Jean-Yves Gouttebel : « Les intercommunalités ne pourront assurer la mission de péréquation »

Denis Solignac
Jean-Yves Gouttebel : « Les intercommunalités ne pourront assurer la mission de péréquation »

Jean-Yves Gouttebel, président du conseil général du Puy-de-Dôme

© JodieWay/CG63

A la tête du conseil général du Puy-de-Dôme, Jean-Yves Gouttebel (PRG) indique au courrierdesmaires.fr accueillir favorablement le rattachement de l’Auvergne à la région Rhône-Alpes… tout en condamnant la suppression annoncée du département. Le vice-président de l’Assemblée des départements de France (ADF) pointe du doigt le manque de proximité des politiques publiques menées par les régions et l’incapacité des intercommunalités à assurer, selon lui, la solidarité financière entre territoires.

Courrierdesmaires.fr. Quatorze grandes régions, des départements à terme supprimés… Comment le président de conseil général que vous êtes juge-t-il le redécoupage annoncé ?

Jean-Yves Gouttebel. Il faut aller vers des régions avec un plus fort potentiel démographique. Mais avant de finaliser l’union, il faudrait parler du contrat de mariage, à savoir les compétences : qu’est-ce qu’on veut faire faire à ces régions ?

Pour moi, les choses sont claires : à elles de gérer la compétitivité économique, aux départements la solidarité territoriale, comme le préconisait le rapport Krattinger-Raffarin. Dans le processus de redécoupage actuel, il y a maldonne, d’autant que les choses se sont réglées sur un coin de table…

Comment accueillez-vous la fusion de « votre » région, l’Auvergne, avec Rhône-Alpes ?

J.-Y. G. J’y suis favorable car j’y vois le moyen de raccorder notre territoire à un autre au développement économique important. C’est aussi lié au positionnement du département : les élus sont beaucoup plus partagés dans l’Allier. Mais aussi dans le Cantal, beaucoup plus attiré par le sud-ouest.

Et s’agissant du contenu de la réforme territoriale annoncée ?

J.-Y. G. Je ne peux être satisfait car on ne voit pas qui reprendra les fonctions assumées par les conseils généraux. On reporte leur suppression de 2016-2017 à 2020 car on s’est rendu compte que l’on n’avait pas les moyens de faire une réforme constitutionnelle rapidement. Et cela se passe sans aucune concertation avec les trois grandes associations d’élus.

Les régions ne sont pas de taille à reprendre les routes et collèges ?

J.-Y. G. Dans mon département se trouvent de nombreux collèges, en milieu rural, de moins de 200 élèves. Si la région devait s’en occuper, je crains qu’elle ne privilégie les plus grands des établissements et je m’attends à la suppression, dans le Puy-de-Dôme, de 10 à 15 de ces collèges, pourtant indispensables !

Notre département est 2e au classement de kilomètres linéaires de routes… comment assurer leur entretien à partir de Lyon ?

Quant aux routes, notre département est 2e au classement de kilomètres linéaires de routes, avec de gros enjeux sur la leur viabilité hivernale notamment dans le massif du Sancy. Or, comment assurer leur entretien à partir de Lyon ? Il s’agit de missions de proximité…

Cette proximité ne pourrait-elle être assumée par les intercommunalités appelées à atteindre un seuil de 20 000 habitants ?

J.-Y. G. Dans mon département, Clermont-Ferrand mis à part, vivent 300 000 habitants. Un seuil de 20 000 habitants nous amènerait ainsi à diviser par 2,5 le nombre de communautés de communes.

Peut-être en avons-nous encore beaucoup et faudrait-il avoir un seuil plus significatif qu’aujourd’hui, mais il faut aussi tenir compte des spécificités du territoire ! D’autant plus qu’on vient à peine de finir les redécoupages intercommunaux et qu’il faudrait une réforme constitutionnelle pour les asseoir démocratiquement…

J’ajoute que les intercommunalités ne pourront assurer la mission de péréquation qu’assument les conseils généraux dans les subventions à l’aide sociale. L’esprit de responsabilité et de solidarité risquent de disparaître car demain, ce sera la foire d’empoigne pour se partager des ressources dont on ne sait pas ce qu’elles seront…

Peut-on envisager, voire craindre à l’image de son président, un éclatement de l’Auvergne entre les différentes régions limitrophes ?

J.-Y. G. Il faut que les conseillers généraux, que les responsables des chefs-lieux concernés, que les Clermontois se rapprochent des responsables lyonnais pour éviter d’être marginalisés.

Un éclatement de l’Auvergne est possible, surtout lorsqu’on constate que, d’Aurillac, le trajet est long pour aller à Lyon et que les flux d’Aurillac vont plutôt vers Toulouse…

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