Téléphérique brestois : les futures cabines au-dessus de la Penfeld
© Bouygues/BMF
Brest sera la première ville française à intégrer le téléphérique à son réseau de transport urbain. Un mode de transport qui fait fi des obstacles avec un excellent rapport qualité prix. D’autres villes suivront, aidées par un projet de loi qui facilitera les procédures pour les implanter.
Le transport par câbles en milieu urbain, autrement dit, le téléphérique en ville, a les faveurs de Ségolène Royal, ministre de l’Ecologie. Lors du Conseil des ministres du 3 février, elle a présenté un projet de loi ratifiant l’ordonnance du 18 novembre 2015 relative à l’instauration de servitudes d’utilité publique pour le transport par câbles en milieu urbain.
Cela tombe bien, alors que les projets de multiplient en France. Grenoble, Toulouse, le Val de Marne, Orléans sont sur les rangs. Mais la ville la plus avancée est Brest, qui devrait mettre son téléphérique en service fin septembre prochain.
Il s’agit, pour la ville bretonne, de faciliter le franchissement de la Penfeld. La traverser à pied prend actuellement 25 minutes. Et relier les deux rives est un enjeu important pour Brest, en plein aménagement des 16 hectares de l’ancien site militaire du plateau des Capucins, transformé en écoquartier avec logements, commerces et bureaux.
Les anciens ateliers militaires (25 000 m² au sol) étant la pièce maîtresse du projet avec médiathèque, 6 salles de cinéma, un centre national des arts de la rue, un espace public central et une rue commerçante. Ce nouveau quartier devait impérativement être relié à l’hyper-centre de la ville.
82 mètres de haut
Déclaré d’intérêt général le 9 juillet 2015 par le conseil de Brest Métropole, les travaux ont débuté dans la foulée. Aujourd’hui, les fondations d’un pylône de 82 mètres de haut sont en cours d’achèvement. Les cabines sont prévues pour arriver début avril, les câbles en mai, pour démarrer les essais en juin.
Pourquoi ce choix du téléphérique et non un bus ou un tram par exemple, dans le prolongement du réseau brestois ? En fait, impossible de poser un pont : le tirant d’air des bateaux militaires de la base naval qui s’y trouve est trop important.
« Le téléphérique est le meilleur moyen de transport lorsqu’il y a un franchissement », explique Victor Antonio, directeur de mission tramway-téléphérique à Brest Métropole. Pour lui, un tram n’est qu’un véhicule, qui demande un pont. « Alors que le téléphérique est le véhicule et le franchissement », insiste-t-il, ce qui fait que son rapport qualité-prix est imbattable en cas de franchissement.
Ce qu’il illustre : à Toulouse, le téléphérique traversera une autoroute et grimpera sur une colline ; dans le Val-de-Marne, à Créteil, il survolera des voies ferrées, une autoroute et une ligne à haute tension ; à Grenoble un cours d’eau et une autoroute ; enfin, à Orléans, un faisceau SNCF de 400 mètres de large.
Vues somptueuses
L’investissement sera de 19,1 millions d’euros hors taxe, cofinancés à 51% par l’Europe, l’Etat, la région et le département. Un taux de cofinancement important, grâce aux différents champs de politiques publiques – cohésion sociale, innovation, développement durable, renouvellement urbain –, dans lesquels entre le projet.
Le système comporte 4 pylônes en treillis métallique, rappelant les grues du port et deux cabines de 15 m², d’une capacité de 60 personnes, entièrement vitrées, qui offriront des vues somptueuses sur la ville et la rade. « Les 3 minutes du trajet seront trop courtes pour bien en profiter », s’amuse Victor Antonio.
La question des vues n’est pas anodine. Car cela signifie aussi vues potentiellement intrusives chez des privés. C’est sur un tel problème qu’a achoppé, en son temps, le projet de téléphérique d’Issy-les-Moulineaux. Problème élégamment résolu à Brest : les vitres sont des « smart glass », composées de cristaux liquides qui s’opacifient lorsque la cabine survole deux points sensibles.
Automatisation maximum
« Un téléphérique urbain est différent d’un téléphérique de montagne », tient à souligner Victor Antonio. Les usagers ne sont pas des sportifs prêts à subir des conditions spartiates. Il faut pouvoir accueillir des fauteuils roulants, des poussettes, des vélos. Le téléphérique de Brest marquera donc l’arrêt en station et ne comportera pas de marche.
Autre contrainte : en montagne, l’équipement ne fonctionne que quelques heures par jour et quelques mois par an. Il est possible de concentrer du personnel sur des périodes aussi courtes et d’organiser tranquillement la maintenance. Rien de tel en ville. Le téléphérique fonctionnera 365 jours par an, de 6 heures à 24 heures, avec des heures creuses et des heures pleines.
Pour maîtriser les coûts de fonctionnement, il faut l’automatiser au maximum. Son poste de pilotage à distance est donc le même que celui du tram. Quant au personnel, il s’occupe indifféremment de l’entretien, de l’exploitation, de la maintenance des bus, des trams ou du téléphérique. Du côté des usagers, le téléphérique, faisant partie du réseau urbain, sera utilisable aux mêmes conditions que les bus et les trams.
Restrictions de jouissance
Pourquoi le projet de loi de Ségolène Royal ? Pour régler le problème posé par le survol de propriétés privées, la loi montagne ne répondant pas aux exigences du milieu urbain.
Le texte précise, selon le rapport au président de la République, que « l'instauration de ce mode de transport n'entraînera pas d'expropriations systématiques mais simplement des restrictions à la jouissance de terrains privés, ces servitudes devant être dimensionnées de manière à rendre leur exercice aussi peu dommageable que possible pour leurs propriétaires, sans renchérir le coût des projets ni en allonger les délais, tout en garantissant la sécurité durant l'exploitation et l'entretien du système de transport par câbles ».
Un problème qui ne se posait pas pour Brest, qui ne survole que des terrains militaires.
sabaudia - 08/02/2016 10h:12
ah! c'est si beau la vie sous Ségo ! et les jours de grands vents (rares à Brest) on fait quoi ?
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