La communication de l'élu municipal candidat - Fiche juridique

Les élections régionales de mars 2010 sont des élections générales qui entraînent l'application de l'article L.52-1 du Code électoral interdisant toute promotion publicitaire des réalisations municipales depuis le 1er septembre 2009.

1. Qui est concerné ?

Il ne s'agit pas seulement des collectivités qui sont «directement» intéressées par le scrutin, lorsque leur propre assemblée délibérante est renouvelée, en l'espèce, les conseils régionaux. De manière quelque peu extensive, la doctrine du ministère de l'Intérieur énonçait, il y a près de vingt ans : «Cette interdiction vaut pour toutes les collectivités sur le territoire desquelles doit se dérouler une élection générale quel que soit le type d'élection» (réponse du ministre de l'Intérieur à la question n°14137, JO du Sénat du 18 avril 1991, p. 817).

Aujourd'hui, le même ministère indique, conformément à la jurisprudence du juge de l'élection (Conseil constitutionnel, 12 décembre 2002, AN, Nord, 21e, n°2002-2673) que «les dispositions de l'article L52-1 visent au premier chef les candidats à une élection qui, appartenant à la majorité responsable de l'administration d'une collecti­vité, pourraient s'en prévaloir dans le cadre d'une campagne électorale, au travers d'une action de promotion publicitaire sur les réalisations ou la gestion de leur collectivité» (réponse du ministre de l'Intérieur à la question écrite n°60004, JOAN Q du 26 avril 2005, p. 4345).

Attention!
Les communes ne seront considérées comme «intéressées par le scrutin» que si l'un de leurs élus, figurant sur une liste candidate aux élections régionales, bénéficie de la campagne de promotion collective de l'action communale. Il s'agit donc, à coup sûr, du maire, mais également de l'adjoint voire du conseiller municipal appartenant à la majorité.

Cette interdiction concerne également les établissements publics de coopération intercom­munale (EPCI) qui peuvent être qualifiés de « collectivités intéressées » au sens de l'article L.52-1 du Code électoral (Conseil constitutionnel, 4 novembre 1993, AN Rhône, 2e, n°93-1265). Lorsque le président ou un vice-président d'une communauté de communes, d'une communauté d'agglomération, d'une communauté urbaine ou encore d'un syndicat intercommunal ou d'un syndicat mixte est candidat à l'élection régionale, l'interdiction posée par l'article L52-1 du Code électoral pèse donc sur la communication institutionnelle de l'EPCI qu'il contribue à diriger.

2. Quelle est la portée de l'interdiction ?

Par «campagne de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion d'une collectivité», il ne faut pas entendre toute diffusion au public d'informations émanant de la commune. Les élus municipaux ou intercommunaux qui seraient candidats aux régionales peuvent continuer de faire connaître leurs réalisations ou leurs projets municipaux, à condition de respecter deux règles de prudence : n'informer que de manière objective et respecter, en tout point, la pratique habituelle.

Une communication neutre et objective

Ainsi, le juge admet qu'une collectivité poursuive la diffusion de son magazine municipal si celui-ci demeure « informatif et consacré à des projets, manifestations ou événements intéressant la vie locale » (CE, 29 juillet 2002, Elections municipales de Chelles, n°239844). A l'inverse, un reportage publicitaire inséré dans l'édition régionale d'un grand hebdomadaire contenant une lettre par laquelle un maire, candidat aux élections législatives, expose le programme de développement que la municipalité qu'il dirige entend mener pour l'année à venir méconnaît les dispositions de l'article L52-1 du Code électoral (Conseil constitutionnel, 6 octobre 1993, AN Lot, 1re, n° 93-1255). Tout est affaire de qualificatifs : il faut à tout prix rester neutre et éviter tout traitement mettant en valeur l'action. Il faut se contenter de faire savoir ce qu'il est nécessaire que les citoyens apprennent et éviter de faire valoir, en termes élogieux, ses réalisations ou ses projets.

Le maire pourra également continuer d'assurer la représentation normale de la municipalité : les réunions de comités de quartier, comme les réunions publiques ouvertes à l'ensemble des élus et des habitants pourront continuer d'avoir lieu. De même, il est permis que l'édile soit présenté sur le site Internet de la commune, tant que cette présentation n'est pas accompagnée de propos flatteurs et que ce portrait est intégré dans le reste du site sans une mise en valeur particulière.

- sur des supports récurrents

Jusqu'à l'élection régionale, les supports récurrents de communication doivent demeurer identiques à ce qu'ils étaient auparavant, dans leur présentation et leur périodicité : la pratique habituelle est un des critères de la sécurité juridique.

A ce titre, sont non seulement concernés les supports de communication tels que le bulletin municipal mais également les manifestations culturelles : les fêtes habituellement organisées par la commune peuvent continuer d'avoir lieu, sans qu'elles soient qualifiées de campagne de promotion publicitaire interdite (Conseil constitutionnel, 5 décembre 2002, AN, Hauts-de-Seine, 2e, n° 2002-2660).

L'impact sur l'écart de voix

La méconnaissance de l'interdiction de mener une campagne de promotion publicitaire n'aboutit pas, ipso facto, à l'annulation de l'élection régionale de l'élu municipal qui l'aurait commise.

Le juge de l'élection examinera l'impact de cette campagne interdite sur les résultats, il mesurera son effet sur l'écart de voix entre les candidats à cette élection. Le juge de l'élection peut ainsi être amené à considérer que «compte tenu de l'écart des voix, cette circonstance n'a pas été, en l'espèce, de nature à modifier les résultats du scrutin» (lire ci-contre).

Attention!
Au risque politique s'ajoute le risque pénal. En effet, l'article L.90-1 du Code électoral punit d'une amende de 75.000 euros toute infraction à l'article L.52-1, sans que l'impact sur le résultat de l'élection ne soit examiné par le tribunal. Ainsi, un président de syndicat intercommunal a été condamné à une amende avec sursis pour avoir sciemment organisé, dans les six mois précédant l'élection, une campagne de promotion publicitaire consistant en la diffusion d'affiches sur deux cent cinquante panneaux publicitaires et la publication de suppléments d'un journal régional.

3. Les règles de communication sur le bilan de mandat régional

Le second alinéa de l'article 52-1 du Code électoral ne se contente pas de poser l'interdiction dont il vient d'être question. Il ajoute que « cette interdiction ne s'applique pas à la présentation, par un candidat ou pour son compte, dans le cadre de l'organisation de sa campagne, du bilan de la gestion des mandats qu'il détient ou qu'il a détenus».

Par conséquent, ce ne sont pas les « bilans de mandat » qui sont interdits, mais les seuls bilans de mandat qui transparaîtraient d'une campagne de communication publique menée par la commune et financée par elle.

Si l'élu municipal, candidat aux élections régionales, est un élu régional sortant, il pourra donc, sans risque, publier un document de campagne valorisant son action au sein du conseil régional depuis 2004, à condition que les frais afférents à la réalisation de ce document soient intégrés au compte de campagne du candidat en tête de la liste régionale sur laquelle il figure. et réglés par le mandataire de ce candidat tête de liste.

Le Courrier des maires et des élus locaux, 2010 - Fiche établie par Philippe Bluteau, avocat à la cour

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