voitures en file
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Les discussions autour de la future loi sur les mobilités ont fait ressurgir la question du péage urbain. Dispositif discriminant ou salutaire ? Faut-il se calquer sur le modèle londonien ou sur le « péage inversé » de Rotterdam ? Damien Castelain (SE), président de la métropole de Lille, et Jean-Michel Lattes, vice-président (LR) de Toulouse métropole, en débattent.
« Chaque trajet évité sur un axe congestionné rapportera autour de 2 € aux automobilistes volontaires »
Damien Castelain, président (SE) de la Métropole européenne de Lille
[caption id="attachment_74410" align="alignright" width="300"] Damien Castelain[/caption]
«Le péage urbain classique me gêne : devoir payer pour venir travailler et financer les infrastructures à un tarif identique quels que soient les revenus de chacun, me semble injuste. Je préfère l’idée du péage « inversé » ou « positif » tel qu’il est mis en œuvre à Rotterdam : les usagers touchent une récompense pécuniaire s’ils évitent de prendre les axes les plus engorgés aux heures de pointe. Lutter contre la thrombose était un de mes engagements de campagne.
Ecobonus mobilité. Cinq autoroutes traversent la métropole européenne de Lille (MEL), et tous les jours, 100 000 personnes extérieures à la métropole viennent y travailler. Nous allons expérimenter, à partir de la fin d’année, l’« écobonus mobilité » ou péage urbain inversé. 6 000 automobilistes volontaires seront recrutés. Ils seront incités à prendre les transports en commun, à partir en horaires décalés ou à faire du télétravail. Chaque trajet évité sur un axe congestionné leur rapportera autour de 2 €. Une baisse de 6 % à peine du trafic permet de désengorger un axe. La MEL apportera 10 M€ pour cela ; c’est une dépense substantielle, mais combien coûtent l’aménagement de voies, la pollution, les heures perdues dans les embouteillages ? »
« Une solution plus adaptée à des capitales comme Paris ou Londres, ayant un très bon réseau de métro»
[caption id="attachment_74415" align="alignright" width="175"] Jean-Michel Lattes[/caption]
Jean-Michel Lattes, vice-président (LR) de Toulouse métropole, chargé des transports et des déplacements
«Nous sommes, à la ville et à la métropole de Toulouse, opposés au péage urbain. Faire payer les habitants de banlieue pour venir dans Toulouse serait une pratique discriminatoire ; quels que soient leurs revenus, les banlieusards seraient pénalisés. C’est pour cela que les élus bataillent depuis des années pour faire reculer des péages routiers situés près de Toulouse, qui limitent l’accessibilité à la ville et peuvent nuire à l’activité commerciale.
Réseau performant. Nous avons un très bon dynamisme économique et le taux de versement transport est à son maximum. Cela nous permet de financer un réseau performant. Nous avons adopté fin 2016 un PDU ambitieux pour la période 2020-2030. Il prévoit une troisième ligne de métro et l’extension du tramway, des transports en site propre et des « hubs » où les automobilistes pourront laisser leur voiture. De plus, Toulouse a une géographie particulière : elle est plus étendue que Paris, mais avec une densité bien moindre. Quel périmètre faudrait-il choisir pour instaurer un péage urbain ? La question est complexe. Le péage urbain me semble plus adapté à des capitales comme Paris ou Londres, qui ont un très bon réseau de métro. »
À SUIVRE... Loi « mobilités ». La loi «Grenelle 2 » a prévu dès 2010 la possibilité pour les agglos de plus de 300 000 habitants d’expérimenter le péage urbain. Mais aucune métropole ne s’y est risquée... Dans son dernier rapport dont les conclusions devraient inspirer la future loi sur les mobilités, attendue au printemps, le Conseil d’orientation des infrastructures préconise de réduire les véhicules polluants en zone dense par un péage urbain ou « positif », par le covoiturage ou via des voies réservées.