Alain Rousset, président de l’ARF
© S. Gautier
Alain Rousset (photo), président de l'Association des régions de France, a estimé, lors de ses vœux à la presse, qu'une "petite révolution" se prépare avec la nouvelle loi de décentralisation. Il n'hésite plus à évoquer une évolution vers un Etat fédéral.
« Une petite révolution semble se préparer », a affirmé Alain Rousset, lors de la présentation des vœux de l’Association des régions de France (ARF), qu’il préside, le 29 janvier. Alors que ces dernières conférences de presse étaient fort critiques à l’égard des gouvernements, la tonalité a changé. Le nouveau projet de loi de décentralisation, intitulé « mobilisation des régions pour la croissance et l’emploi et de promotion de l’égalité des territoires », mise en chantier pour une discussion au Parlement entre le 2 et le 15 avril, fera la part belle à une partie des revendications de l’association.
Pacte de responsabilité et d’action
Alain Rousset souhaite que le texte affirme fortement un principe : « savoir qui fait quoi ». De ce principe peuvent découler trois autres principes : « efficacité, économie de la dépense publique, contrôle de l’action publique ».
Lorsqu’il s’agit de savoir qui fait quoi, le président souligne que l’essentiel des doublons est entre l’Etat et les régions : « Sur l’innovation, l’aide aux entreprises et l’accompagnement des PME, 4 ou 5 services de l’Etat s’occupent de la même chose ». « Chiche, lance-t-il, regroupons les tous dans un seul service instructeur ! ». Sans attendre l’Etat, Alain Rousset lui propose donc un « pacte de responsabilité et d’action sur la modernisation du tissu industriel. L’objectif étant d’inverser la courbe du chômage et de redresser le tissu industriel. Dans ce cadre, il souhaite expérimenter la mise en place d’un service public régional d’accompagnement des chômeurs », afin de remédier à un service public de l’emploi « trop émietté pour être efficace ».
Fusion et moyens des régions
« La fusion des régions n’est pas un chiffon rouge », affirme Alain Rousset. A condition « que les choses soient rationnelles et cohérentes ». Le véritable problème, et là, Alain Rousset retrouve une antienne classique, est la faiblesse des moyens des régions, avec un potentiel moyen d’intervention de 395 euros/habitants, contre 3 600 euros en Allemagne, avec il est vrai un champ de compétences tout autre.
Sur ce sujet, « les discussions sont compliquées avec les services de l’Etat ». Alain Rousset souhaite remplacer les dotations de l’Etat par la fiscalité et « faire en sorte que les ressources soient cohérentes avec les compétences. Les régions reçoivent la part la plus faible de la CVAE alors qu’elles sont chargées du développement économique ».
De même, relève-t-il, percevoir une part de la TIPP est contradictoire avec le développement du transport ferroviaire, compétence régionale. Jean-Jack Queyranne, président de la région Rhône-Alpes, est chargé d’une réflexion sur l’évolution de la CVAE dans le cadre des Assises de la fiscalité.
Adaptation de la loi
Le projet de loi devrait octroyer aux régions le pouvoir d’adapter la loi et un pouvoir réglementaire à travers des schémas prescriptifs. Une vieille revendication de l’ARF. De quoi « sortir d’une relation de sous-traitance entre l’Etat et les collectivités ».
Pour plus d’efficacité, il faut également « une spécification des compétences ». La majorité des présidents de régions est d’ailleurs en faveur de la fin de la clause de compétence générale. Un « rapatriement sur les compétences » nécessaires en période de restriction de l’argent public. « Il faut des compétences exclusives pour chaque niveau de collectivités », conclut le président.
Vers un Etat fédéral?
Alain Rousset n’hésite pas à aller plus loin et à évoquer, avec Jean-Paul Huchon, président de la région Ile-de-France, un Etat fédéral. « Nous y réfléchissons depuis les années 80 », confie-t-il.
Pas question cependant d’une fédération à l’allemande. « En France, le législateur a prévu des blocs de compétences ». Face à un Etat qui se recentrerait sur ses compétences régaliennes (justice, police…), les régions approfondiraient leurs blocs de compétences. Les régions sont compétentes sur les lycées et la formation ? Alain Rousset n’hésite donc pas à imaginer, d’ici 20 à 30 ans, des régions compétentes sur l’éducation (mais pas les programmes), le recrutement des professeurs, l’organisation universitaire...
Vigilance à l'égard des métropoles
A l’intention des métropoles, bénéficiaires de la toute récente loi de décentralisation, le président de l’ARF est sans ambiguïté. « Nous serons extraordinairement vigilants à l’égard des métropoles pour cantonner strictement leurs compétences ». La grande crainte étant que les métropoles attirent sur leur territoire les entreprises, désertifiant la périphérie.
Reprenant le vocabulaire des départements, il affirme que, les fonctions véritables des régions étant le développement économique et l’aménagement du territoire, elles sont les seules garantes de la solidarité.
Pierre Ygrie - 03/02/2014 11h:06
Le fédéralisme était pour moi un rêve de jeunesse pour l'Europe J'avais fait en effet en son temps (1963) a Aoste des études "estivales" au collège d'études fédéralistes. Je suis heureux de voir que le mot, tabou pendant un demi siècle, réapparaisse même si cette "apparition"reste timide et limitée, pour l'instant, au territoire national ;-)
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