Dotations en baisse
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Le groupe de travail parlementaire sur la réforme de la dotation globale de fonctionnement préconise, avant une réforme de plus grande ampleur pour 2018, de résoudre dès la loi de finances pour 2017 quatre défis : les DGF négatives, le financement de la péréquation, les effets de seuil de la dotation urbaine et les soubresauts des enveloppes par catégories d’intercommunalités. Mais sans apporter de réponse à ce dernier problème touchant les communautés d’agglomération…
Ils étaient quatre parlementaires, Charles Guené (LR, Haute-Marne) et Claude Raynal (PS, Haute-Garonne), rapporteurs spéciaux pour le Sénat, et Christine Pires Beaune (PS, Puy-de-Dôme) et Véronique Louwagie (LR, Orne), députées, à présenter le 29 juin les pistes de leur rapport d’étape pour réformer la DGF du bloc communal.
Avant d’aborder les principes d’une future réforme d’ampleur (sur laquelle Le Courrier des maires reviendra), le groupe parlementaire s’est livré à une radiographie des quatre problèmes devant être résolus dès le projet de loi de finances 2017.
En finir avec les DGF négatives
En 2015, 85 communes ont dû faire face à une DGF négative, elles sont 168 communes en 2016. Comment en est-on arrivé là ?
En effet, « la contribution au redressement des finances publiques (CRFP) appliquée n’est pas un prélèvement sur la DGF mais sur les recettes réelles de fonctionnement », décrypte la députée Véronique Louwagie (LR). Pour y remédier, « nous avons choisi d’établir le support sur un socle beaucoup plus large », poursuit-elle.
Concrètement, au lieu d’être assise sur la seule DGF, le calcul de la CRFP prendrait en compte la compensation part salaires (CPS) et la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP) des intercommunalités.
« Cela règle les problèmes de DGF négative et donne une lisibilité beaucoup plus importante », plaide la députée. Ce « rebasage » permettrait de conserver un montant de DGF « constant dans le temps, la CRFP s’imputant avant le calcul de la dotation de référence », et faciliterait donc « les comparaisons dans le temps », assure le groupe de travail.
Financer de manière pérenne la péréquation verticale
A ce jour, pour financer la péréquation verticale mais également les enveloppes liées à la croissance démographique, s’applique un prélèvement sur la dotation forfaitaire. Mais celui-ci est soumis à un écrêtement de 3% pour les communes.
Pensé pour limiter la participation des communes les plus aisées à la péréquation, ce système a, depuis 2015 surtout, fait étalage de ses dysfonctionnements : les communes écrêtées contribuent moins à la péréquation que ce qu’avait prévu le législateur ; plus une commune a de recettes réelles de fonctionnement, plus son prélèvement diminue et les 168 communes qui n’ont plus de dotation forfaitaire ne contribuent plus du tout au financement de la hausse de la péréquation.
« Le prélèvement péréqué ne fonctionne plus bien en raison de cet écrêtement à 3% », ne peut que constater Véronique Louwagie, chiffres à l’appui. Ainsi, 6 000 communes étaient plafonnées en 2015 et plus de 10 000 l’année suivante alors que 17 000 communes étaient prélevées. Une des conséquences indirectes étant un report de la charge de la péréquation sur d’autres, moins aisées, à hauteur de 51 millions en 2016.
Pour résumer, « les communes riches ne financent plus la progression de la péréquation verticale », déplore l’élue de l’Orne. Et le groupe de travail de suggérer pour y remédier de faire évoluer le plafonnement, soit en le supprimant soir en l’augmentant progressivement.
Corriger les effets de seuils de la dotation de solidarité urbaine
« Eviter le saupoudrage et les effets de seuil trop brutaux » : voilà ce qui amène le quatuor parlementaire à « recentrer la dotation de solidarité urbaine en la réformant dès 2017 », selon Claude Raynal (PS).
Mais pourquoi une telle urgence à réformer cette dotation-là (1,91 milliard d’euros en 2016), et pas dans le même temps la dotation de solidarité rurale (1,24 milliard) ? Car la DSR est bien trop liée à l’architecture globale des autres dotations (elle concerne jusqu’à 33 850 communes) pour pouvoir être révisée seule, « indépendamment d’une réforme plus globale des autres dotations », justifient les quatre parlementaires.
Idem pour la dotation nationale de péréquation (DNP) dont la suppression rendrait « difficile » toute création nouvelle « d’une dotation générale de péréquation ».
C’est donc pour corriger les importants effets de seuil de la DSU, réservée à bien moins de communes, que les parlementaires préconisent de répartir l’augmentation annuelle de la DSU sur les 667 communes éligibles et non pas seulement sur les 250 premières.
« Cette répartition pourra être affectée d’un coefficient multiplicateur pour tenir compte des écarts de ressources et de charges », ajoutent-ils. Et l’éligibilité à la DSU serait resserrée, sur les communes de plus de 10 000 habitants, des trois premiers quarts aux deux premiers tiers (soit de 751 à 667 communes) comme le prévoit l’article 150 de la loi de finances pour 2016.
Stabiliser les dotations aux différentes catégories d’intercos
En 2016, 28 communautés d’agglomération sont devenues communautés urbaines ou métropoles. Le sens de l’histoire, ou du moins celui de des lois Mapam et Notre, encourage en effet le passage des EPCI au statut supérieur.
Mais ce mouvement n’est pas sans produire « des impacts considérables », selon Claude Raynal sur celles restées « simples » communautés d’agglomération, d’autant plus dans une enveloppe de dotations à la baisse depuis 2014.
Car l’enveloppe dédiée aux CU et métropoles perçoit 60 euros par habitant contre 45,40 pour les CA. Mécaniquement, l’enveloppe des CA a donc fortement diminué, de plus de 15% en 2016. Toutes choses égales par ailleurs, le manque à gagner s’élève à 52 millions d’euros. Et ce sans compter des écarts patents : « De 9 euros par habitant à 128 euros selon les habitants ! », s’inquiète le sénateur.
Comment répondre à ces iniquités ? « Le sujet reste entier… admet Claude Raynal. A moins que l’Etat rajoute [la somme manquante] à l’enveloppe, mais ce n’est pas dans l’air du temps… »
Ce qui est certain, « c’est que la règle de base qui dit qu’on ne touche pas aux enveloppes par niveau de communauté ne tient pas ». Une mécanique déficiente qui va d’ailleurs au-delà des seuls enjeux financiers, en pleine réforme de la carte intercommunale. Et Christine Pires-Beaune d’évoquer « ce système différenciant les statuts d’intercommunalité entre eux qui ne se justifie plus complètement ». A suivre donc.