Tribune de l’Assemblée
La proposition de loi visant à « redonner des perspectives à l'économie réelle et à l'emploi industriel » a été définitivement adoptée le 24 février par le Parlement. Elle prévoit, notamment, une obligation d’alerte des élus locaux par l’entrepreneur lors d’un projet de fermeture de site industriel, et la possibilité pour les collectivités de demander le remboursement des aides publiques versées à l’entreprise qui refuserait une offre de reprise « crédible ».
C’est la fin d’un long marathon parlementaire qui aura vu le Sénat et l’Assemblée débattre chacun deux fois d’un texte alors que le gouvernement avait engagé la procédure d’urgence : une première lecture et une nouvelle lecture pour chaque chambre après l’échec de la réunion de la commission mixte paritaire.
Il aura donc fallu une dernière lecture, définitive, le 24 février, pour que le Parlement mette un point final à l’examen de cette proposition de loi « visant à redonner des perspectives à l’économie réelle et à l’emploi industriel », portée par Bruno Le Roux (PS).
Obligation de « recherche active » d’un repreneur
« Pour dissuader les licenciements boursiers, nous renchérirons le coût des licenciements collectifs pour les entreprises qui versent des dividendes ou rachètent leurs actions, et nous donnerons la possibilité aux salariés de saisir le tribunal de grande instance dans les cas manifestement contraires à l’intérêt de l’entreprise. »
Ainsi était écrit, en 2012, l’engagement n° 35 du candidat François Hollande. Plus de neuf mois après son dépôt, le 15 mai 2013, le texte vise bien à s’assurer que le dirigeant d’une entreprise appartenant à un groupe de plus de 1 000 salariés, qui souhaite fermer l’un de ses établissements, s’acquitte d’un minimum d’obligations, le recherche d’un repreneur notamment, avant de procéder à cette fermeture.
L’information des salariés, la recherche « active » d’un repreneur et l’obligation (sous le contrôle du tribunal de commerce qui pourra être saisi par les salariés, par l’intermédiaire du comité d’entreprise) d’acceptation d’une « offre de reprise crédible » structurent le texte définitivement adopté. Il s’agit également de faciliter les projets de reprise par les salariés, avant que ne se profile le redressement ou la liquidation judiciaires. Et des mesures pour stabiliser au maximum l’actionnariat des entreprises.
Les territoires touchés bénéficiaires des pénalités
Actrices importantes de l’équilibre économique local, les collectivités n’ont pas été oubliées par les parlementaires. D’abord par l’obligation faite à l’employeur d’informer le maire de la commune du projet de fermeture de l’établissement. « Dès que ce projet lui a été notifié, l’autorité administrative en informe les élus concernés », précise même le texte dès son article 1er.
Mais aussi du point de vue financier, s’agissant du devenir des amendes que devront payer les entreprises dont il aura été prouvé qu’elles n’ont pas « joué le jeu », à savoir celles qui auront refusé des offres de reprise « crédibles ». Or, ces pénalités seront affectées à la Banque publique d’investissement (BPI), « dans les conditions prévues par une loi de finances, pour financer des projets créateurs d’activité et d’emplois sur le territoire où est situé l’établissement ou de promotion des filières industrielles », pourront se consoler les élus locaux soucieux de trouver de l’argent frais pour tenter de redynamiser le tissu industriel local.
Montant potentiel de la pénalité : « 20 fois la valeur mensuelle du SMIC par emploi supprimé dans le cadre du licenciement collectif consécutif à la fermeture de l’établissement, dans la limite de 2 % du chiffre d’affaires annuel de l’entreprise ». Le montant de la pénalité tiendra compte « de la situation de l’entreprise et des efforts engagés pour la recherche d’un repreneur », nuance toutefois le texte.
Les collectivités pourront récupérer leurs aides
Autre disposition, celle-ci introduite par le Sénat : la possibilité pour les collectivités d’exiger d’elles-mêmes le remboursement des aides publiques qu’elles auraient octroyé dans les deux années précédentes à une entreprise préférant la fermeture de son usine à sa reprise potentielle. « Les personnes publiques compétentes peuvent émettre un titre exécutoire, dans un délai d’un an à compter [du] jugement, pour obtenir le remboursement de tout ou partie des aides pécuniaires en matière d’installation, de développement économique ou d’emploi attribuées à l’entreprise au cours des deux années précédant le jugement », détaille le texte. Un deuxième « lot de consolation » dont toutefois les élus espèrent qu’ils n’auront pas à se servir…