Maires de France : un 95e congrès consensuel avec l’Etat

A la veille du Congrès de l'Association des maires de France, les motifs d’insatisfaction ou d’inquiétude des élus locaux laissaient craindre des échanges tendus avec le gouvernement. Or le climat s'est révélé plutôt consensuel avec l’Etat. François Hollande a, il est vrai, désamorcé un certain nombre de problèmes, dès la séance d’ouverture du congrès.

Au terme de son 95e Congrès, l’Association des maires de France n’aura pas obtenu gain de cause sur les 20 points de sa résolution finale, présentée jeudi 22 novembre 2012. Mais, de l’aveu même de son président, Jacques Pélissard (photo, à droite), les élus ont "apprécié le discours du président de la République (photo, à gauche), ils ont pris acte des engagements formulés et veilleront à ce que le cap fixé soit tenu par le gouvernement".

Gel des dotations de l’Etat, poids des normes, incertitudes sur le financement des investissements, nouveaux rythmes scolaires dès 2013, "mariage pour tous"…, à la veille du 95e Congrès des maires, les motifs d’insatisfaction ou d’inquiétude des élus locaux laissaient craindre des échanges tendus avec le gouvernement, dont une douzaine de ministres se sont rendus porte de Versailles, du 20 au 22 novembre 2012. Il n’en fut rien. Le rendez-vous annuel des maires s’est tenu dans un climat plutôt consensuel avec l’Etat.

Le président de la République a, il est vrai, désamorcé un certain nombre de conflits potentiels dès la séance solennelle d’ouverture du congrès.


Mariage pour tous

Actualité oblige, le projet de loi relatif au mariage pour tous, qui sera discuté an début 2013, a été abordé dès les premiers échanges. Jacques Pélissard a rappelé que "les maires marient au nom de la loi et seront donc chargés d’appliquer la loi de la République".

Cependant, le président de l’AMF a souligné les inquiétudes des élus, "qui portent aussi sur les conséquences inéluctables en terme de droit de la filiation de cette réforme sociétale". Et demandé "que soient étudiées toutes les pistes juridiques susceptibles de concilier respect de la loi et respect des consciences des maires", au sein d’un groupe de travail créé sur le sujet avec la chancellerie.

En réponse, le chef de l’Etat a rappelé que les maires, "représentants de l’Etat", devront appliquer la loi, tout en admettant que ce texte puisse heurter certains élus : "La loi s’applique pour tous dans le respect néanmoins de la liberté de conscience."

François Hollande a ainsi rappelé que les maires peuvent d’ores et déjà déléguer à un adjoint la célébration d’un mariage, en soulignant que "ces possibilités de délégations peuvent être élargies". Cependant, la liberté de conscience ou la faculté pour les élus de faire jouer une clause de conscience pour refuser de célébrer un mariage ne figureront pas dans le projet de loi, a précisé le gouvernement.

Lire l'article de X. Brivet, Le "Mariage pour tous" s'invite aux débats du Congrès des maires

Contrat de confiance

François Hollande a réitéré son souhait d’adopter un code de bonne conduite entre l’Etat et les collectivités, un "contrat de confiance".

Le Haut conseil des territoires, conçu comme un "lieu de concertation, d'évaluation et de négociation", en sera le laboratoire pour le nouvel acte de décentralisation, dont Marylise Lebranchu a annoncé la présentation "en février". "L’AMF y jouera un rôle éminent, et les élus pourront le saisir directement lorsqu’un sujet le justifie", a souligné le chef de l’Etat.

Le contrat de confiance se déclinera sur le plan financier. Mais François Hollande n’en a pas dévoilé le contenu, se bornant à indiquer qu’il intégrera un volet "sur les dotations, les charges transférées et leurs contreparties, la péréquation".

Il n’a pas non plus donné suite à la proposition de l’AMF d’élaborer une "loi de finances des collectivités" permettant de clarifier les relations financières avec l’Etat.

Pour calmer l'inquiétude des élus devant l'inflation normative pesant sur leur budget, il a réitéré sa volonté de "renforcer la Commission consultative d’évaluation des normes (CCEN) qui sera dotée d’un pouvoir de rectification des normes devenues obsolètes, de faire qu’un avis".

Lire l'article de X. Brivet, Un projet de loi sur l'avenir de la décentralisation en février 2013

Lire l'article d'A. Hélias, Pour préserver l'investissement, il faudra dépenser moins

Accord de principe sur l’agence de financement

Soucieux de soutenir le financement des investissements locaux, le chef de l’Etat a confirmé la création "début 2013" d’une "banque publique des collectivités locales constituée de la Banque postale et de la Caisse des dépôts".

Il a précisé que « sur la période 2013-2017, la Caisse mettra à disposition des collectivités 20 milliards d’euros pour financer les investissements à très long terme via les fonds d’épargne, eux-mêmes augmentés par le relèvement du plafond du livret A ».

Surtout, après des mois d’atermoiements, François Hollande a accueilli favorablement le projet de création de l’Agence de financement des collectivités.

Soutenu par les principales associations d’élus, ce projet avait pourtant fait l’objet d’une fin de non-recevoir de la part du ministre de l’Economie et des finances, le 9 novembre, lors d’un déplacement à Dijon…  L’Etat et les associations arrêteront de concert, dans la semaine du 26 novembre 2012, le processus de création de cette agence, qui pourrait être entériné par un amendement du gouvernement dans le collectif budgétaire pour 2012.

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Rythmes scolaires en deux temps

Le président de la République, relayé par le ministre de l’Education nationale, a répondu en partie au souhait de l’AMF de décaler à 2014, et non à 2013 comme le prévoyait le gouvernement, l’application généralisée des nouveaux rythmes scolaires.

Un compromis a été trouvé avec les maires : la réforme sera mise en oeuvre sur deux ans : 2013 et 2014. Mieux encore, un "fonds spécial de 250 millions d’euros sera débloqué pour les communes les plus en difficulté" qui s’engageront à appliquer les nouveaux rythmes dès la rentrée 2013.

Lire l'article de X. Brivet, Les nouveaux rythmes scolaires généralisés en 2014

Fléchage des conseillers communautaires

Au chapitre électoral, le président de la République a confirmé l’élection par fléchage des conseillers communautaires lors des élections municipales – confirmée en mars 2014 par le ministre de l’Intérieur —, excluant, à la grande satisfaction de l’AMF, le suffrage universel direct, "car la collectivité territoriale de plein exercice, c’est la commune". Il a assuré les maires que le gouvernement renforcera le statut de l’élu.

Lire l'article de X. Brivet, Les élections municipales auront bien lieu en mars 2014

Xavier Brivet
Photo : S. Gautier

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