Mandats électifs et emplois familiaux
La loi du 15 septembre 2017 devait rétablir la confiance dans la vie politique. Affectée, sur la question pourtant sensible des emplois dits « familiaux », d’une erreur ridicule, elle ne confortera pas, en tout cas, la confiance du juriste praticien dans le travail du législateur : à trop s’occuper de la sœur de l’ancienne concubine du maire, la bru et le gendre ont été oubliés.
Par Philippe Bluteau, avocat au barreau de Paris, cabinent Oppidum avocats
Etape supplémentaire sur le chemin de la purification des mœurs démocratiques, la loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique interdit aux membres du gouvernement, aux parlementaires et aux autorités territoriales - dont les maires - de compter parmi les membres de leur cabinet trois catégories de personnes, au motif que ces proches seraient, justement, trop proches.
Le maire ne pourra pas recruter, selon les termes exacts du texte de loi : « 1° Son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin ; 2° Ses parents ou les parents de son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin ; 3° Ses enfants ou les enfants de son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin », sauf à encourir une peine de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.
Cinq catégories de personnes visées
Le soupçon légitime de la très exigeante vertu moderne ne s’arrête pas à ce « premier cercle » des membres de la famille. Cinq autres catégories de personnes ne pourront être employées au cabinet du maire (dans les communes de plus de 20 000 habitants) que si la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique en est informée sans délai. Il s’agit de :
- « Son frère ou sa sœur, ou le conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin de celui-ci ou celle-ci ;
- L’enfant de son frère ou de sa sœur, ou le conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin de cet enfant ;
- Son ancien conjoint, la personne ayant été liée à elle par un pacte civil de solidarité ou son ancien concubin ;
- L’enfant, le frère ou la sœur des personnes mentionnées au 3° »
- ou le frère ou la sœur des personnes dont le recrutement est interdit.
Par conséquent et par exemple, il est strictement interdit à un maire de recruter le fils de sa nouvelle épouse. Quant à la sœur de l’ancienne concubine du maire, ou le mari de la nièce du maire, ils ne peuvent être recrutés sans prévenir la haute autorité.
Où sont passés la bru et le gendre ?
En revanche, le directeur de cabinet du maire peut être son gendre, sans interdiction ni formalité. Vous avez bien lu. Nulle part, dans l’énumération des qualités suspectes, ne figurent les conjoints des enfants : ni parmi les personnes interdites de recrutement, ni même parmi celles dont le recrutement est possible mais doit être impérativement déclaré. Est-ce à dire que le gendre de la sœur du maire doit être déclaré, mais pas le gendre du maire ? Oui !
Qu’en est-il donc de la belle-fille du maire ? Tout dépend de laquelle vous parlez : si vous pensez à la fille de sa nouvelle épouse, recruter cette jeune fille est strictement défendu ; mais si vous évoquez la femme de son fils - autrement dit sa bru - alors le recrutement est acquis, car la bru n’est pas mentionnée dans la loi. Achevons : un maire ne peut pas recruter la fille de sa femme, mais il peut recruter la femme de son fils.
Parlementaires, ministres et élus locaux : même oubli !
Ces paradoxes, qui relèvent d’une grossière erreur de plume, fruit d’une négligence coupable du législateur, emporté par l’urgence d’une session estivale, ne se constate pas dans un article de la loi, mais dans trois : l’article 11, relatif aux membres du gouvernement, l’article 14, qui traite des parlementaires, et l’article 15, applicable aux élus locaux, sont tous trois affectés par ce vice. Bien plus qu’une perle du mois pour « Le Courrier des maires », voici le collier de l’année !
francisco49 - 19/01/2018 19h:21
rien ne change dans ce beau pays de France, tous ces gens qui nous gouvernent passent plus de temps à surveiller leur privilege qu'a faire avancer vraiment ce pays
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