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De nombreuses dispositions des projets de loi « de transparence de la vie publique » présentés le 24 avril en Conseil des ministres visent les élus locaux. Inéligibilité définitive en cas de corruption, système de « déport » pour éviter les conflits d’intérêt et déclaration de patrimoine pour les membres d'exécutifs locaux sont notamment annoncés par Matignon.
Deux projets de loi, organique et ordinaire, étaient présentés le 24 avril en Conseil des ministres afin de prévenir les conflits d’intérêts et d’assurer la transparence s’agissant du patrimoine de ceux qui « exercent des responsabilités publiques ». Parmi eux : les élus locaux. Ainsi, au même titre que les ministres, parlementaires, membres du Conseil constitutionnel et des autorités administratives indépendantes, collaborateurs des cabinets ministériels et du président de la République, titulaires d’emplois nommés en Conseil des ministres et responsables des principales entreprises publiques, les « principaux responsables exécutifs locaux » devront transmettre déclarations de patrimoine et déclaration d’intérêts à une « Haute autorité de la transparence de la vie publique » qui remplacera l’actuelle commission pour la transparence financière de la vie politique. Matignon ne précise toutefois pas encore de seuils d’application qu’il s’agisse de la taille de la collectivité ou du périmètre des mandats exécutifs concernés. Seule certitude : les sanctions pénales en cas de non-respect des obligations de transmission seront portées à 3 ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende.
Peines d’inéligibilité à vie
Chargée du contrôle des déclarations, la Haute autorité pourra notamment être saisie par les associations agréées de lutte contre la corruption, et même s’auto-saisir. Elus et ministres encourront une peine d’inéligibilité définitive en cas de corruption, de trafic d’influence fraude électorale ou fraude fiscale.
Une définition du conflit d’intérêts est par ailleurs établie dans le second projet de loi, ordinaire, texte qui imposera aux ministres comme à toutes les « personnes désignées par le suffrage universel pour exercer un mandat local » de respecter certains principes d’impartialité, et notamment de prévenir « toute situation d’interférence entre un intérêt public et des intérêts privés de nature à compromettre l’exercice indépendant, impartial et objectif d’une fonction publique ». Dans ce but, le texte crée un système de déport, imposant aux titulaires de fonctions exécutives locales, notamment, « se trouvant dans une situation de conflit d’intérêts de s’abstenir de prendre part à l’affaire ou à la décision en cause ».
Incompatibilités professionnelles
Les membres d’exécutifs locaux se verraient également appliquer l’interdiction déjà existante, mais limitée aujourd’hui aux fonctionnaires, de rejoindre à l’issue de leurs fonctions une entreprise avec laquelle ils ont été en relation du fait de ces fonctions. La Haute autorité assurera par ailleurs le contrôle déontologique des départs vers le privé et les peines encourues en cas de manquement doivent être aggravées.
Par ailleurs, le gouvernement propose d’interdire le cumul du mandat de parlementaire avec l’exercice de toute activité de conseil ainsi qu’avec des fonctions au sein d’entreprises « dont une part importante de l’activité commerciale est entretenue avec l’administration ». Quant aux fonctionnaires élus au Parlement, ils seraient désormais placés en position de disponibilité, et non plus de détachement, pendant la durée de leur mandat.
Satisfecit des commissions des lois
Premiers à régir à ces projets de loi, les présidents (PS) des commissions des lois de l’Assemblée, Jean-Jacques Urvoas, et du Sénat, Jean-Pierre Sueur, ont salué la présentation de ces deux textes. Et se félicitent notamment de la future obligation de diffusion des déclarations d’intérêts et d’activités. « Cette publication permettra aux citoyens de connaître les éventuels intérêts détenus par un élu, qui pourraient susciter un doute raisonnable sur son impartialité et son objectivité dans le cadre des fonctions qu’il exerce », plaident-ils.
Toutefois, les deux parlementaires soulignent leur souhait d’élaborer « un mécanisme permettant de concilier transparence, contrôle et respect de la vie privée auquel a droit tout individu », s’agissant de la publication des déclarations de patrimoine, une mesure contestée par de nombreux parlementaires, à gauche comme à droite.