Le « triomphe » très relatif des métropoles sur la décennie écoulée

Hugo Soutra
Le « triomphe » très relatif des métropoles sur la décennie écoulée

Aix Marseille Métropole

© Adobe/babelsberger

Qui a dit que les métropoles étaient plus « attractives » que les autres intercos ? Pas Olivier Bouba-Olga. Après avoir recensé les données des recensements 2013 et 2018, l’économiste poitevin démontre de grands écarts entre les dynamiques démographiques et économiques des 22 métropoles.

Les métropoles, dont l’image a été considérablement ternie par une crise sanitaire sans fin, vont-elles finir par renaître de leurs cendres – telles des Phénix – et retrouver leur dynamisme d’antan ? Assiste-t-on, depuis dix-huit mois, à une « revanche » des villes petites et moyennes qui semblaient jusqu'à peu bien mal en point ? Les villages et campagnes peu denses parviendront-ils à tirer profit des envies de déménagement des citadins ? Voici autant de questions qui animent le débat public territorial… et dont l’économiste Olivier Bouba-Olga se lasse de devoir répondre.

Outre qu’aucune source fiable ne dispose aujourd’hui d’éléments corroborant ou infirmant ces hypothèses, le postulat de départ serait erroné, selon lui. « Le monde d’avant n’était pas synonyme de triomphe des métropoles (…) et cela devrait continuer à être plus compliqué que ce que certains voudraient. Il convient de rejeter les modèles à une variable censés tout expliquer du monde qui nous entoure » introduit celui qui est aujourd’hui détaché au conseil régional de Nouvelle-Aquitaine, sur son site personnel. Il est l’auteur d’un récent post, constitué autour des données des recensements 2013 et 2018 mais couvrant en réalité la période 2011-2020, venant de nouveau casser certaines idées reçues.

Une croissance démographique moins portée par l'attractivité que par la natalité

Olivier Bouba-Olga s’est amusé à comparer le taux de croissance annuel moyen de la population, de l’emploi ainsi que d’un certain nombre d’autres indicateurs. Qu’y apprend-on ? Le solde naturel plus grand des métropoles (+0,67%) par rapport à l’ensemble des territoires (+0,31%) leur permet de compenser un solde migratoire négatif (-0,13% contre +0,04% pour le reste), et donc d’apparaître comme plus dynamiques sur le plan démographique : leur population a en effet cru de 0,54% par an entre 2011 et 2020, contre 0,35% en moyenne. De l’importance, tout de même, d’aller voir derrière le seul taux de croissance de la population, d’ailleurs extrêmement relatif pour ce qui est de Grenoble, Metz, Nice, Saint-Etienne et Rouen…

Dans son commentaire, Olivier Bouba-Olga pointe également le solde migratoire négatif d’une dizaine de de métropoles, pourtant « censées tirer leur force de leur plus grande attractivité » rappelle-t-il. D’autres constats de cet acabit peuvent être tirés du taux de croissance de l’emploi ou de l’évolution du taux de chômage. Grenoble, Metz, Nice, Saint-Etienne et Rouen, auxquelles on peut ajouter Dijon et Nancy, affichent un taux de croissance annuel du nombre d’emplois… inférieur à celui de la moyenne des EPCI. Il en va de même concernant le taux de chômage, dans l’ensemble supérieur dans ces métropoles ainsi qu’à Lille, Montpellier, Strasbourg ou Tours.

Ode à la complexification

Mis à part les métropoles de Bordeaux, Lyon, Nantes, Rennes ou Toulouse qui tirent systématiquement la moyenne métropolitaine vers le haut sur l’ensemble des indicateurs comparés, Brest, Lille, Nancy, Nice, Paris ou Saint-Etienne sous-performent dans un certain nombre de catégories – et non des moindres.

Conclusion d’Olivier Bouba-Olga : on ne peut pas essentialiser et dire que les 22 métropoles sont plus « performantes » que les autres territoires ou même simplement que les communautés urbaines ou d’agglomération. C’est le cas d’une poignée, seulement. Tout comme des villes moyennes ou petites surperforment ou sous-performent dans leurs strates respectives, et tirent les moyennes de chacune vers le haut ou vers le bas… Une véritable ode à la complexification des débats territoriaux !

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