Municipales 2014 : à gauche toute ! Douai à contre-courant

Municipales 2014 : à gauche toute ! Douai à contre-courant

Douai-rivage scarpe

© Flickr-Aprilmo

Ancrée depuis trente et un ans à droite, Douai, la cité de Gayant (Nord), vient de virer à gauche. A l'opposé de la vague bleue qui a dominé ces élections municipales. Explications.

A gauche, toute. A première vue, le changement qui a eu lieu à Douai (43 530 hab.), le 31 mars 2014, est surprenant. Après trente et un ans de règne sans partage de Jacques Vernier (UMP) à la tête de la mairie, cette dernière vient de passer à gauche. Le socialiste Frédéric Chéreau (photo) a été élu au second tour avec 45,91 % des voix. Sa concurrente, Françoise Prouvost, première adjointe du maire sortant et adoubée par celui-ci, n'a récolté que 35,83 % des voix. ((Le candidat du Front national, Guy Cannie, obtient 18,25 % des voix.))

Trois causes pour un échec

A y regarder de plus près, on comprend mieux ce revirement. Selon Jacques Vernier, qui avait décidé à l'approche de ses 70 ans de ne pas se représenter, trois grands facteurs explique l'échec de la droite : « Depuis plusieurs années [ndlr: hormis les municipales], Douai vote largement à gauche. Ainsi, aux régionales de 2010, l'UMP a  fait 28,5 %, contre 51,74 % pour le PS , et aux législatives de 2012, l'UMP a fait 25,21% contre 52,35 % pour la gauche. Sur ce terreau 'rose' , nous nous sommes offerts le luxe de deux listes de droite. De plus, la démission de mon adjoint, suite à son échec sur le tram, couplé à ses propos acides envers mon équipe, ont fait beaucoup de mal. »

De fait, la présence de deux listes concurrentes - celle de Françoise Prouvost (UMP) soutenue par le maire sortant, et la liste de la "dissidente" Marie-Hélène Quatreboeufs-Niklikowski, a joué contre la droite. « La division est un poison mortel », commente Jacques Vernier.

« Il y avait vraiment une volonté de changement. A mon grand regret, je n'ai pas réussi à l'incarner au premier tour. Je prends ma part de responsabilité : je n'ai peut-être pas été assez convaincante », concède Marie-Hélène Quatreboeufs-Niklikowski.

Une démission qui a pesé

Cette volonté de changement est, selon Frédéric Chéreau (38 ans), la première cause du succès de sa liste : « De belles choses ont été faites en trente et un ans, mais les gens avaient l'impression que la ville s'endormait. Il fallait du neuf. La guerre inexpiable entre les deux listes de droite ne leur a pas favorable. Les gens ont vu d'un mauvais œil le rassemblement de ces deux listes, alors que le nôtre avait été annoncé et qu'il s'est fait naturellement. »

De belles choses ont été faites en trente et un ans, mais les gens avaient l'impression que la ville s'endormait. Il fallait du neuf."

Frédéric Chéreau, nouveau maire (PS) de Douai

Le mariage « de raison » des deux candidates de droite entre les deux tours n'aurait pas convaincu les électeurs. Ont-ils été influencés par les propos de l'ancien adjoint à Douai et ancien président de la communauté d'agglomération du Douaisis Jean-Jacques Delille ? Suite à la fusion des deux listes, il a en effet déclaré qu'il préférait voter pour Frédéric Chéreau, plutôt que pour la liste de droite englobant Marie-Hélène Quatrebœufs, qu'il avait pourtant soutenue durant la campagne.

D'après Jacques Vernier, la démission fracassante de Jacques Delille de tous ses mandats est la troisième cause d'échec de la droite à Douai. « Alors que mes quatre mandats ont baigné dans l'huile de la cohésion, la démission avec fracas de mon ancien adjoint, en 2009, a fait couler beaucoup d'encre et alimenté toutes les conversations. Son échec sur le tramway de Douai l'a rendu très amer et très agressif », regrette le maire sur le départ.

Transition républicaine

L'autre cause de l'échec de la droite souvent évoqué sur les blogs et articles est celle du faible dynamisme des commerces du centre-ville. « J'espère que ce n'est pas à cause de cela car nous avons le même problème que toutes les villes moyennes de France », estime Jacques Vernier.

Pour modifier l'issue du scrutin, le maire sortant estime qu'il aurait peut-être dû démissionner de son mandat pour laisser à Françoise Prouvost le temps de se faire connaître : « Mais avec la démission de Jacques Delille, j'ai considéré à l'époque que cela aurait été une fuite. Je ne pouvais pas faire comme lui. »

« Nous avons réussi une belle campagne et offert une alternative crédible », estime le nouveau maire, Frédéric Chéreau.

Entre l'ancien et le nouveau maire, le passage de relais se prépare sereinement. Ils ont annoncé les résultats de l'élection ensemble et se sont rencontrés pour assurer au mieux la transition. Lors de l'annonce des résultats le 31 mars, Frédéric Chéreau a même salué l'action de Jacques Vernier, dans "La Voix du Nord" : « Un républicain consciencieux et respectueux. J’espère qu’il pourra, ponctuellement à nos côtés, apporter ses compétences et son savoir sur les grands enjeux qui s’annoncent pour Douai. »

Les territoriaux sereins

Les agents municipaux  (675 à la ville et 132 au CCAS) paraissent sereins. Ils souhaitent que le nouveau maire soit réceptif à leurs demandes. « Par rapport aux autres communes, nous avons un régime indemnitaire assez bas avec très peu d'avantages. Les agents espèrent que le nouveau maire sera plus du côté des fonctionnaires. Nous espérons pouvoir le rencontrer plus facilement », explique Pascal Vernez. Le secrétaire général du syndicat CFTC compte remettre le 6 avril une lettre en main propre à Frédéric Chéreau, l'objectif étant d'obtenir une prime équivalente à un 13e mois.

Un autre agent, qui souhaite garder l'anonymat, confirme : « De toutes les communes de l'arrondissement nous sommes les moins bien payés. Nous n'avons par exemple pas de participation de l'employeur à la mutuelle. Nous espérons pouvoir progresser. »

Jamais un jour de grève

Jacques Vernier rétorque : « Nous avons fait beaucoup de choses pour les agents. En trente et un ans de mandat, je n'ai jamais eu un jour de grève (hormis les mots d'ordre nationaux). Le nouveau maire aura très peu de marge de manœuvre financière pour les salaires qui représentent 50 % des frais de fonctionnement((Le budget de fonctionnement est de 59 millions d'euros et le budget d’investissement de 20 millions d'euros)) ».

La sérénité semble aussi de mise chez les cadres. Le directeur général des services (DGS), qui a déjà rencontré le nouveau maire, doit garder ses fonctions et aucun départ, parmi les cadres, n'est annoncé. « Tous souhaitent rester, confirme le nouvel édile. Nous ne leur demandons qu'une chose : un investissement fort dans le nouveau projet. »

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