Pour acquérir une culture du risque, les étapes de la gestion de crise sont formalisées, et les équipements et acteurs identifiés. Le plan communal ou intercommunal de sauvegarde testé et mis à jour est une bonne base. Acquérir des outils spécifiques de prévision et d’alerte, un atout non négligeable. Enfin, la sensibilisation et d’éducation de la population sur les conduites à tenir en cas d’alerte est indispensable.
Bienvenue à Mardyck, dans le nord : 372 habitants, 3 sites Seveso. Dans la petite salle de réunion de la mairie, deux grandes cartes épinglées au mur. La première matérialise les risques qui encerclent le village via la base de données risque majeur. La deuxième localise toutes les habitations des personnes «fragiles» avec l'ensemble des numéros à composer en cas d'accident. Entre la raffinerie, l'usine chimique, le plus gros stockage de GPL d'Europe et un gazoduc à 110 bars arrivant de Norvège, Mardyck est sur le qui-vive. «Je mène très souvent des réunions, les habitants sont informés régulièrement, le village a déjà été évacué entièrement lors d'un exercice», énumère le maire, Gérard Blanchard, qui connaît sur le bout des doigts les rouages des procédures d'alerte, d'évacuation ou de confinement et qui a mis en place un système d'appel automatique de la population.
Nantes : un seul numéro
A Nantes (44), si le risque est plus faible, la culture n'en est pas moins forte.
«La question existentielle du risque, c'est l'enchevêtrement des compétences. L'agglomération a pris cette compétence et a créé des groupes de travail avec les maires. En 2007, nous avons décidé de créer un numéro d'appel unique dédié aux institutionnels et accessible 24 h/24 h», explique Ronan Dantec, vice-président de Nantes métropole en charge du développement durable.
Depuis, le centre reçoit des dizaines d'appels par nuit : flaque d'huile sur la voirie, éclairage public ou canalisation défectueuse.
«Dix personnes y travaillent à temps plein. Ce dispositif a montré toute son efficacité lors de tempêtes», souligne Ronan Dantec.
De plus, Nantes métropole aide ses 24 communes à prendre leurs responsabilités. Ainsi, toutes ont pu éditer leur document d'information communal sur les risques majeurs (Dicrim) et quinze ont déjà réalisé leur plan communal de sauvegarde (PCS) avec pour objectif qu'ils soient tous réalisés et testés prochainement.
Cependant, ce type de démarche reste l'exception. «Xynthia et les inondations du Var ont montré l'impréparation des collectivités dans les situations de crise : retard dans l'anticipation des menaces, difficultés d'appréciation de l'ampleur des vulnérabilités, compréhension incomplète de l'organisation des secours et de leur responsabilité, en particulier concernant les dispositifs d'alerte et d'information des populations», regrette François Giannoccaro directeur de l'institut des risques majeurs (IRMA).
La réalisation d'un PCS (obligatoire pour les communes soumises à un PPR) peut être un bon moyen d'anticiper. Cependant, sur les quelque 12.000 communes contraintes, seules 20% en sont dotées. «Souvent les maires ne prennent conscience du danger qu'une fois la catastrophe survenue», regrette Christophe Carol, chef du bureau de l'alerte à la Direction de la défense et de la sécurité civile (DDSC).
Attention aux "coquilles vides" ?
De plus, les PCS ne représentent parfois qu'une «coquille vide».
«Si les communes font appel à un cabinet privé pour leur livrer le PCS clefs en main, il est probable qu'il a été oublié dans un coin. Quand la crise arrive, il est trop tard pour le lire», déplore Christophe Carol.
A Saint-Gervais-les-Bains, c'est «sous pression» que le maire a dû mettre en place un PCS contre le glacier qui menaçait d'«exploser» à tout moment. La mise en place des procédures a été douloureuse, mais désormais le village est prêt à affronter n'importe quelle crise.
Enfin, pour réagir au mieux, il faut prévoir et donc, comme à Noirmoutier, coupler modélisation et surveillance des phénomènes avec alerte et gestion de crise.
Un article d'Emmanuelle Lesquel, publié dans "le Courrier des maires et des élus locaux", décembre 2010