JugementMajoritaire
Depuis plusieurs années, chercheurs et mathématiciens du monde entier planchent sur le mode de scrutin « parfait ». Celui qui permettrait d’éviter que les candidats se lancent dans des tactiques politiciennes (accords avec des petits candidats) et épargnerait aux citoyens de préférer la stratégie électorale (vote utile) à leurs votes de cœur. Et si c’était le jugement majoritaire ? Une expérience a été tentée en avril et mai dernier, au moment de l'élection présidentielle française, par LaPrimaire.org et des chercheurs du CNRS, de Polytechnique et de Paris-Dauphine.
« Notre système électoral actuel est vraiment bizarre, explique David Louapre, chercheur en physique, dans une vidéo diffusée sur Youtube sur les différents modes de scrutin. Vous avez des candidats qui ont de réelles chances de l’emporter, mais qui peuvent être éliminés à cause de la présence de petits candidats proches de leur camp… Imaginez que l’on ait cela en sport ? La finale du 100 mètres se joue entre deux ou trois favoris, mais les petits candidats – ceux qui n’ont aucune chance de gagner – auraient le droit de retenir les meilleurs par le short… Celui qui gagnerait la course ne serait plus celui qui court le plus vite, mais celui qui aura réussi à se faire le moins retenir pas le short. On trouverait cela stupide, non ? »
Tactiques politiciennes et vote utile
De plus, ces « contraintes » électorales conduisent souvent les candidats à passer des alliances entre eux et à mener des tactiques politiciennes que les citoyens rejettent massivement aujourd’hui.
L’autre grief contre le système électoral actuel est le fait que les Français s’adaptent à l'offre politique qui leur est proposée, et deviennent eux-mêmes des « stratèges » des urnes : c’est le vote utile. Au lieu de choisir le candidat leur paraissant le plus apte à gouverner la France, ils votent pour celui qui leur déplaît le moins et semble le mieux placé pour l’emporter…
Des arguments qui incitent nombre de chercheurs et de scientifiques à se poser une question : et si le scrutin uninominal à deux tours ne fonctionnait pas si bien que cela ? Mais alors, quel système de vote devrions-nous adopter ?
Ne plus choisir… mais juger !
Vote alternatif (avec classement des candidats), méthode Condorcet (qui propose de comparer des duels entre candidats) ou notes de 0 à 20 pour départager les candidats, en réalité plusieurs solutions existent déjà, certaines étant même la norme dans d’autres parties du monde.
Parmi ces nouveaux modes de scrutin, le jugement majoritaire a l'air de se détacher. Inventé par deux chercheurs français, Michel Balinski et Rida Laraki, ce système électoral propose non pas de classer les candidats, mais de les juger en leur attribuant une mention allant de « Très bien » à « À rejeter ».
Le citoyen peut ainsi attribuer la même mention à plusieurs candidats et n’est pas forcé de « choisir ». Il s’agit ensuite de calculer la mention majoritaire obtenue par chaque candidat, c’est-à-dire celle qui est approuvée par au moins 50 % de l’opinion. Par exemple, plus de 50 % de la population juge que le candidat X est « Bien », « Très Bien » voire « Excellent ». Celui qui obtient la meilleure mention remporte ainsi l’élection.
Cette méthode innovante a été testée entre avril et mai dernier par le collectif citoyen de la Primaire.org, en partenariat avec le CNRS, Polytechnique et l’université Paris-Dauphine.
Un sentiment d’avoir mieux voté
Plus de 50 000 personnes se sont prêtées au jeu. Si les organisateurs reconnaissent que l’échantillon est « très biaisé à gauche », leurs résultats permettent tout de même de tirer quelques leçons sur cette nouvelle façon de voter.
On découvre ainsi que les candidats Mélenchon et Hamon n’influent pas l’un sur l’autre. Ce qui n’a pas été le cas avec le mode de scrutin officiel, où l’on a parlé de vases communicants. Jean-Luc Mélenchon obtient comme mention majoritaire « Bien » et Benoît Hamon « Assez Bien ».
Au second tour, Emmanuel Macron devance aussi Marine Le Pen, même si sa mention majoritaire est « Insuffisant ». Mais surtout, 95 % des votants estiment que ce mode de scrutin leur a permis de mieux exprimer leur opinion quant aux candidats en présence.
Une leçon à méditer à l’heure où la défiance envers la politique ne cesse de croître. Comme l’abstention d’ailleurs…
grezaud - 29/05/2017 20h:30
Pourquoi ne prend on pas les votes blancs dits ''nul'' dans le décompte des votes? On limiterait l'absentéisme et notre président n'aurait pu être élu ayant obtenu moins de 50% des inscrits.Les électeurs devraient pouvoir refuser de cette façon les candidats qu'ils doivent obligatoirement choisir dans me système actuel.
Répondre au commentaire | Signaler un abus