Arras : la voiture bienvenue en centre-ville, une question d’attractivité
© Flickr-CC-G.Bavière
Françoise Rossignol, maire de Dainville, vice-présidente mobilité et transports à la communauté urbaine d'Arras (110 000 habitants, Pas-de-Calais), explique les difficultés auxquelles sont confrontés les élus qui souhaitent construire aujourd'hui une offre adaptée à ces territoires.
Pourquoi l'étude publiée par le Gart arrive-t-elle à point nommé selon vous ?
Françoise Rossignol. En tant que chargée des mobilités à la CU d'Arras, j'ai suivi avec intérêt la présentation de cette étude. Je suis chargée d'élaborer le prochain plan de déplacements urbains (PDU) et de nombreuses questions se posent.
Arras dispose d'un bon réseau de bus, bien fréquenté. La voiture entre facilement dans le centre-ville, ce qui est une bonne chose. Le maire d'Arras souhaite éliminer les bus du centre-ville pour laisser davantage de place aux piétons et leur apporter plus de confort.
Quelles alternatives peut-on proposer pour assurer les déplacements en centre-ville ? Faut-il développer les parkings, inciter au covoiturage ? Nous tenons à préserver l'attractivité du centre-ville, notamment à Arras, car il a souffert, nous le constatons tous les jours.
Nous venons d'être retenus dans l'appel à projets « villes respirables ». Dans notre plan pluriannuel d'achat de bus, nous devrions privilégier les bus hybrides, mais leur coût est élevé.
Dans notre intercommunalité, les centres-villes sont peu denses. Il y a un certain nombre de vacances de logements au-dessus des commerces. A Arras, à moins d'un kilomètre du centre-ville, nous sommes déjà dans l'habitat individuel. Se pose le problème de la desserte de tous les quartiers par les bus. Peuvent-ils aller dans les zones résidentielles ? De telles lignes seraient-elles rentables ?
Autre difficulté : nous venons d'être retenus dans l'appel à projets « villes respirables ». Dans notre plan pluriannuel d'achat de bus, nous devrions privilégier les bus hybrides, mais leur coût est élevé.
La loi Notre va agrandir le périmètre de votre intercommunalité. Quelles sont les conséquences en matière de transport ?
F. R. Oui, c'est un autre paramètre avec lequel nous devons composer : la loi va faire passer de 39 à 202 le nombre de communes composant la CU d'Arras. En 2013, nous avons déjà vécu une extension vers le monde rural. A cette occasion, nous avons revu notre système de transport à la demande pour desservir les quinze nouvelles communes.
Dans ce cas, le Gart préconise de s'appuyer sur le transport à la demande pour faire du rabattement vers les bus. Certes, mais s'il doit y avoir plusieurs correspondances, ce n'est pas pratique pour les personnes âgées qui ont du mal à se déplacer.
Les habitants qui entrent dans la CU vont devoir acquitter un niveau d'imposition plus élevé que précédemment ; en contrepartie, ils attendent des services de qualité, en particulier dans l'assainissement et les transports. Ce qui est compréhensible. Or, en même temps, les finances publiques sont à la peine... L'équation n'est pas facile à résoudre.
Nous allons lancer une ligne « Diabolo », en janvier 2016, qui ira directement de chez nous à la gare, avec des horaires correspondant aux heures de passage des TGV.
Quelle est la situation de Dainville, dont vous êtes maire ?
F. R. Nous sommes une commune de 6 000 habitants située en première périphérie d'Arras. Une ligne de bus part de chez nous pour rallier Arras, avec un départ toutes les 30 minutes. Mais la vitesse commerciale laisse à désirer. Les cadres qui prennent le TGV tous les jours pour aller à Lille se rendent à la gare d’Arras en voiture.
Aussi, nous allons lancer une ligne « Diabolo », en janvier 2016, qui ira directement de chez nous à la gare, avec des horaires correspondant aux heures de passage des TGV.
Comme le Gart, je pense que les villes moyennes ne doivent pas forcément suivre le modèle des grandes agglomérations qui ont structuré leur réseau autour d'un tramway ou d'un bus à haut niveau de service (BHNS), car les coûts d'investissement ne sont pas à notre portée.
A Arras, nous n'avons pas opté pour le BHNS ; les coûts d'investissement nous ont laissé songeurs. Nous ressentons le besoin d'imaginer un nouveau modèle de transports dans les villes moyennes.
Mobilité et villes moyennes
L'étude « Mobilité et villes moyennes. Etat des lieux et perspectives » (88 pages, septembre 2015) a été présentée par le Groupement des autorités responsables de transport (Gart) à l'occasion des 25es Rencontres nationales du transport public, qui ont eu lieu à Lyon du 30 septembre au 2 octobre derniers. Elle s'intéresse aux schémas de mobilité les plus pertinents pour les villes moyennes – l'expression recouvrant pour le Gart des agglomérations de 50 000 à 200 000 habitants. L'étude constate que l'usage de la voiture reste pertinent dans ces collectivités et préconise de développer les « voitures partagées », le covoiturage, les parkings-relais, d'inciter les habitants à choisir la marche à pied, et d'améliorer la vitesse commerciale des bus en instaurant des priorités aux feux.
L'étude peut être téléchargée sur le site du Gart.
Joseph D'halluin - 12/10/2015 11h:00
Le résumé de l'étude du Gart laisse songeur... En effet, la voiture individuelle ne risque pas de disparaitre de sitôt du panel des mobilités des villes moyennes, ce n'est pas une raison pour en faciliter l'accès dans un centre-ville, même peu dense. Par ailleurs, l'exemple de la commune de Dainville est intéressant: à moins de 5 km de la gare d'Arras, le vélo représente une solution de mobilité intéressante et crédible, pour peu qu'il y ait un cheminement praticable et sécurisé. Il y là un fort potentiel de report modal de la voiture individuelle vers un mode non-polluant, pour un coût très modéré et une visibilité nationale. Il est grand temps que les villes petites et moyennes se saisissent de cet outil.
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