Martin Malvy
© V. Vincenzo
«Le défi des fractures territoriales : 2014-2020» est le thème des XVIes Assises de l’Association des petites villes de Frances (APVF), qui se tiennent les 30 et 31 mai 2013, à Saint-Rémy-de-Provence (Bouches-du-Rhône). Entretien avec son président, Martin Malvy,qui évoque notamment la réforme territoriale et l'interco.
Le Courrier : Vous organisez vos Assises au moment où le Parlement débat de la réforme territoriale. Ce texte vous satisfait-il ?
Martin Malvy. L’APVF appelle depuis longtemps à la mise en place de conférences territoriales au sein desquelles les élus locaux d’une même région organiseraient, au plus près des réalités du territoire, une répartition claire et efficace des compétences non attribuées spécifiquement par la loi. Et elle fut la première à demander la création d’un Haut conseil des territoires, pour moderniser les conditions du dialogue entre l’Etat central et les élus locaux. On peut regretter que ce dernier point soit renvoyé au troisième projet de loi, car l’idée est bonne, et sa concrétisation urgente. Nous proposerons donc aux parlementaires de réintégrer ce point dans le premier projet de loi.
Quelles sont vos principales préoccupations ?
Martin Malvy. L’APVF sera très attentive à trois points.
D’abord, il est impératif de conserver une vue globale de la décentralisation, qui ne saurait se limiter à une consécration des métropoles : certes, elles sont nécessaires à la compétitivité, mais l’aménagement équilibré du reste du territoire l’est tout autant.
Ensuite, il y a « un juste curseur » à trouver en matière de répartition des pouvoirs entre les communes et l’intercommunalité. Certains maires craignent qu’un nouveau « jacobinisme supracommunal » ne remplace le jacobinisme d’Etat, même parmi les plus chauds partisans de l’intercommunalité. Souhaitons donc qu’une conférence intercommunale des maires soit mise en place dans toutes les intercommunalités, et pas seulement les métropoles.
Enfin, la modernisation de l’action publique passe par une réforme en profondeur du rôle et des moyens d’action de l’Etat territorial. Et sur ce point, les élus locaux restent encore sur leur faim.
Certains maires craignent qu’un nouveau 'jacobinisme supracommunal' ne remplace le jacobinisme d’Etat, même parmi les plus chauds partisans de l’intercommunalité."
Les petites villes auront-elles les moyens financiers d’agir ?
Martin Malvy. Les petites villes auront besoin d’agir sur tous les leviers. La mutualisation des moyens, notamment au sein de l’intercommunalité, doit permettre de dégager des économies d’échelle. Mais les petites villes ont besoin des autres acteurs publics.
D’un côté, l’Etat doit admettre que la décentralisation est indissociable de l’autonomie fiscale et, si cette autonomie est moins en péril dans les communes que dans les régions, il est important de poursuivre ce chantier : le bloc local a, lui aussi, besoin de plus de libertés.
De l’autre, les petites villes ne vivent pas seules, mais en partenariat avec la région et le département.
Nous serons donc très attentifs à ce que tous les niveaux conservent la possibilité (légale et financière) de s’engager pour des projets portés par les petites villes. A ce titre, nous nous félicitons du retour à la clause de compétence générale.
Pour autant, nous n’oublions pas en permanence de réclamer l’assouplissement des normes. Elles coûtent cher au contribuable.
Le nouveau mode d’élection des conseillers communautaire en 2014 suffira-t-il à démocratiser l’intercommunalité ?
Martin Malvy. Rappelons d’abord que l’intercommunalité est déjà démocratique. Les délégués des communes étaient, comme les sénateurs, élus au suffrage universel indirect, mais au suffrage universel quand même.
La réforme « un bulletin-deux listes » n’apportera pas une révolution en la matière. Elle permettra peut-être de faire œuvre de pédagogie, nos concitoyens apprenant ainsi à mieux identifier le niveau intercommunal et ses enjeux.Ce sera en tout cas un point d’équilibre : aller plus loin reviendrait à couper le cordon ombilical entre communes et communautés. Passer de l’intercommunalité à la supracommunalité ne serait pas acceptable.
La réforme '1 bulletin, 2 listes' n’apportera pas une révolution, mais permettra peut-être de faire œuvre de pédagogie."
Les mesures annoncées par le gouvernement suffiront-elles à « restaurer » la confiance des administrés dans leurs élus ?
Les maires, en particulier, échappent largement au climat de défiance. Nos concitoyens connaissent et apprécient le degré d’engagement des élus locaux, au quotidien, sur le terrain. Il faut arrêter ce discours insupportable et dévastateur. Il y a plus de 600 000 élus en France dont 90 % sont bénévoles et dont la grande majorité des 10 % restants ne perçoivent pas 1 000 euros par mois.
© 2013, le Courrier des maires, n°268, mai 2013 - Commander la publication