Abstention
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Les remontées de terrain des élus comme les sondages auprès des Français font craindre une faible participation dimanche 15 mars en raison de la crainte des électeurs face au Covid-19. L'exécutif tente de prévenir cette sur-abstention en faisant assaut de mesures d'hygiène pour assurer la sécurité sanitaire du vote... tout en facilitant les procurations pour les électeurs trop frileux face au risque épidémique.
Ce n’est qu’un sondage et pourtant… Selon l’étude Ifop pour Charles.co réalisée le 5 mars auprès d’un millier de Français de plus de 18 ans, plus d’un électeur sur quatre (28 %) est susceptible de ne pas se rendre dans un bureau de vote pour voter aux prochaines élections municipales à cause des risques de transmission du Coronavirus. De quoi inquiéter plus d’un élu sur une mobilisation électorale à la baisse pour le scrutin municipal…
D’autant plus que ce ne sont pas les catégories de Français les plus exposés au risque du covid-19 qui envisagent de « sécher » le rendez-vous électoral : les seniors, catégorie la plus exposée, ne sont "que" 23 % à vouloir pour l'heure éviter tout risque en ne se rendant pas aux urnes (dont 11% déjà certains de ne pas se déplacer aux urnes), tandis qu’ils sont 25 % chez les habitants de la région parisienne, 28 % au sein des cadres et professions intellectuelles supérieures, et jusqu’ à 34 % chez les 25-34 ans, dont 25 % certains de ne pas aller voter dimanche.
Un besoin urgent de communication
Des chiffres qui viennent conforter sur le terrain le ressenti des maires auprès de leurs administrés. Ainsi le président de l’Association des Petites villes de France (APVF), Christophe Bouillon, se fait le héraut de nombre d’édiles de l’APVF l’alertant « sur les risques prévisibles d’une forte abstention aux prochaines élections municipales liée aux informations diffusées quotidiennement sur l’évolution de l’épidémie du Coronavirus ». C’est pour y remédier que le député (PS) de Seine-Maritime a écrit au Premier ministre, lui demandant que « le Gouvernement lance très rapidement une campagne nationale dans les médias rappelant que voter est un droit civique ». Et d’appeler l’exécutif à faire usage des campagnes à la télévision, à la radio et dans la presse quotidienne pour rappeler aux électeurs que « toutes les mesures visant à assurer [leur] sécurité sanitaire seraient prises ».
Dès lundi 9 au soir, le ministre de l’Intérieur a justement pris une circulaire adressée aux préfets dans ce sens et dans le prolongement de ses premières annonces du 5 mars. S’y mêlent plusieurs mesures et préconisations, dont certaines attendues, d’hygiène et de sécurité sanitaire : chaque bureau de vote devra ainsi prévoir un point d’eau afin de se laver les mains à proximité ou, à défaut, mettre à disposition du gel hydro-alcoolique, une signalétique devra y être mise en place pour indiquer le point le plus proche pour se laver les mains et un nettoyage « particulièrement attentif des bureaux de vote avant et après chaque tour de scrutin » à base de javel (sic) est préconisé.
Prévenir toute défaillance du bureau de vote
A noter que les électeurs seront en droit de ramener leur propre stylo d’encre bleue ou noire indélébile pour émarger, mais qu’un électeur portant un masque chirurgical « ne pourra être autorisé à voter que dans le cas où il est identifiable malgré le port de ce masque. Dans le cas contraire, il devra l’enlever afin de vérifier son identité et ne pourra pas voter en cas de refus de sa part », insiste le ministère chargé des élections.
La Place Beauvau veut aussi se prémunir d’un vote empêché faute de président de scrutin ou d’assesseurs en nombre suffisant. Ainsi, « au cas où un maire se trouverait dans l’incapacité ou refuserait de constituer des bureaux de vote dans sa commune, les préfets sont en droit de se substituer à eux, après mise en demeure, pour désigner des délégués chargés de superviser les opérations de vote », annonce le ministère.
Dans le doute, des procurations facilitées...
Reste que malgré toutes ces précautions prises et l’ambition manifeste du Gouvernement d’en faire la publicité en amont du scrutin – « Voter n’est pas un danger » ne cesse de répéter Christophe Castaner à chaque prise de parole ou communiqué – et le jour J par affichage, l’exécutif semble prendre au sérieux le risque accru d’abstention du fait de l’épidémie en cours. C’est pourquoi le dispositif de procurations sera sensiblement facilité, notamment « pour les personnes faisant l’objet de mesures de confinement ou de prescriptions médicales de maintien à domicile, ainsi que pour les personnes vulnérables ». Par télégramme envoyé au préfet le ministre a d’abord rappelé que, « conformément à l’article R. 72 du code électoral, ces personnes peuvent demander à un officier de police de se déplacer pour recueillir leurs demandes de procuration ».
Et pour les électeurs « présents dans les hébergements collectifs et pour éviter d’augmenter le risque d’introduction du virus dans ces établissements, le ministre de l’Intérieur a demandé à ce que soit recherchée la désignation d’une personne travaillant déjà dans l’établissement par le juge d’instance ou l’officier de police judiciaire (OPJ) en tant que « délégué de l’OPJ. Ce statut permettra à la personne désignée, agissant sous le contrôle du juge d’instance et de l’OPJ, de recueillir les demandes de procuration dans son établissement auprès des résidents désireux de le faire, avant de les remettre à un officier de police judiciaire. Cette décision permet à chacun de pouvoir voter sans s’exposer à des risques », justifie la Place Beauvau. Suffisant pour convaincre les électeurs de se rendre aux urnes ? Rendez-vous est pris dès dimanche midi avec les premières estimations du taux de participation…