Les engagements a minima d’Edouard Philippe devant les départements de France

Aurélien Hélias
Les engagements a minima d’Edouard Philippe devant les départements de France

Edouard Philippe le 20 octobre 2017 à Marseille au congrès des départements de France (ADF)

Les mineurs étrangers isolés seront prise en charge financièrement par l’Etat le temps de vérifier leur minorité et un fonds d’urgence pour les départements fragilisés sera introduit dans un collectif budgétaire d’ici à la fin de l’année. Mais le Premier ministre ne s’est engagé sur aucun montant, et n’a pas évoqué de potentiel transfert d’une part de fiscalité nationale pour financer à long terme les allocations individuelles de solidarité.

Très attendu par les exécutifs départementaux, Edouard Philippe n’a répondu que très partiellement à leurs attentes. Principale annonce : « l’Etat assumera l’évaluation et l’hébergement d’urgence des mineurs jusqu’à ce que leur minorité soit confirmée. C’est le rôle de l’Etat ». La prise en charge passerait donc de 30 % à 100%, sans qu’une date précise soit indiquée. « Depuis quelques mois, le phénomène est plus massif et plus diffus : il s’accélère et concerne un nombre croissant de départements, pour bientôt les concerner tous », a-t-il admis. Et de souligner l’intégration dans le budget 2018 de crédits supplémentaires pour la prise en charge des MNA et d'une partie des surcoûts de l’aide sociale à l’enfance : au total, 132 millions d’euros sont prévus en 2018, a-t-il indiqué.

Revoir le dispositif d'accueil des "MNA" en 2018

Une annonce saluée par certains patrons de départements, mais jugée pas à la hauteur des enjeux par d’autres. « Ce n’est pas suffisant, a réagi Olivier Richefou, président (UDI) de la Mayenne. L’Etat le fait [la prise en charge financière des MNA] pendant 5 jours ; là, il le fera pendant 10 ou 15 jours et ce sera nous le reste de l’année… »

La « mission d’expertise conjointe avec des corps de l’inspection de l’Etat et des cadres supérieurs des exécutifs départementaux » annoncée par Edouard Philippe devra déminer les enjeux financier, « clarifier la question des coûts », travailler sur la mise en place de dispositifs d’accueil et sur l’adaptation des dispositions législatives. Conclusions « d’ici fin de l’année pour que nous puissions dès 2018 prendre les décisions qui s’imposent », assure le Premier ministre.

Allocations de solidarité : un fonds d'urgence non chiffré

Autre dossier financier brûlant pour les départements : les allocations individuelles de solidarité. Alors que les patrons de département attendaient la reconduction du principe d’un fond d’urgence, ils ont obtenu gain de cause… mais sans engagement aucun de l’exécutif sur son montant, alors que les départements les plus fragiles avaient pu compter sur 200 millions d’euros l’année dernière. « Par principe, je ne suis pas très favorable à idée de pérenniser des mécanismes exceptionnels. […] Mais la situation n’est pas homogène et quelques départements restent confrontés à une situation structurellement dégradée », a convenu Edouard Philippe.

« Nous travaillons à la mise en place d’un mécanisme de fonds d’urgence en loi de finances rectificative pour 2017. Je vous propose que nous travaillions ensemble, dans ce calendrier, à en préciser la cible, ainsi que les modalités, et son articulation avec les mécanismes de péréquation verticale comme horizontale », a-t-il avancé.

Pas de promesse sur une part de CSG

Pour les présidents de départements, la déception est double. D’abord face à l’absence de tout chiffre. « Sur fonds d’urgence, on n’a même pas le début d’un montant ! », a tonné le président (PS) de l’Aude, André Viola. Mais aussi car les élus départementaux attendaient des annonces sur le financement à moyen et long terme des AIS, pour lequel Edouard Philippe a seulement renvoyé à la mission Richard-Dur - dans laquelle siège l'ancien président de l'Orne, Alain Lambert - et au Budget…2019. Pas d’évocation donc d’une possible transfert d’une part de CSG aux départements comme beaucoup de leurs présidents l'attendaient. « Sur une part d’impôt national, nous n’avons eu aucune réponse. La coupe est plus qu’à moitié vide… », a regretté Nicolas Perruchot, président (Nouveau centre) du Loir-et-Cher.

Pas d'enthousiasme débordant donc de la part des patrons de département, mais pas non plus rupture de ban en vue : l’ADF devrait bien être représentée à la prochaine Conférence nationale des territoires (CNT), comme l’a laissé pensé Dominique Bussereau, ouvert aux négociations, contrairement aux régions de France. « S’engager, c’est formidable ; s’engager sur des choses qu’on sait tenables, c’est encore mieux », a glissé Edouard Philippe à la fin de son discours. Nul doute qu’à la CNT du 14 décembre, les patrons d’exécutifs départementaux attendront davantage d’engagements.

Recevez vos newsletters gratuitement

FORMATIONS