin de 17 500 euros par salarié

ATD-Quart monde planche actuellement sur des propositions de textes de décret, sans trop s'inquiéter sur le fait qu'ils seront pris en compte. Toutefois, ce qui n'est pas acquis, c'est le montant qui sera attribué au fonds national d'expérimentation, sans lequel les entreprises à but d'emploi seront dépourvues des moyens de recruter.

« Nous avons besoin d'au moins 17 500 euros par futurs salariés, soit au moins 35 millions d'euros », précise Patrick Valentin.

Le gouvernement soutient l'expérimentation qui, par ailleurs, a reçu le label « La France s'engage »((Le label La France s'engage.)) en décembre dernier. Mais les défenseurs du projet préfèrent ne pas crier victoire.

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