Le Cese veut améliorer la prévention des risques naturels, trop souvent sous-estimés

Aurélien Hélias
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Micouraud - 30/10/2015 08h:06

Bonjour, J'ai lu le rapport de Cese et je constate qu'il y a un axe d'effort commun pour tous les risques, c'est celui de la formation des citoyens à la culture du risque . Dans ce domaine la France à un gros travail d'éducation de la population qui permettrait de sauver des vies ( feu d'habitation , catastrophes naturelles . Accident domestique, gestes de premiers secours...) Je suis officier de sapeur pompier et je pense qu'il a une piste à exploiter c'est celle du numérique par la création d'un MOOC sur la culture du risque . Ce cours pourrait être financé par l'état au titre de la formation citoyenne . Soyons acteur de notre sécurité. Cordialement

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Le Cese veut améliorer la prévention des risques naturels, trop souvent sous-estimés

Inondation à Vic-Fezensac, janvier 2014

© Flickr-CC-Fantoni

Les inondations meurtrières survenues sur la Côte d'Azur début octobre, ont à nouveau mis au jour les carences des politiques de prévention des risques liés aux catastrophes naturelles. « Nous sommes les meilleurs du monde en matière de gestion de crise mais les plus mauvais élèves en matière d'anticipation et de prévention », résume Alain Féretti, rapporteur de l'étude « Territoires face aux catastrophes naturelles : quels outils pour prévenir les risques ? » présentée au Conseil économique, social et environnemental (Cese) le 27 octobre.

L'étude du CESE, présentée le 27 octobre par la délégation à la prospective et à l'évaluation des politiques publiques, recense les outils publics mis en œuvre pour prévenir, gérer et indemniser les catastrophes naturelles et leurs conséquences.

Elle en analyse la portée et, partant de là, fait des propositions pour améliorer le système. Globalement, la France sait gérer les conséquences d'une catastrophe, offre de très bons outils d'indemnisation, mêlant assurance privée et fonds publics – fonds « Catastrophes naturelles » – mais, insiste le CESE, elle pèche dans le domaine de la prévention.

Des risques mal pris en compte

« Nous avons fait un focus sur la crue centennale de la Seine, a raconté Alain Féretti. Et conclu qu'il n'y avait plus aucune conscience du risque. Pourtant, si la crue advenait, on estime que 800 000 personnes seraient concernées, que tous les réseaux seraient en panne, qu'il faudrait compter au moins 6 mois de reconstruction... et que le tout coûterait au moins trois points de PIB ».

La population étant très peu consciente du risque, elle n'est donc pas non plus préparée à sa survenue. « On a vu des personnes s'engouffrer dans leur parking souterrain pour essayer de récupérer leur voiture alors que c'est sûrement l'endroit le plus dangereux en cas d'inondation », a souligné le rapporteur pour illustrer le degré zéro de sensibilisation au problème.

Le manque de responsabilité face aux risques est cependant loin d'être le seul fait des citoyens et acteurs économiques. Ainsi, a regretté Alain Féretti, « plus de de 20 000 communes sont concernées par un ou plusieurs risques mais seulement la moitié d'entre elles ont adopté un plan de prévention des risques naturels (PPRN). Et sur cette dizaine de milliers de communes, seules 4 000 se sont dotées d'un plan communal de sauvegarde permettant de protéger mieux, de prévenir et d'agir en cas de crise ».

Un niveau d'assurance qui déresponsabilise ?

« Est-ce que la très bonne couverture assurance ne contribuerait pas à déresponsabiliser les acteurs ? », interroge Alain Féretti. Dans cette hypothèse, les auteurs de l'étude prônent la réorientation – et pour cela aussi un abondement supérieur – du fonds « catastrophe naturelle », « vers plus de prévention en amont, notamment pour financer des mesures de mitigation ».

En d'autres termes, plutôt que de dépenser l'argent à indemniser et réparer, il s'agirait d'investir en prévision de phénomènes qui, depuis les années 80, sont plus nombreux, et devraient encore s'aggraver sous l'effet du changement climatique.

Le rapport évoque en premier lieu les inondations et les retraits-gonflements d'argile (RGA) qui représentent déjà les principaux coûts d'indemnisation.

Comment ? En intervenant sur l'exposition de la population et des infrastructures, sur la vulnérabilité des personnes, biens et environnements menacés (on parle de « vulnérabilité des enjeux »), sur les facteurs d'exposition anthropiques (liés à l'activité humaine) ainsi que sur l'anticipation du changement climatique.

Le CESE estime qu'« un certain nombre de mesures pourraient être prises dans les zones connues pour leurs risques naturels en faisant preuve de bon sens ».

Celles-ci vont de l'adaptation du bâtit ancien – hérité notamment des années 50 alors que les contraintes en termes d'implantation était loin de prendre en compte les risques – à la conception des nouvelles constructions – fondations renforcées, pilotis, etc. –, en passant par la sauvegarde des fonctions écosystémiques des milieux naturels – berges plantées, haies, choix des cultures, gestion des cours d'eau et de la cinétique de l'eau, etc. –, la réhabilitation du rôle des agriculteurs et des forestiers notamment dans la prévention incendie ou encore un apprentissage dès le plus jeunes âge des bons réflexes face à la survenue des risques.

Des pouvoirs publics locaux en cause

Dans le domaine de la prévention, les pouvoirs publics locaux ont un rôle à jouer déterminant. « En cas de risque avéré d'inondation de plaine, illustre le CESE, la première mesure à prendre est de ne délivrer aucun permis de construire dans les zones d'expansion de crue ou située à proximité du lit du cours ».

Cependant, constate Alain Féretti, « si nos outils préventions sont nombreux, ils ne sont pas assez efficients car souvent très complexes, mais aussi contestés et sources de tension pour les élus lorsqu'ils se trouvent en face de personnes atteintes dans leur propriété par des décisions de prévention ». C'est l'exemple de la clause de non-reconstructibilité qui empêche des propriétaires de reconstruire ou réhabiliter, et donc d'abandonner un bâtiment sinistré par une catastrophe naturelle.

Ainsi, dans le cadre de la tempête Xynthia qui a sévi en 2010, par exemple, 305 communes devaient élaborer des plans de prévention des risques naturels d'ici la fin de l'année 2014. En 2015, indique le CESE, seulement deux PPRN avaient été adoptés. Etant donné la situation, l'Etat a prolongé les délais jusqu'en 2016.

« Ces délais ne sont pas raisonnables », a insisté Agnès Courtoux, membre de la délégation du CESE. En principe, il faut compter 5 ans pour arriver à la phase d'approbation d'un PPRN. En réalité, cela peut durer 15 ou 20 ans ! En attendant, cela donne lieu à des spéculations, sachant que les zones à risques sont souvent des zones attractives où la pression foncière est très forte. Des permis de construire sont attribués. Désormais, on ne peut plus jouer avec la vie des gens ».

Pour une réglementation plus contraignante

Le CESE souhaite donc que dès lors qu'un préfet propose la mise en place d'un PPRN, tout permis de construire soit suspendu ou gelé afin d'obliger les acteurs à se mobiliser. En outre, il estime que les délais ne doivent plus être prolongés et que leur dépassement devrait donner lieu à sanction.

Mais, reconnaissant toute la difficulté de concilier de manière équilibrée les objectifs de sécurité et ceux du développement local dans une politique de préventions des risques, le CESE estime qu'il est nécessaire au préalable « de s'appuyer sur un diagnostic systémique intégré et partagé des territoires ». Celui-ci s'appuierait à la fois sur une topographie précise des territoires concernés, sur un recensement de l'ensemble des éléments exposés et disposerait en même temps de la connaissance des projets de développement envisagés pour l'avenir.

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