Le droit dans tous ses états
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Les députés ont entamé, le 17 février, l’examen du projet de loi relatif à la nouvelle organisation territoriale de la République (Notre). Les débats se sont cristallisés sur le pouvoir réglementaire dévolu aux régions dans le champ de leurs compétences. Un amendement du président de l’Association des régions de France (ARF) renforce ce pouvoir. Les discussions se poursuivent jusqu'au 20 février et reprendront le 2 mars, après les vacances parlementaires. Un vote solennel est prévu le 10 mars. Plus de 2 000 amendements ont été déposés.
En première lecture, fin janvier, le Sénat, à majorité de droite, a profondément transformé le texte gouvernemental. Les députés s'apprêtent à revenir sur la plupart de ces modifications comme le prévoit le texte de la commission des lois. Les deux chambres devront tenter de trouver un terrain d'entente, faute de quoi l'Assemblée aura le dernier mot.
Les députés, en accord sur ce point avec les sénateurs, ont approuvé, le 18 février, la suppression pour les régions de la "clause de compétence générale", qui permet à une collectivité territoriale d'intervenir dans tous les domaines. Ils doivent faire de même pour les départements durant la suite du débat.
Les départements, que le gouvernement ne veut plus supprimer – du moins dans les zones rurales – auront en charge la solidarité. Les sénateurs ont convaincu gouvernement et députés qu'ils devaient aussi conserver la gestion des collèges. L'objectif du gouvernement est que, d’ici aux élections départementales des 22 et 29 mars, les pouvoirs des nouveaux élus soient connus. Connus, mais pas définitivement fixés, car les dernières étapes de la navette parlementaire resteront à franchir après les élections.
Répartition des compétences
Les régions seront chef de file sur le développement économique, les transports – y compris les transports urbains et scolaires –, la gestion des routes départementales et celle des ports, et le tourisme.
Elles auront aussi compétence sur "l'accès au logement", même si un amendement du rapporteur du projet de loi, Olivier Dussopt (PS), voté le 18 février, réaffirme que départements et intercommunalités ont aussi un rôle en ce domaine.
Un peu retouchée par la majorité dans l'hémicycle, la création dans chaque région d'un schéma régional de développement économique, de l'innovation et de l'internationalisation, opposable aux autres collectivités, a été défendue par la ministre de la Décentralisation, Marylise Lebranchu, comme un moyen de "rationaliser" mais aussi d'arrêter de "s'opposer ou de faire du dumping infrarégional".
Pour l'emploi, les régions volontaires pourront jouer un rôle de coordination (sans toucher aux prérogatives de Pôle emploi), durant une phase expérimentale de trois ans, aux termes d'un amendement déjà voté en commission.
Pouvoir réglementaire des régions
Contre l'avis du gouvernement et du rapporteur Olivier Dussopt (PS) mais avec le soutien des écologistes, de l'UMP et de l'UDI, l'Assemblée nationale a aussi voté, après un long débat entrecoupé d'une suspension de séance, un amendement du président (PS) de l'Association des régions de France (ARF), Alain Rousset, visant à renforcer dans la loi le pouvoir réglementaire de la région dans certains cas.
"Sous réserve du pouvoir réglementaire du Premier ministre (…), la région est compétente pour adopter les mesures d'application des lois concernant l'exercice de ses compétences en cas de non renvoi au pouvoir réglementaire de l'Etat ou en complément de celui-ci", prévoit l’amendement. "A défaut de réponse dans un délai de douze mois, le silence de l'Etat vaut acceptation" et "en cas de refus de ces propositions, le Premier ministre notifie aux régions concernées les motifs de ce refus dans un délai de six mois à compter de la réception de la demande de modification ou d'adaptation".
« Crispations »
L’adoption de cet amendement a fait tomber un amendement gouvernemental stipulant que le pouvoir réglementaire de la région s'exerce dans le cadre des compétences dévolues par la loi, jugé pas assez ambitieux par plusieurs orateurs. La ministre de la Décentralisation s'est engagée à vérifier entre les deux lectures comment écrire de façon plus précise le pouvoir réglementaire des régions.
Ce sujet suscite de longue date "un débat trans-partisan entre les décentralisateurs et ceux qui continuent à avoir des crispations réglementaires nationales", selon l'UDI Michel Piron.