Les petites villes inégales devant la dette… et leur investissement local

Denis Solignac
Les petites villes inégales devant la dette… et leur investissement local

Budgets locaux

© Flickr-CC-ImagesMoney

Dans une étude sur les finances des communes de 3 000 à 20 000 habitants, la Banque Postale met en exergue l’hétérogénéité de la situation financière de ces petites villes face à la baisse des dotations. Et les conséquences sur la dette et l’épargne brute. Mais malgré l’apport des communes qui seront en mesure de maintenir cette épargne brute et de contribuer ainsi plus facilement à l’investissement local, quitte à faire appel à l’endettement, l’investissement local global des petites villes n’en sortirait pas indemne…

Comme l’ensemble des collectivités du bloc local, les petites villes n’échappent pas aux conséquences de la baisse des dotations et ce, sur deux ratios traditionnellement regardés de très près par les élus locaux et les analystes.

D’abord l’épargne brute qui a chuté de 15% en trois ans, « soit une perte de 700 millions d’euros. Les dépenses de fonctionnement progressent moins vite qu’auparavant. Mais pas suffisamment pour arriver à épargner… l’épargne brute », analyse Thomas Rougier, directeur de études du secteur public de LBP, qui présentait cette étude le 1er juillet.

Second ratio source d’inquiétude : l’investissement, en retrait de 16% pour ces communes de 3 000 à 20 000 habitants, contre moins 16,4% pour l’ensemble des communes. Un net recul qui va bien au-delà de ce qui est habituellement constaté à cette même période du cycle électoral lors des mandats précédents

La dette par habitant très éclatée
Seul effet bénéfique de cette inquiétante statistique : le léger repli de la dette, de 200 millions d’euros, tout simplement parce que « la baisse de l’investissement s’est accompagnée d’un moindre recours à l’emprunt », décrypte Thomas Rougier.

Pour autant, les petites villes offrent un portrait financier très hétérogène, bien davantage que dans d’autres strates. Ainsi, si une commune sur quatre à une dette supérieure à 1 080 euros par habitants, la même proportion détient une dette inférieure à 480 euros par habitants. Car entrent en jeu de multiples critères, « l’effet taille, les dépenses de fonctionnement par habitant étant plus grande dans les grandes villes ; l’effet de mode de gestion ; le niveau d’équipement et de calendrier des équipements ; les choix politiques entre dette et ressources propres ; la géographie, entre une commune rurale ou périurbaine et une autre dans une zone touristique de montagne…. », liste de manière non exhaustive l’analyse de LBP.

« Seuil d’alerte » pour l’épargne brute d’une commune sur cinq
C’est à partir de ce constat que LBP et l’APVF ont souhaité affiner leur prospective selon plusieurs « portraits robots » financiers des petits villes.

Il s’avère que, même en prenant le meilleur des profils, celui des 12% de petites communes disposant de marges fiscales et au potentiel d’encadrement des dépenses de fonctionnement le plus important, l’avenir reste morne : celles-ci bénéficieraient au mieux d’une épargne brute stabilisée (+0,7%).

A l’autre bout de l’échelle, les 19% de petites villes « aux marges fiscales très faibles voire inexistantes et au niveau de contraintes fort, avec un faible revenu par habitant », décrypte Thomas Rougier, se rapprocheraient d’une épargne bute négative de mons 11,7% par an. Or, « - 12 % par an, c’est le seuil d’alerte », prévient déjà Marc Batave, secrétaire général de LBP.

Investissement : entre -7% et -18% à redouter sur les trois ans à venir
Idem concernant l’investissement : dans les deux scénarios envisagés, le niveau d’investissement annuel moyen pour les trois prochaines années 2015, 2016 et 2017 est en baisse par rapport à la moyenne des trois années précédentes, de 2012 à 2014 : 7,1 milliards d’euros avaient alors été investis par les petites villes.

Sans recours à l’endettement, 5,8 milliards d’investissements seulement peuvent être attendus. Et si les communes y ont recours, une opportunité possible pour seulement une commune sur 5 selon les observations de LBP, le volume annuel pourrait passer à 6,6 milliards. Soit un scénario catastrophe d’une baisse des investissements de 18% contre un autre peu enthousiasmant d’une baisse « limitée » à 7,6%.

Pour l’APVF, le milliard doit aussi soutenir le fonctionnement
Pour amoindrir ce choc de sous-investissement à venir, l’APVF compte bien sur le fond de soutien à l’investissement d’un milliard d’euros annoncé il y a peu, mais sans plus de précisions, par Matignon.

Ce fonds « ne doit pas être fléché uniquement sur la section d’investissement, mais aussi sur la section de fonctionnement », plaide le président de l’APVF, Olivier Dussopt. Dans le cas contraire, les petites villes ne pourraient même pas utiliser ces fonds pour soutenir l’investissement car elles ne pourraient « avoir assez de marges pour financer les restes à charge », détaille-t-il.

Un argument que l’association entend bien développer lors de la prochaine réunion du Dialogue national des territoires qui doit se tenir mi-juillet et où il sera essentiellement question du budget pour 2016.

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