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© M. Kis
Installé sur le toit d'un gymnase, géré par une association d'insertion sociale avec l'aide des Parcs et jardins de la capitale, ce potager de 600 mètres carrés innove et surprend. Mais trouve sa place, tant auprès des habitants que dans… la réglementation.
Des jardiniers qui s’affairent dans un potager, image banale. Sur le toit d’un gymnase, cela l’est moins. Lorsque le projet de construction de gymnase est lancé, le site est occupé par une friche transformée en jardin solidaire, amoureusement travaillé par les habitants durant 5 ans, dont certains remettent en cause le projet de gymnase.
Dans un arrondissement où la mobilisation des habitants est forte et la vie militante riche, impossible d’imposer un projet ficelé. Les associations et le conseil de quartier sont donc associés au jury du concours d’architecture. Le projet retenu, celui de l’équipe TOA, est le seul à proposer un jardin sur le toit. « Nous sommes venus voir le site, discuter avec les habitants, les jardiniers, raconte Olivier Meheux, de TOA. Nous voulions garder une ambiance faubourienne mais aussi résoudre le problème de la 5e façade, le toit du gymnase, surplombé par des tours. Un projet de maisons sur le toit était hors gabarit. Nous avons alors proposé de dessiner des jardins familiaux ouverts au quartier, avec un accès autonome par rapport à celui du gymnase. »
Les élus acceptent le projet, qui représente un surcoût non négligeable de 500 000 euros.
Le projet de gymnase avec jardin sur le toit, associé à du logement social, est porté par Paris Habitat. La direction des Parcs et jardins finance le jardin, à condition que son usage soit rétrocédé à une association. En outre un logement, avec une grande terrasse, est transformé en local associatif.
Problème de réglementation
Le jardin de 600 m² étant ouvert au public, il doit répondre à des impératifs réglementaires. Ainsi, il doit être équipé d’un ascenseur (qui pose des problèmes de gestion) pour le rendre accessible aux personnes à mobilité réduite. D’où aussi, la nécessité aussi de prévoir des circulations entre les planches permettant à deux fauteuils de se croiser.
« Se posait aussi le problème de la réglementation incendie puisqu’il s’agit d’un équipement public au-dessus d’un gymnase, mais en plein air. Quel classement fallait-il choisir ? », raconte Florence de Massol (photo), adjointe au maire du 20e, chargée de l’environnement et des espaces verts, qui a suivi toute la genèse du projet.
Avec les pompiers, il est décidé de classer le jardin en 5e catégorie, avec une fréquentation limitée à 200 personnes – un peu juste lors des fêtes – et 2 accès.
Ateliers
Le jardin est géré par une association d’insertion sociale l’association ARFOG-La Fayette, qui perçoit des subventions pour organiser des ateliers pour les bénéficiaires du RSA. Mais elle accueille également des personnes venant d’un foyer pour personnes avec problèmes psychiques, des habitants du quartier, retraités ou étudiants.
Les logements sociaux donnant sur le jardin, leurs locataires souhaitaient naturellement en profiter. Une association, Le jardin perché, les accueille, par convention avec ARFOG.
Fleurs et légumes
[caption id="attachment_20479" align="alignleft" width="348"] Une association d'insertion sociale ARFOG-La Fayette gère le potager. L'association Le jardin perché s'occupe de l'accueil des visiteurs.[/caption]
Le jardin sur le toit est ouvert 4 demi-journées par semaine et dès qu’un membre d’une association est présent. Autant dire qu’il est largement accessible. Les jours de grand soleil ne sont pourtant pas ceux qui attirent le plus. En raison de la faible épaisseur de terre, 60 cm au maximum, il s’agit d’un jardin « fleurs et légumes », et les arbres y sont interdits. D’où un manque d’ombre.
Les contraintes de la création d’un jardin sur une toiture ne sont en effet pas négligeables. « Il s’agit d’un véritable ouvrage d’art », explique Olivier Meheux. La toiture doit en effet supporter 1 m3 de terre mouillée par m². Soit une charge d’une tonne. « En cas de fuite dans l’étanchéité, il faut pouvoir pelleter la terre, d’où cette contrainte de charge », explique l’architecte. Les poutres, les poteaux et les fondations nécessaires expliquent le surcoût de 500 000 euros.
Eau, déchets verts et bruit
Quelques problèmes se sont posés avec le fonctionnement du jardin :
– les cultures sur un toit, avec peu de terre, demandent beaucoup d’eau ; d’où l’idée de récupérer les eaux de pluie des toitures des logements pour les chasses d’eau en hiver et le jardin en été. Mais en 2003, le projet n’obtient pas les autorisations sanitaires, les toitures étant en cuivre. Les installations, réalisées, n’ont jamais été mises en service. D’où une facture d’eau élevée qui pose un problème à l’association;
– autre sujet problématique : les déchets verts, volumineux et pour lesquels manque un stockage, le bac à compost ayant tendance à déborder ;
– enfin, malgré la fermeture du jardin la nuit, des jeunes y pénètrent et y font du bruit gênant pour les habitants des logements sociaux qui le surplombent. Or, n’étant pas un lieu public, la police ne peut y pénétrer.