PLUI : point final aux marchandages entre l'Assemblée nationale et le Sénat

Aurélien Hélias

Vingt-cinq pour cent de communes représentant au moins 20 % de la population pourront s’opposer au transfert d’un plan local d’urbanisme aux intercommunalités. Le seuil in fine retenu par les parlementaires de la commission mixte paritaire, réunie le 11 février, privilégie le concept d’une minorité de blocage chère au Sénat. De quoi satisfaire l’AMRF, mais pas l’AMF qui craint que le curseur ne soit trop facilement révisé à l’avenir. L’AdCF, si elle regrette ce droit de veto, préfère retenir les avancées certaines du concept même d’urbanisme intercommunal.

Sous réserve que députés et sénateurs votent en séance publique, le 20 février, le texte issu de la commission mixte paritaire (CMP) réunie le 11 février 2014, les parlementaires ont trouvé une solution de compromis s’agissant du transfert du plan local d’urbanisme (PLU) aux intercommunalités (PLUI).

Le transfert sera entériné, sauf si 25 % des communes représentant au moins 20 % de la population s’y opposent dans un certain délai. La fin d’un long feuilleton qui a vu le seuil d’une minorité de blocage s’effondrer au rythme des différentes étapes de lecture du projet de loi Alur.

Ce compromis n’en est pas vraiment un, tant il épouse les thèses de la chambre haute : entre la proposition initiale du gouvernement, soutenue par les députés, d’un transfert automatique du PLU aux EPCI, et la minorité de blocage introduite par le Sénat dès la première lecture – 25 % des communes représentant 10 % de la population –, inutile de s’appesantir longuement pour savoir laquelle des deux chambres du Parlement a imposé ses vues.

Des seuils « contradictoires avec l’esprit même de la loi »
Symbole de cette victoire des tenants de la plus forte minorité de blocage possible : la satisfaction des maires ruraux (AMRF), qui ont été pendant longtemps les plus farouches opposants au principe même du transfert du PLU aux interco.

« En exigeant une majorité forte […], le Parlement reconnaît aux maires le droit d’exercer leur sens de l’intérêt général sans être dépossédés d’une prérogative essentielle : la gestion de l’espace. Il les responsabilise sans exclure les initiatives d’une vision prospective intercommunale des PLU déjà largement présents sur le territoire là où les élus l’ont décidé », s’est félicité l’association d’élus.

A rebours de cette position, l’AdCF « ne peut souscrire aux possibilités de blocage accordées à une minorité de communes au sein d’une communauté » et regrette des seuils « non recevables car contradictoires avec l’esprit même de la loi ».

Le concept de minorité de blocage est aux antipodes du mode de construction de l’interco."

Philippe Schmit, délégué général adjoint de l'AdCF

« Est entériné quelque chose de curieux : l’idée que la loi n’est pas faite pour la majorité, mais pour une minorité », observe, un peu amer, Philippe Schmit, délégué général adjoint de l’association, chargé de l’urbanisme. D’autant que le seuil de blocage finalement retenu est « extrêmement faible » et que « le concept de minorité de blocage est aux antipodes du mode de construction de l’interco », ajoute-t-il.

L’AMF craint pour l’avenir de la minorité de blocage
Pourtant, l’association d’élus communautaires préfère retenir ce qu’elle considère comme un changement bénéfique de paradigme : « Le principe de l’urbanisme intercommunal est définitivement gagné : il devient la règle, l’urbanisme communal devenant l’exception », se réjouit Philippe Schmit.

Accroissement des capacités d’intervention des communautés en matière de logement et de politiques d’occupation sociale, obligation d’un débat local en 2017 pour décider ou non du transfert, conditions facilités par la CMP pour l’élaboration des futurs PLUI, font que l’AdCF préfère voir le verre à moitié plein qu’à moitié vide. Et ce d’autant que le principe du PLUI intégrera dorénavant tant le Code de l’urbanisme que le Code général des collectivités territoriales.

Et c’est d’ailleurs bien ce qui explique « les importantes réserves » de l’AMF à l’annonce de ce compromis pourtant très favorable aux communes : « Cette compétence obligatoire des communautés d’agglomération et des communautés de communes sera désormais inscrite dans le Code général des collectivités territoriales. Dès lors, un simple amendement, voire une ordonnance, suffira pour modifier la minorité de blocage, faisant ainsi sauter le “verrou” instauré aujourd’hui par la CMP ».

Décidément, le compromis était vraiment introuvable.

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