Métropole du Grand Paris : les réactions

La nouvelle mouture du projet de création de la métropole du Grand Paris, discutée à l'Assemblée nationale à partir du 16 juillet, est loin de susciter l'approbation. Entre franche hostilité et soutien prudent, les réactions des partis politiques et des acteurs du Grand Paris laissent augurer de débats animés.

Les propositions et prises de position sur l'architecture de la future Métropole du Grand Paris se multiplient à la veille de la discussion en première lecture, par l'Assemblée nationale, du projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles. Communistes, Front de gauche et UMP critiquent la complexité et l'éloignement démocratique de la réforme. Les socialistes l'approuvent généralement, mais avec moult demandes de précisions.

Paris Métropole : césure entre grande et petite couronnes
Sur son blog,  Philippe Laurent, président du comité syndical de Paris Métropole, rapporte un « débat intense de près de trois heures » de ce comité, tenu le 11 juillet. Majoritairement, il en ressort que le projet présenté par l’amendement gouvernemental « ne correspond ni à la philosophie, ni aux objectifs, ni à la démarche, affirmés de manière constante depuis le début par Paris Métropole ».

Le projet crée une césure entre la grande couronne et la petite couronne, la  première pouvant encore s’organiser en intercommunalité, mais non la seconde. En outre, de 4 à 5 milliards d’euros de fiscalité des communes et intercommunalités de la petite couronne seraient transférés à la future Métropole du grand Paris (MGP). Et plusieurs dizaines de milliers d’agents des structures intercommunales existantes et de la ville de Paris seraient transférés vers la MGP. « Les élus locaux rassemblés dans Paris Métropole refusent donc le scénario issu des amendements gouvernementaux. »

Ces élus proposent, pour réussir la construction métropolitaine, « la généralisation d’intercommunalités conçues comme des 'coopératives de villes', pleinement respectueuses du rôle et de l’importance des communes sur cette agglomération, que peut se construire une structure métropolitaine (sur le modèle du 'pôle métropolitain', par exemple) donnant une cohérence métropolitaine aux principales politiques publiques et assurant, par une mutualisation financière d’une partie des ressources, une plus grande équité sur le territoire de la métropole. »
Les élus de Paris Métropole appellent donc à « une refonte complète du texte gouvernemental ».

Jean-Marc Nicolle : qualifier la notion de territoire
Jean-Marc Nicolle, conseiller régional, délégué spécial au Grand Paris, rappelle le souhait de la région que le gouvernement reconnaisse le fait métropolitain en Ile-de-France. Le texte adopté par la commission des lois de l’Assemblée nationale doit évoluer en s’appuyant sur les EPCI existants et aboutir soit à l’achèvement de la carte des intercommunalités en petite couronne, soit à mieux qualifier la notion de « territoires » prévue dans les amendements du gouvernement, en reconnaissant la spécificité francilienne de la coopérative de ville.

Selon Jean-Marc Nicolle, la grande couronne ne doit pas devenir la banlieue de la métropole du Grand Paris. Il souhaite donc que les dynamiques territoriales des projets transversaux entre les grands EPCI de grande couronne et la future métropole soient bien articulées.

Lire notre article : Jean-Marc Nicolle, délégué spécial au Grand Paris : "La réflexion sur l'intercommunalité continuera"

Bertrand Delanoë : pas de fusion des départements
Le maire de Paris, Bertrand Delanoë (PS), s'est dit défavorable, le 8 juillet, à une fusion des départements de Paris et de la petite couronne. Les départements doivent, selon lui, conserver la politique de cohésion sociale, qui "ne se mène pas trop loin des habitants". "La question (de la fusion des départements, ndlr) ne se pose pas pour l'instant, mais je ne la leur conseille pas", a-t-il ajouté.

Afin d'éviter "le risque de transférer une limite qui était le périphérique à une autre, qui serait la délimitation entre la petite et la grande couronne", il propose d'autoriser l'adhésion à la métropole des collectivités qui le souhaitent, même si elles sont situées hors des trois départements limitrophes de Paris. Selon lui, les "conseils de territoire n'existent pas, alors que les intercos marchent bien".

Le 1er juillet, avec Anne Hidalgo, première adjointe de Paris et candidate aux prochaines municipales, et Claude Bartolone, président de l'Assemblée nationale, Bertrand Delanoë a adressé au Premier ministre une proposition commune sur l'architecture du Grand Paris. Ils demandent une métropole instituée sur Paris et les trois départements de la petite couronne, une représentation directe des 124 villes au sein de la métropole, une révision de la carte intercommunale de la grande couronne. Région et départements devraient continuer à exister.

Valérie Pécresse : "monstre administratif"
Sur son fil Tweeter, Valérie Pécresse, conseillère régionale de la région Ile-de-France, chef du groupe UMP, développe ses critiques du projet gouvernemental. Le projet de métropole de Paris est, affirme-t-elle « un monstre administratif 5 échelons », qui « instaure une fracture entre la zone centre dynamique et riche en emplois », sans contrôle des habitants. Elle annonce déposer à l’Assemblée nationale un amendement « proposant de tenir une conférence pour l’avenir du Grand Paris ».

Neuilly-sur-Seine : perte d'autonomie des communes
Les conseillers municipaux de Neuilly-sur-Seine, réunis le 11 juillet en commission plénière, ont fait part de leurs observations au gouvernement. Ils regrettent la perte d’autonomie et de pouvoir d’initiative des communes, privées des compétences urbanisme et logement et réduites au rôle d’exécutante de plans, schémas et programmes décidés par un exécutif élu au suffrage indirect. Ils craignent que créer des périmètres différents pour le logement, les mobilités et le développement économique ne soit source d’inefficacité.

Des territoires de projet seraient, selon les conseillers de Neuilly, plus pertinents que des périmètres administratifs.

Enfin, ils contestent la forme qui fait qu’un texte fondamental est proposé par le biais d’amendements déposés au dernier moment sans étude d’impact.

Plaine Commune : non à la disparition des interco
Les élus de Plaine Commune (Seine-Saint-Denis), réunis le 10 juillet pour un conseil communautaire exceptionnel, s’inquiètent eux-aussi du projet gouvernemental et de la disparition des intercommunalités de petite couronne, sur fond de prédation de Paris, d’urgence sociale, d’achèvement de la carte intercommunale,ou encore de dilution des pouvoirs communaux, comme le détaille lagazettedescommunes.com .

Le président de Plaine Commune, Patrick Braouezec (élu de la FASE, une composante du Front de gauche), a appelé les élus à envoyer aux députés et au gouvernement un vœu selon lequel la nouvelle métropole "n'est pas recevable en l'état".

Seine-Amont : déni de démocratie
"Ce projet nous ramène 50 ans en arrière: les communes sont le terreau de la démocratie française, supprimer leurs compétences est un déni de démocratie", écrivent dans un communiqué commun du 10 juillet Daniel Davisse, maire de Choisy-le-Roi et président de la communauté d'agglomération Seine-Amont, Alain Audoubert, maire de Vitry, ainsi que le maire d'Ivry Pierre Gosnat, tous trois communistes. Selon eux, cette nouvelle métropole transformera les communes de la petite Couronne en "mairies d'arrondissements sans pouvoir de décision" en matière d'habitat, de logement, d'aménagement ou d'environnement.
André Chassaigne, président des députés Front de gauche, estime que "derrière ce texte, il y a la volonté d'éradiquer la présence communiste dans les banlieues".

Est-Ensemble: oui à la fusion des collectivités
Gérard Cosme, président de la communauté d'agglomération Est Ensemble, à l'inverse des élus de Plaine Commune, "assume et accepte l'idée de fusionner, à terme, les collectivités et structures de petite couronne dans une même entité". Il en escompte une meilleure répartition des richesses. Il demande cependant la fixation d'un calendrier de mise en œuvre qui ne pénalise pas la construction de logements, de préciser le rôle des conseils de territoire et de s'appuyer sur les dynamiques et expériences des EPCI existants. Il demande aussi de laisser les communes se constituer elles-mêmes en territoire, la constitution par décret étant l'exception. Enfin, il souhaite "une élection au suffrage universel direct des élus de la métropole et des territoires dès le prochain renouvellement en mars 2020."

DGS d'Ile-de-France: "invraisemblable complexité"
Les directeurs généraux des services d’Ile-de-France ont développé, lors de leur congrès, le 9 juillet à Cergy-Pontoise, les motifs de leur opposition au projet gouvernemental.
Selon eux, le super EPCI de 124 communes et 6,5 millions d’habitants couvrant la petite couronne, est « un monstre bureaucratique et technocratique qui éloigne le centre de décision des citoyens ». Ils dénoncent des transferts de compétences « d’une invraisemblable complexité ».

Ils plaident en faveur d’un pôle métropolitain, grande couronne comprise, doté de compétences obligatoires transférées par les communautés d’agglomération, qui seraient maintenues. Cette proposition, selon les DGS, permettrait de préserver les dynamiques territoriales.

Amendement socialiste
Pour leur part, les députés socialistes ont déposé un amendement repoussant la création de la métropole d’un an, soit au 1er janvier 2016 au lieu de 2015, de façon à ce que « le calendrier de constitution de la Métropole et celui de l’achèvement de la carte intercommunale en grande couronne coïncident ».

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