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Le report d’un an de la réforme de la dotation globale de fonctionnement a été annoncé par le Premier ministre à l’Assemblée le 3 novembre au matin. Les grandes lignes de la réforme seront votées dans le budget pour 2016, mais avec application en 2017 seulement. De quoi ravir la grande majorité des associations d’élus locaux et le Comité des finances locales.
L’annonce en a été faite par le Premier ministre lors de la réunion de groupe PS à l’Assemblée nationale : la réforme de la dotation globale de fonctionnement (DGF) est reportée d’un an, à 2017.
Les grands principes seront certes arrêtés au sein du PLF 2016, à savoir l’idée d’une dotation de base, une autre de ruralité et une dernière de centralité. Mais il faudra attendre le premier semestre 2016 pour acter de l’articulation et des critères de calcul de ces trois composantes. Et surtout 2017 pour l’application pleine et entière de la réforme.
Prenant acte de ce report, le président du Comité des finances locales, qui s'est réuni le 3 novembre, s’est dit satisfait « qu’on ne mette pas en œuvre une réforme à marcher forcée » tout en assurant qu’il ne s’agissait nullement d’une « manœuvre dilatoire ». « Cela nécessite de nombreux mois de travail pour arriver à quelque chose d’équilibré, de simplifié et de plus juste », a expliqué André Laignel.
Les petites villes centres avaient le plus à craindre
Des objectifs que la réforme proposée n’assure en rien, selon lui, citant « l’échelle logarithmique, l’application de coefficients de correction et le solveur de la dotation de centralité…, ce n’est pas moins complexe que le dispositif actuel ! »
Quant au second enjeu, l’élu d’Issoudun assure que « la réforme est loin du compte », observant dans les simulations « de nombreuses injustices ». Et de citer les cas des villes des banlieues ou des petites villes centres industrielles » qui se retrouvent perdantes, de même que les communes de la strate 10 000-30 000 habitants. Le président du CFL réclame surtout « du temps pour savoir ce que va donner la réforme à terme », sur plusieurs années d’application.
La décision du Premier ministre a été rapidement approuvée par une large majorité des associations d’élus locaux et par la plus puissante d’entre elles : l’AMF. L’association salue « cette décision positive [qui] va permettre de travailler efficacement sur les objectifs et les conséquences de cette réforme qui concerne toutes les communes et intercommunalités de France ».
L’AMF demande toujours une loi dédiée
« Une décision qui permettra de poursuivre le travail entamé il y a quelques semaines visant à améliorer le dispositif présenté dans le PLF 2016 », ont pour leur part renchéri AMGVF et Acuf qui fusionneront le 6 novembre. « Il s'agit en effet d'une réforme techniquement complexe à mener alors même que le volume global de la DGF poursuit son repli et que les lois d'organisation institutionnelles votées (Mapam et Notee) modifient sensiblement les périmètres : création des métropoles de Paris et Aix Marseille Provence, création de nouvelles communautés urbaines, modification sensibles des cartes intercommunales, transfert de compétences ».
Le président du CFL fait lui aussi de la future nouvelle carte intercommunale un argument de poids pour une réforme davantage construite. « Cela va chambouler plusieurs centaines d’intercos, donc aussi les communes à l’intérieur. Avec les fusions de communautés, certaines villes centres vont cesser de l’être et perdre jusqu’à trois quarts de leur dotation de centralité pendant que d’autres vont la voir doubler », prévient André Laignel.
De l’impact de la réforme des périmètres intercommunaux
Approbation de l’APVF qui juge qu’une « mise en application en 2017 permettra également une meilleure prise en compte des évolutions des périmètres intercommunaux qui seront connus fin mars 2016 ». Et d’insister sur le fait que « la nouvelle fraction de centralité proposée par le gouvernement et le renforcement de la péréquation doivent être favorables aux petites villes périphériques et bourgs centres qui sont confrontées à des charges de centralité importantes et qui ne disposent plus de réelles marges de manœuvres fiscales ».
Malgré ce report, l’AMF réitère toutefois sa demande d’une loi spécifique à cette réforme « à l’issue des indispensables concertations reposant sur des données partagées et pleinement évaluées ». Une demande soutenue par le président du Sénat, Gérard Larcher qui avait cinq jours auparavant lancé une offensive contre la réforme. Et va plus loin encore aujourd'hui en demandant à Manuel Valls de « retirer cette réforme du PLF » afin de préparer « une réforme débattue de manière sereine et transparente, au cours de l’année 2016 et lorsque les nouveaux périmètres des intercommunalités auront été arrêtés sur tout le territoire ».
Les maires ruraux plus circonspects
Même satisfaction affichée par les villes moyennes : « Pour les maires des Villes de France et présidents de leurs intercommunalités, les orientations proposées au législateur tiennent imparfaitement compte du poids des charges des villes et de la fiscalité pesant sur les ménages », a réagi l’association.
Seule voix discordante au sein des associations d’élus : celle des maires ruraux dont une délégation rencontrait ce 3 novembre au matin également le Premier ministre. « Si des simulations plus complètes sont attendues, elles ne peuvent servir d’alibi pour repousser indéfiniment la réforme des dotations, aujourd’hui injuste. C’est dès le budget 2016 que doivent être définies les principes et les règles afin d’enclencher le processus », a insisté l’AMRF dans son communiqué à l’issue de la rencontre tenue à Matignon.
« Les égoïsmes ont gagné »
C’est une députée PS qui s’est montrée la plus déçue de ce report. Et pour cause, il s’agit de la « mère » de la réforme, Christine Pirès-Beaune, qui n’avait d’ailleurs pas ménagé sa peine depuis son rapport pour convaincre les associations d’élus…
@ludovicdevergne malheureusement le conservatisme et les égoïsmes ont gagné
— Ch. Pirès Beaune (@cpiresbeaune) 3 Novembre 2015
Seule avancée : la réforme de la péréquation, qui semble faire l’unanimité, et que le président du Comité des finances locales espère bien voir intégrée comme prévu au PLF 2016 pour application… dès 2016 cette fois-ci.