« Nous tenons à un opérateur public unique de la forêt, mais pas à n'importe quel prix ! »

Denis Solignac
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Maréchal Huguette - 26/02/2016 09h:40

Nous assistons à une surexploitation de la forêt, préjudiciable à court terme pour l'ONF aussi. Le temps du bois n'est pas celui de l'homme. Les travaux sylvicoles sont de plus très destructeurs de surface forestière, avec des cloisonnements perpendiculaires dont le seul but est de faciliter la pénétration des ouvriers. Le bois était entretenu autrefois sans massacre. Le bois énergie n'est pas rentable, puisqu'il détruit des perches, qui sont l'avenir et des brins. De plus les tickets de pesée étant secret industriel, ils ne sont pas communicables aux vendeur (information ONF de Bar-le-Duc) c'est donc parti.

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« Nous tenons à un opérateur public unique de la forêt, mais pas à n'importe quel prix ! »

Dominique Jarlier, président de la FNCOFOR

© FNCOFOR

Un sujet en particulier occupe l’esprit de Dominique Jarlier, président de la Fédération nationale des communes forestières (FNCOFOR), à l’heure du Congrès national des communes forestières qui se tient les 1er et 2 octobre à Nancy : le contrat d'objectifs et de performances (COP). Il doit lier la FNCOFOR, l'Etat et l'Office national des forêts (ONF) pour les quatre ans à venir. Le projet de texte fait l'objet de négociations serrées depuis des semaines. Les communes forestières et leur partenaire historique, l'ONF, sont en conflit autour des termes du contrat. Explications.

Courrierdesmaires.fr. En l'état, vous refusez de signer le futur contrat qui vous liera à l'Etat et à l'ONF. Que lui reprochez-vous ?

Dominique Jarlier((Dominique Jarlier, maire (PS) de Rochefort-Montagne (Puy-de-Dôme), préside depuis octobre 2014 la Fédération nationale des communes forestières (FNCOFOR).)). La proposition que nous fait l'ONF est une compilation de mesures comptables qui vise à rétablir son équilibre budgétaire. L'endettement de l'ONF s'élève à environ 400 millions d'euros, soit la moitié de son budget annuel. Cela fait des années qu'elle boucle ses fins d'exercice grâce aux importantes subventions de l'Etat qui dans le même temps ne parvient pas à lui imposer des économies de fonctionnement.

Alors, en attendant, que se passe-t-il ? On se tourne vers les communes. Le résultat, c'est une série de mesures qui vise à accroître notre contribution financière mais qui, selon nous, va s'avérer contre-productive en termes de mobilisation du bois et donc, au final, en termes de recettes pour nous comme pour l'ONF.

Nous encourageons la politique d'incitation au regroupement de la gestion des forêts communales, mais il ne faut pas que cela se fasse sous la contrainte”

Concrètement, de quoi s'agit-il ?

D. J. Par exemple, le projet de COP prévoit l'augmentation des frais de garderie à hauteur de 20% par un jeu de déplacement de la TVA. Pour 10 euros qu'une commune verse aujourd'hui, 8,33 euros vont à l'ONF et 1,66 euros à l'Etat sous forme de TVA. Demain, 10 euros partiront à l'ONF et il faudra payer en plus 2 euros de TVA. On estime ce surcoût à 5 millions d'euros.

Autre exemple, on nous propose de développer la vente de bois façonné, c'est-à-dire coupé et déposé au bord de la route. Aujourd'hui, nous vendons principalement sur pied : les acheteurs assurent l'exploitation des arbres qu'ils achètent. Cette mesure nous semble acceptable, car nous faisons déjà un peu de façonnage.

Cependant, pour calculer la rétribution de l'ONF, on ne se baserait plus sur les recettes nettes mais sur les recettes brutes [ndlr : avant soustraction des frais d'exploitation], ce qui pour certains types de bois ferait exploser les frais de garderie.

Un dernier exemple porte sur une politique d'incitation au regroupement de la gestion des forêts communales. Au niveau de la FNCOFOR, nous l'encourageons mais il ne faut pas que cela se fasse sous la contrainte.

Or, on nous propose un système de bonus/malus, bonus pour les regroupements et malus pour celles qui n'y auraient pas consenti, avec un seuil de déclenchement qui pourrait être fixé à 500 hectares.

Dans des régions comme la mienne, l'Auvergne, il faudrait en agglomérer des forêts avant d'arriver à 500 hectares ! Mais avec un terrain aussi accidenté et des forêts communales aussi dispersées, l'économie en termes de gestion serait nulle((Depuis cet entretien, il semblerait que cette mesure de bonus/malus ait été abandonnée au cours des négociations.)).

En quoi la hausse des frais de garderie serait-elle contre-productive en termes de mobilisation du bois ?

D. J. Il faut savoir que les frais de garderie versés par les communes à l'ONF ne le sont qu'en cas de vente de bois. Cela se calcule au m3 vendu. Donc, l'ONF a tout intérêt à ce que les communes mobilisent plus de bois pour le marché.

De notre côté, c'est ce que nous apportons dans le contrat. Nous nous engageons, comme nous le faisons déjà, à inciter les communes à mobiliser de plus en plus de bois et de qualité. Et ce, si possible, sous forme de contrat d'approvisionnement pour assurer aux acheteurs une continuité de la ressource sur une période donnée.

Mais il y a un lien très sensible entre le coût de gestion de la forêt et la mobilisation du bois. Plus vous accroissez le coût de gestion, moins les communes exploitent. On estime qu'un tiers des communes propriétaires de forêts gagne de l'argent en vendant du bois. On peut imaginer que ce taux diminuerait si le coût de cette gestion croissait d'au moins 20% comme cela est prévu dans le contrat.

Nous savons que nous payons l’ONF plus cher que si nous faisions appel à des entreprises privées, mais nous faisons le choix de la qualité et de la continuité des travaux. Cependant, il y a des limites”

Que se passerait-il si, à l'issue de ces négociations, il y avait un constat de carence ?

D. J. Si nous ne signons pas, l'Etat fait ce qu'il veut. La loi peut nous obliger à couper du bois mais, franchement, il serait légitime pour l'intérêt de leurs communes que des maires refusent de le faire à perte.

Par ailleurs, nous demanderions aux parlementaires de délivrer les communes de la contrainte de l'opérateur unique [ndlr : ONF], imposée par le régime forestier. Nous aurions alors la possibilité de faire de la délégation de service public pour entretenir et exploiter nos forêts.

Et même si l'Etat nous imposait une augmentation de notre contribution, les choses seraient relativement simples. Aujourd'hui, outre les frais de garderie, les communes commandent à l'ONF pour environ 60 millions d'euros par ans de travaux forestiers, dans le cadre de ses activités concurrentielles. Nous savons que nous les payons plus cher que si nous faisions appel à des entreprises privées, mais nous faisons le choix de la qualité et de la continuité des travaux. Cependant, il y a des limites.

Dans le cadre du précédent contrat, les communes ont joué le jeu en acceptant de payer une prime de 2 euros par hectare géré, soit 5 millions d'euros partis dans les caisses de l'ONF, dans un contexte budgétaire difficile…

Le fait est qu'en contrepartie, l'ONF a perdu à peu près l'équivalent en commandes de travaux. Les budgets des communes ne sont pas extensibles !

Etes-vous confiant à l’approche de la dernière étape de la discussion ? Peut-on envisager qu'aucun contrat ne soit signé ?

D. J. On peut l'envisager et ça ne serait pas dramatique pour nous. Notre priorité, c'est la gestion durable et multifonctionnelle de la forêt. L'outil pour mener cette gestion et auquel nous sommes attachés, c'est l'ONF.

Ce ne serait pas simple de le remplacer. Pour autant, il ne faudrait pas que la subsistance de l'ONF passe devant notre priorité. Nous tenons à un opérateur public unique mais pas à n'importe quel prix !

Aujourd'hui, les négociations se font en tête à tête avec l'Etat. Je pense que le ministre qui tient absolument à venir à notre congrès, aura des propositions à nous faire, et des propositions acceptables, sans quoi il serait mal accueilli.

Par la suite, nous allons organiser une consultation auprès de toutes nos associations départementales. Dans le cadre du précédent contrat, nous avions pris sur nous de défendre la signature auprès des communes. Aujourd'hui, nous n'y sommes pas prêts.

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