A l'automne 2011, après avoir consulté tout au long de l'été les communes et EPCI, les commissions départementales de coopération intercommunale (CDCI) débattent en leur sein des projets de schémas intercommunaux présentés par les préfets. Seul un amendement voté à la majorité des deux tiers pouvait être adopté jusqu'à la fin décembre 2011.
Les discussions sont diverses d'un département à l'autre, tant les approches des préfets ont varié: on n'a pas vu le "gigantisme" tant craint par les élus. Mais on a entendu certains regretter des choix trop "prudents" : plusieurs schémas proposés se contentent d'intégrer les communes isolées et d'agréger pour respecter le seuil de 5.000 habitants, sans réelle réflexion sur les projets intercommunaux.
- 35% la diminution du nombre d'EPCI selon les projets des SCDI, avec plus de 300 projets de fusion selon l'AdCF.
- 1.266 EPCI à fiscalité propre pourraient subsister selon les projets actuels de SDCI, contre 1.969 aujourd'hui d'après l'Association des maires de FranceF.
Schéma conçu en deux temps
A l'Assemblée des communautés de France (AdCF), on se félicite du nombre limité de cas de "démembrements" de communautés, comme du peu de propositions de constituer de très grands EPCI difficilement "gouvernables". Et on compte sur la deuxième phase de discussions qui s'ouvre, au sein de la CDCI, pour améliorer la situation, là notamment où les périmètres recouvrent insuffisamment les bassins de vie.
"Le fait d'avoir publié un premier schéma a créé un électrochoc qui nous fait entrer de plain-pied dans la deuxième phase", témoigne le sénateur des Yvelines et secrétaire national de l'AdCF, Dominique Braye.
Autre satisfecit de l'association d'élus: le recours fréquent à un schéma en deux temps, arrêtant une première étape pour le 1er janvier 2012 et ouvrant sur un approfondissement de l'intégration à partir de 2014. Pour autant, la première phase a laissé un goût amer à certains élus.
Selon une enquête de l'AdCF, parmi les 43% défavorables au sort réservé à leur communauté, 40% invoquent le manque d'études d'impact, 29% des délais trop courts et 28% l'incohérence des bassins de vie retenus.
Vanik Berberian, président de l'Association des maires ruraux de France (AMRF), dénonce "une erreur de méthode, dans les délais comme dans la définition des schémas, en prétendant qu'il suffit de diminuer de moitié le nombre d'intercommunalités pour faire des économies".
Il déplore une approche "trop urbaine" de la réforme, à l'image des "communes périphériques incorporées aux agglomérations: si le rapport d'échelle devient trop grand, on ne pourra tout simplement plus se parler !" prévient-il. Et de "souhaiter bien du plaisir aux communautés intégrées de force sans partage de projet..."
Sans oublier ceux qui craignent que les fusions ou les associations ne se fassent par le bas, avec des pertes de compétences, notamment sur l'action scolaire. D'où la demande de l'Association des maires de France de pouvoir conserver les syndicats intercommunaux à vocation scolaire (Sivos). Mais aussi de prévoir une clause de revoyure des schémas en 2015, après les prochaines élections municipales, au lieu de 2018.
ENTRETIEN
Jean-Marc TODESCHINI, sénateur de la Moselle : "La méthode utilisée n'est pas la bonne"
Le Courrierdesmaires.fr : Pourquoi avoir écrit au chef de l'Etat sur le calendrier de réforme ?
J.-M. T- Les délais de décision sont trop courts ! On demande aux élus de se prononcer alors qu'ils n'ont pas de simulations financières, sans savoir comment vont être répartis le passif et l'actif de chacun, ou comment s'opérera le transfert de charges entre communautés. La méthode utilisée n'est pas la bonne, il n'y a pas de "coproduction" avec les élus.
Les périmètres proposés en Moselle sont-ils trop larges ?
J.-M. T- L'Etat justifie la création de grandes intercommunalités parce qu'on n'a pas réussi à supprimer les communes, mais nous sommes riches de 36 000 communes ! Certes, on peut reconnaître que les grandes agglomérations ont des charges de centralité importantes, mais sans pour autant éloigner le centre de décision des citoyens. Et des ensembles de 300.000 habitants où les habitants sont éloignés de 40 à 50 kilomètres ne créent pas forcément des économies d'échelle. Au final, les petites communautés ont peur d'être happées par de trop grandes intercommunalités, et les agglomérations s'inquiètent de l'absorption des services...
Qu'en est-il pour votre communauté du Sillon Mosellan ?
J.-M. T. - Le préfet m'a proposé de la diviser en deux parce qu'elle est à côté d'une autre communauté sans continuité territoriale. Je n'ai pas d'opposition personnelle à être rattaché à une autre intercommunalité, mais encore faut-il prendre en compte les projets en cours, notamment dans le cadre du plan local d'urbanisme: les citoyens ont payé pour ces études !
Aurélien Hélias
Le Courrier des maires et des élus locaux, 6 octobre 2011