L'Assemblée nationale a adopté, du 16 au 19 mars, 200 amendements au projet de loi sur la biodiversité, rebaptisé loi « pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages ». Le texte a ensuite été adopté le 24 mars.
Le projet de loi pour la biodiversité, examiné à l'Assemblée du 16 au 19 mars, a été voté dans son ensemble le 24 mars. Au total, autour de 200 amendements sur quelque 1 450 ont modifié les 73 articles du texte initial, rebaptisé au passage loi « pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages ».
Mesure centrale du projet défendu par le ministère de l'Ecologie, la création de l'Agence française de la biodiversité (AFB) a été votée par l'Assemblée lors de la séance du 18 mars. Elle absorbera plusieurs organismes : l'Office nationale de l'eau et des milieux aquatiques (Onema), l'Atelier technique des espaces naturels, l'Agence des aires marines protégées et les Parcs nationaux de France.
Une agence au périmètre évolutif
Mais, au regret des ONG et de certains élus, qui y voient l'influence du lobby des chasseurs, l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) restera une entité à part, tout comme l'Office national des forêts, d'ailleurs. La ministre n'a pas exclu toutefois que cette fusion intervienne plus tard, après qu'un rapprochement des deux structures, notamment sur le terrain, aura éventuellement « lever les blocages institutionnels ».
L’AFB devra contribuer « à la gestion et à la restauration de la biodiversité, au développement des connaissances, ressources, usages et services écosystémiques attachés à la biodiversité, à la gestion équilibrée et durable des eaux et à la lutte contre la biopiraterie ». Elle « apportera son appui scientifique, technique et financier à l’élaboration, à la mise en œuvre et à l’évaluation des politiques de l’Etat et des collectivités territoriales et de leurs groupements menées dans son domaine de compétence. Elle soutient et évalue les actions des personnes publiques et privées qui contribuent à la réalisation des objectifs qu’elle poursuit […] ». Son action portera sur l’ensemble des milieux terrestres, aquatiques et marins des territoires métropolitain et ultramarins.
Elus locaux sous-représentés dans l'agence
Une partie du débat concernant la nouvelle agence a porté sur sa gouvernance. Le projet initial prévoyait un conseil d'administration (CA) de 39 sièges, dont cinq réservés aux représentants des collectivités territoriales, place jugée insuffisante par les élus locaux. L'Association des maires de France, par la voix du député-maire Martial Saddier, a défendu une meilleure représentativité soulignant dans l'hémicycle une incohérence entre un projet de loi sur la transition énergétique qui attribue « une forte ambition et une grande force au bloc local » et ce projet de loi biodiversité qui lui réserve « une représentativité ridicule ».
Cette voix n'a pas porté. Mais la composition du CA a été modifiée avec un nombre de sièges passé à 44 pour assurer la présence de cinq représentants des territoires d'outre-mer. Les députés ont ajouté que la représentation des collectivités territoriales devrait compter « au moins » un représentant de la montagne.
Au chapitre de la gouvernance, les députés ont aussi créé la possibilité pour le Comité national de la biodiversité (CNB) et le Conseil national de la protection de la nature (CNPN) de s'autosaisir. Chaque département d'outre-mer sera désormais représenté au sein de ces deux instances. Le projet de loi prévoit par ailleurs que le CNB se réapproprie les missions du Comité national « trame verte et bleue », tout comme les comités régionaux « trame verte et bleue » deviendront des comités régionaux de la biodiversité. Toutefois, pour ne pas perturber l'élaboration des schémas régionaux de cohérence écologique à laquelle ils contribuent, les comités régionaux pourront attendre avant d'opérer leur mue.
Une exception est prévue pour les départements d'outre-mer, où les comités de bassin pourraient jouer le rôle de comités régionaux de la biodiversité, avant probablement de se transformer en « comités régionaux de l'eau et de la biodiversité ».
Vers une meilleure transparence des politiques de l'eau
Porté par la députée socialiste Delphine Batho, un débat imprévu a fait surface au cours des discussions, aboutissant au vote de plusieurs amendements sur la gouvernance de la politique de l'eau. Les comités de bassins, qui définissent la politique mise en œuvre par les agences de l'eau, pourraient voir leur composition changer, en faveur d'une meilleure représentation des usagers non-économiques. Concrètement, sans toucher à l'équilibre général entre la représentation des collectivités, de l'Etat et des usagers, le nouveau texte impose une égale représentation des usagers non-économiques et des usagers économiques, avec 20% de sièges chacun.
En outre, le texte modifié prévoit, au niveau des agences de l'eau, des mesures garantissant une plus grande transparence de l'attribution des aides financières. Chaque conseil d'administration d'agence devra instaurer une commission des aides dont les délibérations et décisions seront ensuite rendues publiques. De même, être membre du CA d'une agence de l'eau sera désormais incompatible avec d'autres fonctions, définies ultérieurement par décret. Enfin, un membre du CA directement intéressé par une délibération en tant que représentant d'une entreprise, d'une collectivité ou d'une association concernée par la subvention en jeu, ne pourra plus participer aux débats.
En bref
Le principe général de solidarité écologique a été amendé : il « appellera à prendre en compte, dans toute prise de décision publique ayant une incidence notable sur l'environnement des territoires directement ou indirectement concernés, les interactions des écosystèmes, des êtres vivants et des milieux naturels ou aménagés ».
Le principe général de la séquence « Éviter réduire compenser » qui « implique d’éviter les atteintes à la biodiversité et aux services qu’elle fournit ; à défaut, d’en réduire la portée ; enfin, en dernier lieu, de compenser les atteintes qui n’ont pu être évitées et réduites, en tenant compte des espèces, des habitats naturels et des fonctions écologiques affectées » a été renforcé par le fait qu'il devra « viser un objectif d’absence de perte nette, voire tendre vers un gain de biodiversité ».
La dotation de solidarité rurale sera ajustée pour les communes qui ne pratiquent pas l'extinction nocturne mais modulent les puissances installées de leurs équipements en vue de réduire leur facture énergétique à hauteur de 50%. Cela doit inciter les collectivités à lutter contre les pollutions lumineuses nocturnes.
Les bâches publicitaires sur les échafaudages des immeubles classés en travaux seront désormais interdites. L'article du Code du patrimoine qui est ainsi abrogé prévoyait que les recettes de l'affichage devaient être affectées au financement des travaux.