Centre-ville, commerces, Le Puy-en-Velay
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Depuis plus d'une trentaine d'années, l'usage généralisé de la voiture et l'étalement urbain qui en résulte, cumulés aux effets décuplés de la crise économique dans certaines régions industrielles, participent à dissoudre de nombreux centres-bourgs, petites et moyennes villes. Mais de plus en plus de maires de villes-centres commencent à penser l’ensemble des politiques de revitalisation comme un tout à l’échelle du bassin de vie : commerces, habitat, circulation. Reste à convaincre les élus de leurs périphéries et leur faire partager leur agenda.
Mettre en place une nouvelle politique publique demande du temps. Toujours. Important enjeu de société, la redynamisation des centres-villes n’y échappe pas. A défaut d’un « plan Marshall » qui aurait permis de mettre l’ensemble des pouvoirs publics en ordre de bataille, le mal est désormais correctement identifié.
Fini la gestion de crise, place à la prospective et au cousu-main
Des outils parcellaires comme le programme national de requalification des quartiers anciens dégradés (PNRQAD) ou le programme national pour la rénovation urbaine (PNRU) ont été « détournés » pour le traiter. Le contrat de revitalisation artisanal et commercial (Crac) ou le dispositif « Centres-bourgs » ont émergé. Et, à chaque nouveau rapport ou colloque sur le sujet, un même message : « Arrêtons de penser le centre-ville du futur de façon cloisonnée, en silos. Elus municipaux, intercommunaux et responsables des différentes politiques publiques doivent se coordonner pour prendre en compte les usages et besoins des citoyens », tonnait encore François Foussier, adjoint au commerce d’Orléans, en juin dernier lors des 12e Assises des centres-villes.
Sous l’impulsion du ministère de l’Environnement et de quelques services de Bercy, l’Etat a fait du chemin. Plusieurs villages, petites et moyennes villes concernés - parmi lesquels Avignon, Joigny, Béziers, Guingamp ou encore Pont-Audemer - se sont positionnés dans son sillage. Engagée depuis un an et demi auprès de plus de 80 territoires à travers son programme « Centres-villes de demain », la Caisse des dépôts aide aussi les collectivités à bâtir des projets urbains globaux. « Là où les élus ont dépassé les postures purement défensives relevant de la simple gestion de crise, et ont entamé ensemble une réflexion sur l’avenir de leur cœur d’agglomération, des premiers résultats sont visibles », souligne l’opérateur.
Refaire des centres-villes des lieux de flânerie
Si elles diffèrent en fonction du contexte et des sensibilités politiques de chacun, toutes ces stratégies locales ambitionnent de dépasser la stricte fonction utilitaire des centres-villes pour en faire à nouveau des lieux de destination, de flânerie. L’un des principaux leviers consiste à récupérer la maîtrise du foncier commercial, en préemptant avec une société d’économie mixte (SEM) ou une société publique locale (SPL) des pas-de-porte. Cela permet d’intervenir plus librement sur le marché et de diversifier les activités présentes au-delà des habituelles banques, agences immobilières ou opticiens franchisés. A Sceaux et Montrouge, les mairies ont fusionné des cellules pour répondre aux exigences d’enseignes nationales démarchées au préalable. Elles ont ensuite proposé des loyers abordables à des artisans indépendants ou des commerces culturels ne pouvant assumer les loyers élevés des artères commerciales les plus passantes.
Corollaire de ce réinvestissement, beaucoup de villes-centres entérinent la fin du laisser-aller qui a conduit au développement anarchique de leur première, voire seconde couronne. Objectif ? Se préserver de la concurrence de ces « centralités périphériques ».
Après avoir fortement investi dans la réhabilitation de son patrimoine ancien, le maire (PS) de Thouars, Patrice Pineau, a converti les élus de son intercommunalité sur le sujet. « Considérant que les flux de salariés comme d’usagers participent à la vie de la cité, nous nous battons pour maintenir les services publics, les institutions et les équipements centraux en centre-ville », détaille-t-il. Tandis que Saillans et Moulins ont installé une maison de santé flambant neuve et leur campus universitaire en plein centre, d’autres élus comme le maire de Marennes utilisent toutes les potentialités du droit de l’urbanisme - refus de permis de construire ou préemption de locaux - pour empêcher les professions libérales, restaurateurs et cinémas de déménager en périphérie.
Politiques globales de long-terme et montée en gamme du centre-ville
« Le maire qui ne souhaite pas que son centre ressemble à un mouroir après 19 heures doit avoir une vision globale », insiste Bernard Reynès, vice-président de l’association Centres-villes en mouvement. « Il importe de croiser l’accompagnement des commerçants avec une régulation plus poussée de la grande distribution, mais aussi de travailler main dans la main avec les bailleurs sociaux pour lutter contre l’emprise des marchands de sommeil. Le stationnement, les mobilités douces, la sécurité, la propreté ou la culture sont aussi des incontournables », assure l’ex-maire de Châteaurenard.
Cette doctrine d’équilibre du territoire peut nourrir de larges ambitions, si elle s’opère dans le cadre de politiques de long terme traitant de front, à l’échelle du bassin de vie, les questions de diversification commerciale, d’amélioration de l’habitat et de transports. Le programme « Mulhouse grand centre » vise ainsi officiellement à enrayer la paupérisation locale, à travers - notamment - la montée en gamme des commerces du centre-ville.
« Rares sont les villes qui sont déjà parvenues à inverser la tendance »
Pascal Madry, directeur général de l'Institut pour la ville et le commerce
« Il est encore trop tôt pour évaluer ces politiques locales de régénération des centres-villes, la plupart ayant été mises en œuvre récemment. Certains élus ont réussi à juguler le phénomène, mais rares sont ceux qui sont parvenus à inverser la tendance. Comparé aux réglementations néerlandaises ou anglaises, le droit français de l’urbanisme offre assez peu de latitude pour réguler le développement périphérique, c’est-à-dire la grande distribution et les parcs d’activité commerciale (« retails parks ») mais aussi la périurbanisation. L’Etat considère toujours que la question du commerce relève de la loi du marché plus que de l’aménagement du territoire. Les collectivités, particulièrement les intercommunalités, ne sont pas exemptes de reproches non plus. Si l’approche globale a tant de mal à s’imposer aujourd’hui, c’est parce qu’au-delà des sensibilités politiques, les élus de la ville-centre ne partagent bien souvent pas les mêmes intérêts que ceux de la première couronne ou des territoires périurbains et ruraux. »
Guille - 22/11/2017 12h:53
Notre sénateur Rémi Pointereau est en charge du dossier de redynamisation des centre-ville, il est où était président du collectif pour le TGV POCl (paris orleans bourges Clermont-Ferrand Lyon) dont l'issue est plus qu'incertaine,quid de son action pour limiter les commerces périphériques et la destruction des petits commerces de centres villes ???
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