© Flickr-CC-G.Montersino
Le bon fonctionnement du service public et la garantie d’égal traitement des usagers ont amené le Conseil d’Etat à confirmer la suspension du règlement intérieur des piscines publiques de Grenoble qui autorisait le port du burkini.
Par une ordonnance du 21 juin, le Conseil d’Etat a tranché : l’adaptation du règlement intérieur des piscines municipales de Grenoble « ne visait qu’à autoriser le port du burkini », vêtement de bain intégral porté par certaines femmes musulmanes, « afin de satisfaire une revendication de nature religieuse et, pour ce faire, dérogeait, pour une catégorie d’usagers, à la règle commune, édictée pour des raisons d’hygiène et de sécurité, de port de tenues de bain près du corps. » Ce faisant, le Palais Royal rejetait rejette l’appel de la ville de Grenoble qui contestait la suspension le 16 mai de ce nouveau règlement intérieur par le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble. Les juges du Palais-Royal avaient été saisis pour la première fois via ce dossier par un « déféré laïcité » prévu par la loi du 24 août 2021 « confortant les principes de la république », aussi connue sous le nom de loi « anti-séparatismes ».
Impossible de se prévaloir de ses croyances religieuses pour s'affranchir des règles communes
« En prévoyant une adaptation du service public très ciblée et fortement dérogatoire à la règle commune pour les autres tenues de bain, le nouveau règlement intérieur des piscines municipales de Grenoble affecte le respect par les autres usagers de règles de droit commun trop différentes, et donc le bon fonctionnement du service public, et porte atteinte à l’égalité de traitement des usagers, de sorte que la neutralité du service public est compromise », assène le Conseil d’Etat dans sa décision.
Car le nouvel article 10 du règlement intérieur voté par l’assemblée délibérante de la ville pour ses quatre piscines comportait depuis ce vote une dérogation. Or si le Conseil d’Etat rappelle que la jurisprudence prévoit que le gestionnaire d’un service public a la faculté d’adapter les règles d’organisation et de fonctionnement du service pour en faciliter l’accès, y compris en tenant compte des convictions religieuses des usagers », cela est rendu possible « sans pour autant que ces derniers aient un quelconque droit qu’il en soit ainsi, dès lors que les dispositions de l’article 1er de la Constitution interdisent à quiconque de se prévaloir de ses croyances religieuses pour s'affranchir des règles communes régissant les relations entre collectivités publiques et particuliers ». Et l’usage de cette faculté « ne doit pas porter atteinte à l’ordre public ou nuire au bon fonctionnement du service ».
Une "rupture caractérisée de l’égalité de traitement des usagers"
Conséquence, le juge des référés indique « que le bon fonctionnement du service public fait obstacle à des adaptations qui, par leur caractère fortement dérogatoire par rapport aux règles de droit commun et sans réelle justification, rendraient plus difficile le respect de ces règles par les usagers ne bénéficiant pas de la dérogation ou se traduiraient par une rupture caractérisée de l’égalité de traitement des usagers, et donc méconnaîtraient l’obligation de neutralité du service public ».