Christophe Bouillon, député PS de Seine-Maritime, nouveau président de l'APVF
L’avant-projet de loi « Proximité et Engagement », dont l’exposé des motifs reprend certains éléments de langage utilisés par les maires des petites villes, n’est pas passé inaperçu au sein des associations d'élus. L’APVF en prend bonne note, mais souhaite encore aller plus loin notamment sur le volet des indemnités des maires des communes de 3500 à 20 000 habitants.
Un apriori positif sur la forme, mais une copie insuffisante sur le fond. Satisfaits de retrouver plusieurs formulations et quelques-unes de leurs propositions dans l’avant-projet de loi « Proximité et Engagement » esquissé vendredi dernier par Edouard Philippe devant une autre association d'élus, les élus de la gourmande Association des petites villes de France en réclament encore davantage. Partisans d’une ligne constructive vis-à-vis du gouvernement – comprendre : à la différence des opposants à Emmanuel Macron rassemblées dans « Territoires unis » (AMF, ADF, Régions de France) –, ils comptent bien obtenir gain de cause sur un certain nombre de sujets faisant actuellement débat. Et sont prêts, pour cela, à faire le forcing dans les jours et semaines à venir.
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Leurs revendications vont de l’obtention d’un renforcement du statut de l’élu à la revalorisation des indemnités des maires de l’ensemble des petites villes jusqu’à 20 000 habitants, en passant par la réforme de la fiscalité locale ou l’amélioration de la gouvernance dans les intercommunalités. Des revendications plus ou moins polémiques. La crise des gilets jaunes, symptôme des problèmes de pouvoir d’achat de nombreux Français ainsi que de l’ampleur du niveau de défiance vis-à-vis des élites politiques, ne semble effectivement pas avoir eu raison des velléités de l’APVF concernant l’édification d’un statut de l’élu « digne de ce nom. »
L’association milite depuis plusieurs années pour l’amélioration des conditions d’exercice des mandats locaux, terme repris à son compte par le gouvernement dans l'exposé des motifs. Son président Christophe Bouillon, qui se saisit malicieusement de la perche tendue par Emmanuel Macron, estime que cette évolution passerait tantôt par le développement de la formation des élus, la hausse des indemnités des maires de leur strate démographique, tantôt par une plus grande protection vis-à-vis des risques pénaux, ou le renforcement de l’allocation de fin de mandats.
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Attirer des jeunes actifs du secteur privé
« Le gouvernement doit adresser un signal aux futurs aspirants élus. Entre la mairie et les commissions thématiques de l’intercommunalité, les conflits d’agenda ne sont pas rares pour ceux qui ont conservé leurs activités professionnelles. Un conseiller départemental siégeant dans les rangs de l’opposition touche peu ou prou les mêmes indemnités que moi, pour une charge de travail bien moindre. Il appartient au gouvernement de tout faire pour lever les freins susceptibles de bloquer les jeunes actifs qui souhaiteraient s’engager politiquement sans que leurs vies familiales et professionnelles s’en trouvent trop lourdement lésées » résume Igor Semo, maire (LR) de Saint-Maurice, vice-président de Paris-Est Marne & Bois et, accessoirement, directeur des relations institutionnelles de Suez Environnement.
Christophe Bouillon – lui-même fonctionnaire de catégorie A de métier – et les maires des petites villes devront tout de même s’employer pour que, dans le contexte actuel, leurs revendications ne soient pas caricaturées comme la simple défense corporatiste d’intérêts catégoriels. « Face à un élu-bashing quasi-permanent, la question des indemnités risque d’être la seule qui soit retenue et débattue. Nous n’allons pas réclamer une hausse de 50% des indemnités des maires de communes de 3500 à 19 999 habitants : ce ne serait pas entendable. Ça nous semble plus compréhensible de demander de calquer l’indemnité des maires sur le salaire de leurs Directeur général des services (DGS).
Et le député de Seine-Maritime de poursuivre: « La question qui est posée, derrière toutes ces propositions, c’est l’attractivité de la fonction d’élu. Voulez-vous que les retraités seulement se présentent, ou aussi des actifs de 30 ou 40 ans ? Nous souhaitons ré-oxygéner la démocratie locale » tente Christophe Bouillon. Questionné par des journalistes, l’APVF n’exclue pas toutefois de contrebalancer l’augmentation des indemnités de maires avec une révision à la baisse du plafond de cumul d’indemnités entre maires et membres d’un exécutif intercommunal.
Réformer la fiscalité locale avant les municipales 2020
Autre sujet, moins brûlant celui-ci : l’APVF demandera également au gouvernement de revoir son calendrier concernant la réforme de la fiscalité locale maintes fois annoncée. « Nous ne remettons pas en cause l’idée consistant à diminuer les impôts des ménages. Mais supprimer la taxe d’habitation pour l’ensemble des Français, y compris des 20% des Français les plus riches, implique de compenser 8 milliards d’euros supplémentaires aux collectivités. Comprenez que c’est difficile de se lancer dans l’élaboration d’un projet municipal, de promettre de nouveaux investissements et équipements à construire sur la prochaine mandature sans visibilité financière » confie Christophe Bouillon.
Un propos qui se conjugue au pluriel et concerne également les partenaires financiers des petites villes que sont les conseils départementaux. « Attention à ne pas fragiliser davantage les ressources départementales. Si la part départementale de la Taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) était transférée aux communes à l’avenir, l’APVF militerait pour que les départements bénéficient de recettes dynamiques. Nous ne jouerons pas les élus d’une strate contre les autres » prévient le député (PS) de Seine-Maritime.
Lobbying en faveur d'une généralisation des Conférence des maires
L’APVF ne compte pas jouer non plus la carte des « petits maires » abandonnés par les technocrates de l’EPCI. Toujours favorable à l'intercommunalité mais critique de celles qui fonctionnent en supra-communalité, Christophe Bouillon se dit ouvert à toutes les mesures permettant de renouer des liens de confiance entre les élus municipaux et leurs groupements. La garantie du maintien de la désignation des conseillers communautaires à partir des listes municipales en 2020 en fait assurément partie, mais l'APVF voit déjà plus loin. « Nous proposons de systématiser les Conférences des maires, qui officierait à la manière d'assemblée représentative à côté du conseil communautaire détenant le pouvoir législatif. Sans aller jusqu'à leur donner un droit de veto, ces instances pourraient être dotées d'un droit de suspension temporaire permettant de dégager des consensus autour d'une décision faisant débat. Les élus municipaux n'étant pas membres du conseil communautaire devraient aussi pouvoir participer aux commissions préparatoires et aux réunions techniques » préconise Christophe Bouillon.
Ce sont autant de messages que l’APVF tentera de faire passer au gouvernement en attendant l’examen du projet de loi "Proximité et engagement." Du 18 au 20 juin, le premier ministre Edouard Philippe a dépêché un pool – Jacqueline Gourault, Sébastien Lecornu, Gérald Darmanin et Olivier Dussopt, lui-même ex-président de l’APVF – à la rencontre des associations d’élus : AMRF, APVF, Villes de France, AMF, AdCF, France Urbaine, ADF, Régions de France. « Nous espérons récolter les fruits de cette collaboration, dans la mesure où nous sommes proposants. Si nous ne retrouvons pas dans le texte qui sera présenté à l’Assemblée nationale puis au Sénat, nos parlementaires pousseront nos propositions. » Le gouvernement est prévenu.
pov citoyen - 19/06/2019 19h:08
Si cela ne se cumule pas avec leurs autres revenus divers, pas de problème...
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