La fusion des régions tarde à porter ses fruits, euphémise la Cour des Comptes

Hugo Soutra
La fusion des régions tarde à porter ses fruits, euphémise la Cour des Comptes

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Les travaux des magistrats financiers dédiés aux collectivités territoriales et dévoilés le 24 septembre sont peu flatteurs sur le volet régional de la réforme territoriale. L'analyse des répercussions financières de la mise en place des « nouvelles régions », début 2016, fait douter la rue Cambon quant aux gains d'efficience alors promis. Pour eux, les bénéfices attendus en termes de rationalisation des coûts ne sont pas encore au rendez-vous.

Pour la Cour des Comptes, deux freins majeurs ont empêché jusqu’ici les « nouvelles régions » de gagner réellement en efficience :

  • La rapidité de la mise en place de la réforme qui a eu pour effet de conduire les acteurs régionaux à reproduire certains schémas d’organisation coûteux et ce afin d’« assurer » la pérennité du service public ;
  • La prise en main incomplète des compétences Développement économique et Transport des Nouvelles Régions qui a empêché une véritable rationalisation des coûts.

Une réforme sans heurts, mais sans gain

« Les nouvelles régions se sont mises en place en temps et en heure, et sans heurts » a souligné d’emblée le Premier président de la Cour des Comptes, Didier Migaud, « et ce malgré les délais très courts qui ont été imposés par l’État ». Mais pour réussir ce tour de force institutionnel, la Cour des Comptes a pu constater que les acteurs régionaux avaient souvent fait le choix de « reproduire des modes de gestion préexistants pour éviter au maximum les ruptures brutales ». C’est notamment vrai dans le domaine des transports, en théorie nouvelle compétence des régions mais que beaucoup ont continué à délégué aux départements hier compétents « pour assurer la continuité du service public » explique la Cour des Comptes. Mais le Premier président de la Cour a également cité des organisations maintenues en « multi-sites » pour ne pas bousculer les agents et les élus.

[caption id="attachment_36485" align="alignright" width="300"] André Vallini, ancien secrétaire d'Etat à la réforme territoriale[/caption]

Pas de rationalisation des coûts, voire même une augmentation des dépenses dans un premier temps due essentiellement à l’harmonisation par le haut des régimes indemnitaires des agents dans les régions fusionnées. Les dépenses ont ainsi crû de 12% en moyenne dans les régions fusionnées entre 2017 et 2018 (soit 50 millions d'euros), contre moitié moins dans les régions aux périmètres inchangés. Dans les régions concernées par la réforme Hollande-Valls-Vallini, seule les Hauts-de-France ont fait le choix de ne pas les aligner, et se retrouve désormais à gérer 8 régimes différents.

Un transfert de compétences inachevé

Outre la réorganisation géographique des régions, la réforme du 1er janvier 2016 a également permis aux régions de prendre la main sur deux compétences : les Transports et le Développement économique. Ces transferts sont aujourd’hui qualifiés d’inaboutis par la Cour des Comptes.  « De manière générale, la transition vers le plein exercice de leurs compétences dans le nouveau périmètre régional n’est pas achevée » peut-on lire dans le rapport de synthèse de la Cour. « Les régions ont maintenu les dispositifs antérieurs et repoussé certaines réformes structurelles » a ainsi noté Didier Migaud qui, avec les magistrats de la Cour, invite donc les nouvelles régions à « renforcer l’exercice effectif de leurs responsabilités », notamment en matière de développement économique.

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Besoin de lisibilité dans la répartition des compétences

La Cour recommande donc à l’État de « clarifier les rôles respectifs des collectivités territoriales [et ce] alors qu’émergent des demandes fortes en faveur d’une plus grande lisibilité et d’une meilleure accessibilité aux services publics dans les territoires, les conditions sont favorables au renforcement des responsabilités régionales ». Enfin, et c’est une bonne nouvelle, la Cour a également souligné dans son rapport le dynamisme de la fiscalité régionale, portée notamment par la CVAE (Cotisation sur la Valeur Ajoutée des Entreprises) même si cette dernière demeure un impôt « volatile ». Des rentrées d’argent qui ont ainsi permis aux Régions « d’investir et de contenir leur endettement ».

Aussi, au vu de cette situation globale, il existe selon les magistrats « de réelles marges de manoeuvre aux régions pour gagner enfin en efficience dans les exercices à venir ».

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