La cantine pour tous doit être inscrite dans la loi, jugent les radicaux de gauche

Aurélien Hélias
La cantine pour tous doit être inscrite dans la loi, jugent les radicaux de gauche

Cantine de l'école

© J. Ber

Dans une proposition de loi qui sera discutée le 12 mars à l’Assemblée nationale, les députés du PRG estiment que la garantie de l’accès des enfants à la cantine scolaire, alors que certaines communes la réservent aux enfants dont les parents travaillent, doit être inscrite dans la loi pour s’imposer durablement. Et confirmer une jurisprudence constante en ce sens de plus de 20 ans.

« L’inscription à la cantine, lorsque ce service existe, est un droit pour tous les enfants scolarisés. Il ne peut être établi aucune discrimination selon la situation de leur famille ». Tel, est l’essentiel d’un texte très court que le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste (RRDP, à majorité radicale de gauche), présentera lors de sa « niche parlementaire » réservée du 12 mars.

Portée par le député Roger-Gérard Schwartzenberg, cette proposition de loi veut mettre un terme définitif aux quelques initiatives locales de communes restreignant l’accès à la cantine scolaire aux enfants dont les parents ont un emploi.

« Ces communes invoquent généralement ou prétextent le nombre limité de places disponibles dans leurs cantines scolaires et l’insuffisance de moyens financiers pour agrandir ces locaux ou en construire de nouveaux. Au lieu d’agir concrètement pour faire face à une demande croissante. Au lieu d’aménager ces structures pour répondre effectivement aux besoins. Elles choisissent donc […] de restreindre l’accès à ce service public selon des critères discriminatoires », déplore l’élu PRG dans l’exposé des motifs de son texte.

Au nom du principe d’égalité devant le service public
Or, le député du Val-de-Marne conteste cette orientation politique pour plusieurs raisons. D’abord, pragmatiques : « Le plus souvent, les communes qui n’accueillent pas les enfants de chômeurs invoquent une prétendue disponibilité de ceux-ci. Pourtant, la recherche d’un emploi nécessite un investissement de temps. Pourtant, les chômeurs ont une obligation de disponibilité dans la recherche d’un travail ».

La « prétendue disponibilité » de parents au chômage ne tient donc pas selon lui. Sans compter que ce repas à la cantine scolaire est, pour certains de ces « enfants très démunis, le seul vrai repas de la journée ».

Mais surtout pour une raison de fond, de principe : « On ne peut admettre une discrimination, fondée sur la situation professionnelle des parents, qui séparerait les élèves les uns des autres au moment du déjeuner ». Une discrimination qui revient à remettre en cause le principe constitutionnel d’égalité des usagers devant le service public, selon Roger-Gérard Schwartzenberg.

« Certes, la restauration scolaire n’est pas une compétence obligatoire des communes (article L.2321-2 du Code général des collectivités territoriales) et a pour elles un caractère facultatif. Mais quand celles-ci en ont décidé la création, il s’agit alors d’un service public annexe au service public d’enseignement. Dès lors, la restauration scolaire est soumise au principe d’égalité », argumente ce professeur de droit public.

Une jurisprudence constante
S’il était adopté, le texte viendrait alors inscrire dans la loi ce qu’a répété à plusieurs reprises la justice administrative, dans une jurisprudence constante à ce sujet : tribunal administratif de Versailles en 1993, TA de Marseille en 1995 et jusqu’à la plus haute juridiction administrative, le Conseil d’Etat, en 2009.

Alors que la commune d’Oullins (Rhône) avait délibéré cette année-là pour que seuls puissent déjeuner à la cantine tous les jours les enfants dont les deux parents travaillaient, les autres ne pouvant être accueillis qu’une fois par semaine dans la limite des places disponibles, les juges du Palais-Royal avaient suspendu cette délibération, incriminant « un critère de discrimination sans rapport avec l’objet du service public en cause. »

Modifier le Code de l’éducation
« Toutefois, malgré cette jurisprudence constante du juge administratif au cours des deux dernières décennies, les atteintes au principe d’égalité des usagers de la restauration scolaire se manifestent périodiquement dans plusieurs communes », regrette le député. Et alors qu’un autre acteur, le Défenseur des droits, avait rappelé à l’occasion de la rentrée scolaire 2013, ce principe de non-discrimination.

« Afin d’éviter cette situation, il importe que le législateur […] inscrive dans la loi les principes posés clairement par le juge, pour assurer leur caractère obligatoire », conjure le député. Un principe qui, si le texte était adopté, viendrait ainsi compléter le chapitre Ier du titre III du Code de l’éducation sur « L’obligation scolaire, la gratuité et l’accueil des élèves des écoles maternelles et élémentaires » .

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