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Outre le régime spécifique des collaborateurs de groupe d’élus, le juge administratif contrôle la nature des missions exercées.
Fiche pratique établie par Lorène Carrère et Emilien Batôt, avocats au barreau de Paris, Cabinet Seban & Associés, "le Courrier des maires et des élus locaux", mars 2014
1. Collaborateurs de groupe d’élus : un régime spécifique
Tous les agents exerçant des missions politiques pour les élus d’une collectivité ne sont pas nécessairement des collaborateurs de cabinet, placés sous le régime spécifique prévu par la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ((Lire aussi : « La gestion de l’emploi de collaborateur de cabinet », Le Courrier, n° 276, février 2014, pp. 46-47.)).
Ne sont ainsi pas considérés comme tels les collaborateurs de groupe d’élus. Ne rendant pas uniquement compte « à l’autorité territoriale auprès de laquelle ils sont placés », et n’exerçant pas nécessairement des fonctions politiques, ces postes peuvent être proposés par le maire des communes de plus de 100 000 habitants, le président du conseil général ou régional, en application des articles L2121-28, L3121-24 et L4312-23 du CGCT.
Le code fixe un plafond de rémunération de ces agents différent du plafond de celle des collaborateurs de cabinet (30 % du montant total des indemnités versées chaque année aux membres de l’assemblée délibérante).
Les secrétaires de groupe n’ont en effet pas pour mission d’assister la personne d’un élu dans l’exercice de son mandat local, mais principalement d’assurer le secrétariat d’un groupe d’élu, et accessoirement de l’accompagner en matière de conseil politique.
Sont ainsi recrutés pour remplir ces fonctions des fonctionnaires ou agents non titulaires, sur le fondement de l’article 3-3, 1° de la loi n° 84-53 précitée ((CAA Nancy, 22 décembre 2005, Région Franche-Comté, n° 01NC00904.)).
2. L’exercice de missions politiques
Les libertés accordées à l’autorité territoriale au titre de l’article 110 de la loi n° 84-53 ont pour corollaire un contrôle complet du juge administratif sur la nature des missions exercées par les agents recrutés sur ce fondement.
Le juge les apprécie de manière concrète, retenant principalement trois critères (CAA Paris 27 novembre 2003, Ville de Paris, n°03PA01312.)) :
- la position hiérarchique de l’agent, placé directement auprès de l’autorité territoriale, sans rapport hiérarchique ni fonctionnel avec les autres services ((CAA Versailles, 2 novembre 2006, Commune de Bobigny, n° 04VE03389.)) ;
- sa rémunération (respect du plafond prévu, imputation au chapitre budgétaire correspondant) ;
- les missions exercées (décisions relatives à la politique municipale).
Outre le fait qu’ils donnent des conseils de nature politique à l’autorité territoriale, l’accompagnent dans la préparation de ces décisions et jouent un rôle de suivi et d’intermédiaire en matière politique, les collaborateurs de cabinet sont « chargés d’exercer auprès [des autorités territoriales] des fonctions qui requièrent nécessairement, d’une part, un engagement personnel et déclaré au service des principes et objectifs guidant leur action politique, auquel le principe de neutralité des fonctionnaires et agents publics dans l’exercice de leurs fonctions fait normalement obstacle, d’autre part, une relation de confiance personnelle d’une nature différente de celle résultant de la subordination hiérarchique du fonctionnaire à l’égard de son supérieur. » ((CE, 26 janvier 2011, Assemblée de la Polynésie française, n° 329237, aux tables p. 900.))
Ainsi, l’autorité territoriale ne peut pas décider de recruter sur ce fondement des personnels ne participant pas à son activité politique, tels que maîtres d’hôtel, secrétaires, standardistes, cuisiniers, agents de sécurité, chauffeurs, hôtesses… ((CAA Paris, 30 mars 2009, Assemblée de la Polynésie française, n° 07PA00800.))
A contrario, le juge administratif requalifiera les missions d’agents qui, quand bien même ils auraient été recrutés sur un autre fondement, effectuent en réalité des missions politiques directement auprès de l’autorité territoriale.
Tel est le cas, par exemple, d’une « chargée de mission » qui occupait en réalité les fonctions de directeur de cabinet du maire ((TA Paris, 9 janvier 2003, Mme de Lesquen, n° 0113513/5.)), ou d’un agent recruté comme secrétaire qui exerçait en réalité des missions de conseil politique à destination unique du président du conseil général ((CE, 26 mai 2008, Département de l’Allier, n° 288104).
A noter. En reconnaissant que les missions exercées ne sont pas celles d’un collaborateur de cabinet, le juge administratif permet à l’agent, notamment, de bénéficier du droit à titularisation (TA Paris, 9 janvier 2003, M. Mondain, n° 0206558/5).