[Mis à jour le 24 mars 2014] Les conseillers communautaires sont désormais élus en même temps que les conseillers municipaux. Il importe d'expliciter de façon concrète ce système qui paraît complexe à mettre en œuvre, tant pour la confection des listes que pour leur recomposition entre les deux tours (voir ci-dessous notre point III.).
Une analyse juridique de Lucie Lefébure, juriste, et Aloïs Ramel, avocat à la cour, SCP Seban et Associés
• Afin de favoriser l’égal accès des hommes et des femmes aux mandats locaux et de renforcer la légitimité démocratique de l’intercommunalité, la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 établit de nouvelles règles en matière électorale, s’appliquant au scrutin de mars 2014.
• Les conseillers communautaires sont désormais élus en même temps que les conseillers municipaux. Le scrutin de mars 2014 est double : les citoyens éliront leurs conseillers municipaux et leurs conseillers communautaires.
• Des listes de candidats au siège de conseiller communautaire devront être établies. Le régime est certes nouveau, mais le législateur s’est inspiré des règles applicables aux élections municipales, les transposant même parfois.
I. Les règles générales en matière de confection des listes
L’élection des conseillers communautaires a lieu en même temps que l’élection des conseillers municipaux. L’article L.273-3 du Code électoral dispose en effet que « les conseillers communautaires sont élus pour la même durée que les conseillers municipaux de la commune qu’ils représentent et renouvelés intégralement à la même date que ceux-ci dans les conditions prévues à l’article L.227 ».
A. Communes de moins de 1 000 habitants : des règles spécifiques
Dans les communes de moins de 1 000 habitants, aucune liste intercommunale n’est nécessaire. Le bulletin ne doit comporter que la liste des candidats aux élections municipales. En effet, les conseillers communautaires sont désignés au sein du conseil municipal, suivant l’ordre du tableau.
L’article L.273-11 du Code électoral dispose que « les conseillers communautaires représentant les communes de moins de 1 000 habitants au sein des organes délibérants des communautés de communes, des communautés d’agglomération, des communautés urbaines et des métropoles sont les membres du conseil municipal désignés dans l’ordre du tableau ».
Ordre du tableau. Ce classement des membres du conseil municipal dans l’ordre du tableau est prévu par l’article L.2121-1 du Code général des collectivités territoriales. Ainsi, après « le maire, prennent rang les adjoints puis les conseillers municipaux ». « Les adjoints prennent rang selon l’ordre de leur élection, et entre adjoints élus sur la même liste, selon l’ordre de présentation sur la liste ». Les conseillers municipaux prennent rang « par ancienneté de leur élection, depuis le dernier renouvellement intégral du conseil municipal ; entre conseillers élus le même jour, par le plus grand nombre de suffrages obtenus ; et, à égalité de voix, par priorité d’âge ».
Par exemple, si une commune de 600 habitants détient 4 sièges au conseil communautaire, ils seront occupés par le maire et les 3 adjoints élus en premier.
En pratique, les électeurs éliront en mars leurs conseillers municipaux et de facto désigneront leurs conseillers communautaires. Aucune inscription n’est à prévoir sur le bulletin, hormis la liste des candidats au siège de conseiller municipal.
Parité : aucune obligation. Pour ces communes de moins de 1 000 habitants, le législateur n’a posé aucune obligation en matière de parité dans la composition des listes de candidats au siège de conseiller municipal. Il n’est donc pas obligatoire d’alterner des candidats de chaque sexe.
Par conséquent, il en est de même pour les élections au siège de conseiller communautaire représentant des conseillers de communes de moins de 1 000 habitants.
B. Communes de plus de 1 000 habitants : l’obligation d’élaborer une liste de candidats au siège de conseiller communautaire
L’élection des conseillers communautaires ayant lieu concomitamment à l’élection des conseillers municipaux, l’électeur devra choisir le même jour une liste de candidats au siège de conseiller municipal et une liste de candidats au siège de conseiller communautaire.
Un bulletin, deux listes. Les deux listes doivent figurer de manière distincte sur le bulletin, afin que la double portée du bulletin soit connue de manière claire par l’électeur. L’électeur n’aura donc à insérer dans l’urne qu’un seul bulletin.
1. Combien de noms doivent être inscrits sur la liste des candidats au conseil communautaire ?La liste des candidats au siège de conseiller communautaire doit comporter « un nombre de candidats égal au nombre de sièges à pourvoir, augmenté d'un candidat supplémentaire si ce nombre est inférieur à cinq et de deux dans le cas inverse » (article L.273-9 I. 1° du code électoral).
Par exemple, si une commune possède 6 sièges à pourvoir au sein de l’organe délibérant de l’intercommunalité, 8 noms devront être inscrits sur la liste des candidats au siège de conseiller communautaire.
Le nombre de conseillers communautaires composant l’organe délibérant des communautés de communes, des communautés d’agglomération, des communautés urbaines et des métropoles et leur répartition entre les communes membres est, par ailleurs, fixé dans les conditions prévues aux articles L.5211-6-1 et L.5211-6-2 du CGCT.
Nombre de sièges à pourvoir. Il doit être constaté, au plus tard le 31 octobre, par arrêté du représentant de l’Etat dans le département lorsque les communes font partie du même département ou par arrêté conjoint des représentants de l’Etat dans les départements concernés dans le cas contraire.
2. Le choix des candidats est-il libre ?Tout d’abord, il est important de préciser que les règles d’inéligibilité et d’incompatibilité sont identiques à celles prévues pour les conseillers municipaux de la commune qu’ils représentent (article L.273-4 du Code électoral).
- Autrement dit, peuvent être candidats aux élections communautaires les personnes pouvant se présenter aux élections municipales.
Parité : oui. Elle s’applique aux élections des conseillers communautaires, et les candidats devront faire en sorte que la liste soit composée alternativement de personnes de chaque sexe.
La loi impose enfin une contrainte importante dans l’élaboration des listes intercommunales.
- Ne peuvent figurer sur la liste de candidats au siège de conseiller communautaire que des candidats inscrits sur la liste des candidats au siège de conseiller municipal.
Le législateur a voulu que « nul ne peut être conseiller communautaire s’il n’est conseiller municipal ou conseiller d’arrondissement. » (article L.273-5 I du Code électoral).
Pour mettre en œuvre cette condition, le législateur a utilisé la technique du fléchage.
II. La technique du fléchage dans les communes de plus de 1 000 habitants
L’obligation pour les conseillers communautaires d’être également conseillers municipaux offre une marge de manœuvre très étroite pour établir les listes des candidats au mandat de conseiller communautaire.
Même ordre de présentation
Tout d’abord, les candidats au siège de conseiller communautaire doivent figurer dans l’ordre de présentation dans lequel ils apparaissent sur la liste de candidats au siège de conseiller municipal (article L.273-9 I 2° du Code électoral).
Règle du premier quart
En outre, tous les candidats présentés dans le premier quart de la liste intercommunale doivent figurer, de la même manière et dans le même ordre, en tête de la liste municipale.
La direction générale des collectivités locales (DGCL) du ministère de l’Intérieur précise que ce pourcentage doit être arrondi à l’entier inférieur.
Par exemple, si 9 candidats sont inscrits sur la liste intercommunale, seuls les deux premiers candidats inscrits sur la liste communautaire devront être identiques aux deux premiers candidats inscrits sur la liste municipale.
Dans le cas où cette règle aboutit à 0, c'est-à-dire pour les listes communautaires avec moins de 4 candidats inscrits, le pourcentage est néanmoins arrondi à 1.
Règle des trois premiers cinquièmes
Pour le reste de la liste intercommunale, la désignation des candidats n’est pas libre car « tous les candidats aux sièges de conseiller communautaire doivent figurer au sein des trois premiers cinquièmes de la liste des candidats au conseil municipal » (article L.273-9 I 5° du Code électoral). Ce pourcentage est également arrondi à l’entier inférieur.
En d’autres termes, il convient d’être attentif lors de la confection des listes pour les élections municipales, car les candidats figurant dans les deux derniers cinquièmes ne pourront être désignés conseillers communautaires.
Candidats « complémentaires » et cas particuliers
Les candidats venant en complément du premier quart de la liste communautaire peuvent cependant être inscrits dans un ordre différent de celui qu’ils occupent au sein de la liste municipale, à condition de respecter leur ordre d’apparition dans la liste municipale. Autrement dit, la seule possibilité ouverte est de ne pas faire figurer l’ensemble des candidats aux élections municipales parmi ces candidats « complémentaires » aux postes de conseiller communautaire.
Si le nombre de sièges de conseiller communautaire à pourvoir excède les trois cinquièmes de la liste municipale, la liste intercommunale reprend l’ordre de présentation des candidats au conseil municipal. Ainsi, pour établir la liste intercommunale, les candidats doivent au préalable rédiger avec minutie la liste municipale. C’est cette dernière qui va déterminer la rédaction de la liste intercommunale.
De manière concrète, la composition de la liste intercommunale, dans l’hypothèse où le nombre de sièges à pourvoir serait inférieur aux trois cinquièmes de la liste municipale, se divise en deux parties. Le premier quart de la liste intercommunale doit être l’exacte réplique du début de la liste municipale. La deuxième partie doit ensuite être constituée de candidats faisant partie des premiers trois cinquièmes de la liste municipale. Elle n’a pas à être la réplique exacte des trois premiers cinquièmes de la liste des candidats au siège de conseiller municipal mais doit simplement reprendre l’ordre de présentation dans lequel les noms de candidats apparaissaient.
Exemple d’un conseil municipal de 25 membres, la commune possédant 6 sièges au sein de l’organe délibérant de l’intercommunalité : la liste intercommunale, qui devra faire figurer 8 candidats, sera composée des 2 personnes en tête de la liste municipale, puis 6 candidats choisis parmi les 13 candidats suivants inscrits sur la liste municipale. Ces 6 candidats peuvent être choisis librement, à la seule condition de respecter leur ordre d’apparition. Par exemple, le candidat n° 14 ne doit pas être inscrit sur la liste intercommunale avant le candidat n° 9, si ces deux candidats sont choisis pour figurer sur la liste intercommunale. La liste des candidats aux postes de conseillers communautaires pourra ainsi être constituée, par exemple, des candidats aux élections municipales n° 1, 2, 5, 6, 9, 10, 13 et 14, dans cet ordre, qui doit impérativement respecter l’alternance des sexes. La présence des candidats n° 1 et 2 est obligatoire. La présence des candidats n° 16 à 25 est interdite.
En revanche, si la commune possédait 15 sièges de conseillers au lieu de 8, 17 noms devraient être inscrits sur la liste intercommunale et ce nombre excéderait les trois cinquièmes. Ainsi, la liste communautaire devrait reprendre l’ordre de la liste municipale, de 1 à 17.
Compte tenu des très nombreuses restrictions pesant sur la désignation des candidats aux postes de conseillers communautaires, on peut se demander pourquoi le législateur a retenu ce système d’une ahurissante complexité au lieu d’imposer clairement la présentation de deux listes identiques.
III. La recomposition des listes intercommunales entre les deux tours dans les communes de plus de 1 000 habitants
Les règles, en matière de recomposition des listes intercommunales entre les deux tours, sont identiques à celles applicables aux élections municipales.
En vertu de l’article L.264 du Code électoral, peuvent se présenter au second tour les listes ayant obtenu au premier tour un nombre de suffrages au moins égal à 10 % du total des suffrages exprimés.
Ces listes peuvent être modifiées dans leur composition. Néanmoins, comme pour les élections municipales, elles ne peuvent être modifiées que pour inclure des candidats ayant figuré au premier tour sur d'autres listes, sous réserve que celles-ci ne se présentent pas au second tour et qu'elles aient obtenu au premier tour au moins 5 % des suffrages exprimés.
Il faut également noter que les candidats ayant figuré sur une même liste au premier tour ne peuvent figurer au second tour que sur une seule liste. Le choix de la liste sur laquelle ils sont candidats au second tour est notifié à la préfecture ou à la sous-préfecture par la personne ayant eu la qualité de responsable de la liste constituée par ces candidats au premier tour.
De plus, la modification de l’ordre des candidats d’une liste intercommunale n’est possible que dans une seule hypothèse : lorsque la liste municipale accueille des candidats venant d’une autre liste qui, ayant obtenu au premier tour plus de 5 % des suffrages exprimés, ne se maintient pas au second tour.
En pratique, les deux listes (municipales et intercommunales) étant intimement liées, la liste communautaire est susceptible d’être modifiée, via un changement de la liste municipale.
Par exemple, si l’intégration de candidats de listes différentes à la liste municipale conduit à modifier la tête de la liste municipale, alors la liste communautaire devra être également modifiée afin que son premier quart reste l’exacte réplique de la liste municipale.
En définitive, les règles s’appliquant à l’élaboration de la liste communautaire doivent également être appliquées en cas de recomposition de la liste municipale entre les deux tours.
Si l’ordre de présentation est modifié en dehors de l’hypothèse de l’intégration dans une liste de candidats en provenance d’une liste absente du second tour, la modification sera constitutive d’une irrégularité.
Il faut également rester vigilant à toujours respecter l’obligation de parité en observant l’alternance des sexes sur la liste des candidats, qu’il s’agisse de la liste municipale ou de la liste intercommunale.
Compte tenu du délai très court pour fusionner les listes électorales et des équilibres politiques fragiles dans certaines structures intercommunales, les candidats se doivent d’être particulièrement vigilants dans leurs calculs.
IV. L'impact de la composition des listes sur le résultat du scrutin
La composition des listes communautaires ne doit pas être négligée car elle présente un enjeu important pour les listes, même minoritaires. En effet, le mode de scrutin des élections communautaires est identique à celui des élections municipales, pour les communes de plus de 1 000 habitants.
Autrement dit, la liste arrivée en tête obtient la moitié des sièges à pourvoir et les autres sièges sont distribués à la proportionnelle à la plus forte moyenne entre les listes ayant recueilli au moins 5 % des suffrages exprimés.
Ainsi, l’opposition municipale peut être représentée au sein de l’organe délibérant des intercommunalités. Les candidats doivent donc établir avec attention la liste de candidats au siège de conseiller communautaire, car une liste qui obtiendrait au moins 5 % des suffrages exprimés, pourrait obtenir des sièges au sein de cet organe.
En outre, des irrégularités dans l’établissement des listes de candidats ou dans leur recomposition entre les deux tours peuvent entraîner l’annulation des opérations électorales, si ces irrégularités ont eu une influence déterminante sur l’issue du scrutin.
A noter. Les irrégularités dans l’élaboration ou la recomposition des listes communales ont également des conséquences directes sur la validité de la liste intercommunale. En effet, en cas d’annulation de l’élection de l’ensemble du conseil municipal d’une commune, le mandat des conseillers communautaires la représentant prendrait fin à la même date que celui des conseillers municipaux.
Revue de presse du 22 au 29 octobre 2013 « Cédis Formation - 29/10/2013 17h:39
[...] L’élection des conseillers communautaires : comment établir les listes de candidats ? - Le Courrier des Maires – 22 octobre 2013 [...]
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