Le Conseil d'Etat
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Favoriser le recours et l’emploi du droit souple pour simplifier les normes et la règlementation applicables aux collectivités territoriales, c'est ce que propose le Conseil d’Etat dans son étude annuelle 2013. Une proposition qui ne manquera pas d’interpeller les associations d’élus locaux désireuses d’une simplification en la matière.
Présentée le 2 octobre 2013, l’étude du Conseil d'Etat définit en premier lieu le droit souple, dont les instruments – codes de bonne conduite, chartes, recommandations de bonnes pratiques… –, utilisés par les acteurs publics et privés, sont à distinguer de ceux du droit « dur » (lois, règlements…).
Le droit souple permet d’élargir la gamme des moyens d’action des pouvoirs publics « au service de la relation entre l’administration et les usagers » dans de nombreux domaines (urbanisme, aménagement, prévention, laïcité…).
Ces instruments juridiques « ont pour objet de modifier ou orienter les comportements ». Ils « ne créent pas par eux-mêmes de droits ou d’obligations », tout en présentant « un degré de formalisation et de structuration qui les apparente aux règles de droit », souligne le Conseil d’Etat. « En donnant un plus grand pouvoir d’initiative aux acteurs, et au-delà plus de responsabilités, le droit souple contribue à oxygéner notre ordre juridique. Il ne s’y substitue pas, il ne le détériore pas. Il constitue un nouveau mécanisme de production du droit », estime Jean-Marc Sauvé, vice-président du Conseil d’Etat.
Lutter contre l’inflation normative
Sous réserve d’un emploi raisonné. Le recours au droit souple doit ainsi se justifier en remplissant, selon le Conseil d’Etat, trois conditions cumulatives : être utile, efficace et légitime. « Pour les acteurs publics, le droit souple ne doit pas être un moyen de s’affranchir des règles de compétences et de contourner la délibération parlementaire », rappelle aussi l’étude. Cela posé, les auteurs formulent 25 propositions visant à donner aux pouvoirs publics une doctrine d’emploi du droit souple, et des outils pour y recourir.
Appliqué aux collectivités territoriales, le droit souple pourrait, selon le Conseil d’Etat :
- « contribuer à la lutte contre l’inflation normative », d’une part;
- « Rationaliser le recours aux schémas et document de programmation », de l’autre.
Sur le premier point, l’étude recommande (proposition n° 5) de « favoriser la substitution du droit souple aux dispositions réglementaires inutilement détaillées ». Autrement dit, d’« encourager, plutôt que l’édiction de normes contraignantes, l’élaboration de recommandations de bonnes pratiques dans les domaines de compétences décentralisées et, en particulier, sur les conditions techniques d’exercice de ces compétences ».
Ces recommandations, élaborées avec — et même par les collectivités territoriales et leurs associations — permettraient aux élus de respecter « les exigences essentielles » de la règlementation par des moyens adaptés aux réalités locales ou à des circonstances particulières.
Ces propositions ne manqueront pas d’interpeller les parlementaires, alors que le Sénat examinera, le 7 octobre, deux propositions de loi renforçant le dispositif de simplification des normes((Deuxième lecture de la proposition de loi portant création d'un Conseil national chargé du contrôle et de la régulation des normes applicables aux collectivités locales (n° 857, 2012-2013) et proposition de loi organique tendant à joindre les avis rendus par le Conseil national d'évaluation des normes aux projets de loi relatifs aux collectivités territoriales et à leurs groupements, présentée par Jacqueline Gourault et Jean-Pierre Sueur (n° 828, 2012-2013) . Ces deux textes feront l'objet d'une discussion générale commune.))
Pour lutter contre la multiplication de schémas sectoriels souvent illisibles pour les collectivités, l’étude estime (proposition n° 6) que « le recours aux schémas et autres documents de programmation pourrait être rationalisé par l’application d’un bilan coûts-avantages permettant de déterminer leur utilité ».