Réuni le 25 juin, le CFL est parvenu à un « relevé de conclusions » répondant aux six chantiers relevés par le gouvernement, s’agissant du futur des finances locales à court et moyen terme. 25 propositions, qu’il s’agisse de simples constats, de vœux ou de fermes revendications, constituent ce rapport qui devrait constituer la base de discussion de la future conférence des finances publiques locales, mi-juillet, à Matignon.
[caption id="attachment_6642" align="alignleft" width="304"] André Laignel, président du CFL[/caption]
Le 25 juin, le comité des finances locales rendait sa copie au gouvernement, lui qui avait demandé le 12 mars aux membres du CFL de travailler sur six chantiers intéressant les finances des collectivités territoriales : répartition de la baisse des dotations, évolution des mécanismes de péréquation, avenir de la contractualisation Etat-régions, accès au crédit, évaluation des dépenses contraintes et nouvelles ressources. Dans un « relevé de conclusions », les membres du CFL avancent 25 propositions dont certaines ont fait l’objet d’un « débat animé » de l’aveu même du président du CFL, André Laignel. Rien d’étonnant à cela, selon le maire d’Issoudun, puisqu’il s’agissait de « la première fois, depuis que le CFL existe, que nous avions à répartir des diminutions de dotations ». Le gouvernement devrait piocher dans ces 25 propositions lors de la future conférence des finances publiques locales prévue autour du 16 juillet. Le tout dans la foulée d’un nouveau CFL le 9 juillet consacré à la présentation du rapport annuel de l’Observatoire des finances locales.
Répartition « simple et lisible » de la baisse des dotations
Tout en soulignant sa « vive préoccupation », le comité prend acte des trois milliards de baisse de dotations prévus sur deux ans. Mais le CFL souhaite que cette diminution soit considérée comme une contribution exceptionnelle à la baisse du déficit de l’Etat et que cela soit inscrit explicitement comme une dépense au budget des collectivités, « de façon à être réversible dans deux ans, en espérant être revenu à meilleure fortune… », explique André Laignel. Deux autres mesures pourraient atténuer les effets néfastes de cette coupe budgétaire : le lissage sur trois ans, et non deux, de la baisse de trois milliards ; et la mise en place d’un dispositif de soutien à l’investissement des collectivités, le président du CFL craignant « une chute brutale » si aucune compensation n’intervient. Pour appuyer ses prédictions, celui qui préside aussi l’observatoire des finances locales annonce que son prochain rapport sur l’année 2012 démontre que l’investissement public est assuré à 71,2 % par les collectivités.
Le comité propose également que la clé de répartition de l’effort de diminution des dotations entre les trois catégories de collectivités se fasse au prorata des recettes totales, « un principe simple et lisible », souligne André Laignel. Sur le milliard et demi annuel de baisse des dotations, le bloc local serait donc concerné à hauteur de 55,97 % (840 millions), les départements à 31,74 % (476 millions) et les régions à 12,29 % (184 millions).
Au sein du bloc local, la répartition se ferait en proportion des recettes totales de fonctionnement, soit 70 % pour les communes et 30 % pour les EPCI. Pour les départements, la baisse serait modulée dans une logique de péréquation, selon deux critères : prise en compte du revenu par habitant et effort fiscal. Enfin, la répartition pour les régions se ferait en fonction des recettes réelles, même si les membres du comité, dans des modalités qui restent à définir, souhaitent réserver un sort plus favorable aux collectivités d’outre-mer et à la Corse.
Péréquation : poursuivre l’effort, ajuster les modalités
Le Comité des finances locales se prononce pour la poursuite de la hausse des deux fonds de péréquation horizontale, celui des ressources intercommunales et communales (FPIC) et celui spécifique à l’Ile-de-France (FSRIF). Une hausse déjà prévue par la loi. Toutefois, certains ajustements de ces fonds sont évoqués pour 2014 : d’une part, que la part du revenu par habitant soit augmentée dans les critères de prélèvement de 20 à 25 % ; et, d’autre part, que l’effort fiscal soit mieux pris en compte pour faire partie des bénéficiaires. Enfin, le plafond de contribution appliqué au FPIC passerait de 11 à 13 % des ressources fiscales.
S’agissant de la péréquation « verticale », de l’Etat vers les collectivités, le comité demande que les dotations de péréquation augmentent de 109 millions en 2014 par rapport à 2013, à répartir ainsi :
- + 60 millions pour la dotation de solidarité urbaine (DSU) ;
- + 39 millions pour la dotation de solidarité rurale (DSR) ;
- + 10 millions pour la dotation nationale de péréquation (DNP).
Ressources des collectivités : créativité fiscale pour les régions
Le comité avance des propositions de refonte des ressources pour chaque niveau de collectivités. S’agissant du bloc communal, le CFL plaide pour une révision des valeurs locatives des locaux d’habitation, « en concertation avec les collectivités concernées et sans remise en cause des dégrèvements ». La CFE se référerait désormais à la valeur ajoutée des entreprises (et non au chiffre d’affaires), les membres du CFL plaidant par ailleurs pour apporter « une attention particulière aux territoires industriels ». Autre proposition : examiner l’hypothèse d’une déliaison encadrée des taux de fiscalité locale. « Aujourd’hui, il est impossible de relever la CFE sans augmenter parallèlement la taxe d’habitation, regrette André Laignel. Les élus demandent plus de liberté. »
Concernant les régions, plusieurs pistes sont avancées par le comité : affecter un versement transport interstitiel (pour les territoires non assujettis actuellement) ; étendre la taxe d’aménagement, aujourd’hui réservée à l’Ile-de-France, à toutes les régions ; et enfin instaurer une fiscalité sur les autoroutes.
Le comité renvoie par ailleurs aux travaux du groupe de travail Etat-assemblée des départements de France sur les trois allocations universelles de solidarité, en ce qui concerne les ressources des départements, comme le demandait l’ADF.
Le CFL rappelle enfin son attachement à l’autonomie fiscale « pour tous les niveaux de collectivités », conjurant le gouvernement de « cesser la transformation d’impôts locaux en dotations » et lui demandant de neutraliser pour les collectivités la hausse du taux de TVA.
Dépenses contraintes : haro sur les transferts non compensés
En 2014, ce sont près de 900 millions de charges nouvelles qui s’imposeront aux collectivités selon la Commission consultative d’évaluation des charges (CCEC). Un recensement qui, selon le CFL, ne prend pas en compte le coût de la réforme des rythmes scolaires (600 millions d’euros par an en année pleine), la revalorisation de la rémunération des fonctionnaires de catégorie C (200 millions) et la hausse de la TVA au 1er juillet 2014. Soit près d’1,8 milliard d’euros de charges nouvelles en 2014.
Ce qui conduit le comité à rappeler son attachement au principe selon lequel tout transfert de compétences doit faire l’objet d’une compensation intégrale de l’Etat. Et ce dans un contexte où les régions s’inquiètent d’avoir à prendre en charge les personnels de maintenance informatique, sans compensation financière de l’Etat, dans le cadre du projet de loi pour la refondation de l'école de la République.
Accès au crédit : élargir le périmètre des projets financés par la CDC
Le CFL s’oppose fermement au financement par prélèvement sur les concours financiers de l’Etat aux collectivités, du fonds de soutien aux collectivités qui ont contracté des emprunts toxiques. A titre personnel, André Laignel juge la loi de validation des contrats d’emprunts structurés annoncée par le gouvernement « indispensable, et nécessaire pour que la Sfil puisse aller sur le marché bancaire : cela la sécurise ». Reste que le fonds doit être selon lui alimenté par l’Etat et les banques. « Ce n’est pas aux collectivités de payer pour celles éventuellement imprudentes. Et quand les banques sont responsables, c’est aux tribunaux d’être saisi pour défaut de conseil », précise-t-il.
S’agissant de l’éligibilité des collectivités aux programmes d’investissement financés par l’enveloppe de 20 milliards de prêt à long terme de la Caisse des dépôts (CDC), ces critères pourraient être élargis selon le Comité aux investissements et créations d’infrastructures dans l’eau et l’assainissement (et non uniquement la rénovation), mais aussi aux réseaux de chaleurs et aux mises aux normes d’accessibilités des bâtiments aux personnes handicapées.
Avenir de la contractualisation Etat-régions: respecter les délais
Les contrats de projets Etat-régions 2014-2020 font d’abord l’objet d’une position de principe de la part du CFL : la contractualisation doit « corriger les inégalités des territoires dans une logique d’aménagement du territoire ». Une précision qui a son importance selon André Laignel, étant donné que certains programmes « renforcent des pôles déjà puissants, sans se préoccuper de ceux qui le sont moins ». Et le comité d’appeler à un engagement rapide des négociations au niveau régional mais aussi à l’association, dans leur négociation, de « tous les niveaux de collectivité » et ce, même « si la région demeure l’échelon pertinent ».
Enfin la préparation de la nouvelle programmation ne doit pas se faire au détriment de la précédente, toujours en cours : « La contractualisation actuelle doit être assurée et les délais respectés », prévient le CFL. Et André Laignel d’ajouter que « les contrats de projets actuels doivent être menés à leur terme ».