Grand Paris carte
© IAU-Idf 2013
Les élus de la mission de préfiguration du Grand Paris ont rendu leur copie à Manuel Valls qui, à l'issue d'un comité interministériel, le 13 octobre, leur a partiellement donné raison.
L’article 12 de la loi Maptam créant le Grand Paris, pourtant adopté par le Parlement en décembre 2013, n’avait cessé de provoquer l’opposition de la plupart des élus concernés par la création de la Métropole du Grand Paris. Il s’agissait en effet d’un amendement gouvernemental, quasi imposé. Principaux points de crispation : la disparition des intercommunalités, remplacées par des « territoires » de 300 000 habitants sans fiscalité propre.
Mission de préfiguration
Afin de lever le blocage, une mission de préfiguration a été chargée de proposer des amendements au texte.
Mission accomplie, non sans mal, avec un texte présenté au Premier ministre, Manuel Valls, le 8 octobre, avant un conseil interministériel consacré au Grand Paris, le 13 octobre.
Les positions des élus membres de la mission de préfiguration étaient loin de converger à l’origine. Pour les uns, à la suite de Patrick Devedjian, il n’était pas question d’accepter des territoires sans autonomie fiscale. Pour d’autres, de droite comme de gauche, territoires et métropoles doivent avoir un statut et une part de fiscalité, sans aller jusqu’à l’autonomie, « ligne rouge » à ne pas franchir avait prévenu Manuel Valls.
Les élus de la mission de préfiguration se mettent finalement d’accord pour garantir des ressources aux territoires, pour respecter la création de la métropole au 1er janvier 2016 mais aussi pour demander une montée en puissance progressive dans la constitution de la métropole jusqu’en 2020 afin de prendre le temps de définit l’intérêt métropolitain et un partage de la fiscalité entre métropole et territoires. Le délai supplémentaire permettra aux territoires d’harmoniser les politiques et les services.
Intégration raisonnée
L’exposé des motifs de la proposition de la mission de préfiguration défend le principe d’une « intégration raisonnée », prenant le temps de la construction. Avec un brin de résignation, le texte reconnaît que « comme dans toutes les intercommunalités », les élus locaux doivent apprendre « à bâtir des majorités de projet ».
Plus précisément, la mission propose de mettre en place une architecture à trois niveaux, commune, territoire et métropole, et de doter territoires et métropole d’un statut juridique, de compétences définies et de ressources garanties pour les exercer.
Pour la métropole est prévu un statut d’EPCI à fiscalité propre à statut particulier, les territoires de la métropole étant dotés du même statut. Ce qui signifie, en clair, qu’une commune appartiendra à deux EPCI en même temps, ce qui demandera une loi pour l’autoriser.
La métropole serait bien créée au 1er janvier 2016. Suivrait un transfert progressif des compétences à la métropole jusqu’à fin 2017. Un système contractuel serait mis en place entre la métropole et les territoires, aboutissement d’une construction progressive lors de conférences périodiques entre la métropole et les territoires.
L’intérêt métropolitain définissant quelles actions relèvent de la métropole ou des communes étant déterminé au plus tard le 1er janvier 2018, il s’ensuit que les transferts peuvent être partiels et évolutifs.
La proposition des élus prévoit que la fiscalité économique sera répartie entre la métropole et les territoires. A la métropole, l’ensemble de la DGF et le produit de la CVAE. Aux territoires, le produit de la CFE ainsi que les taxes dédiées et la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle. L’ex-part départementale de la TH est reversée aux territoires (sauf si les communes décident, dans certaines conditions, de l’attribuer aux communes).
Dans le domaine de la planification stratégique, il était prévu un PLU tenant lieu de Scot, intégrant les plans de secteur élaborés par les territoires. La mission le remplace par un Scot métropolitain et des PLU de territoire compatibles avec le Scot. L’objectif des élus entraînés par Patrick Devedjian étant de maintenir les compétences de proximité et d’éviter le cas de figure prévu par l’article 12 d’origine : une remontée des compétences à la métropole qui ensuite les délégueraient aux territoires.
Afin de lutter contre les inégalités territoriales, la mission envisage la création par la métropole d’un fonds de soutien à l’investissement disposant de ressources significatives et d’une aide apportée aux communes et territoires bâtisseurs.
Accord partiel de Manuel Valls
Le 13 octobre, à l’issue d’un comité interministériel sur le Grand Paris, Manuel Valls n’allait pas franchement dans le sens de toutes les préconisations des élus.
S'il a pris "acte du vote" des élus et admis tant la nécessité d'une "plus forte progressivité dans la mise en œuvre des compétences de la métropole" qu'une certaine autonomie fiscale des territoires qui la composeront, il a appelé à ne pas perdre "de vue les principes de la réforme territoriale".
"Les Français et les habitants du Grand Paris ne comprendraient pas la création d'un échelon supplémentaire, alors que cette réforme vise la simplification ; ils ne comprendraient pas non plus que l'objectif d'harmonisation fiscale et de solidarité soit mis de côté. La création de la Métropole doit permettre à terme le transfert de l'ensemble de la fiscalité économique", a-t-il asséné. Il concède cependant que les territoires doivent être dotés d’une ressource dynamique et qu’une réflexion peut s’engager autour de la CFE. Ce qui revient à franchir la ligne rouge posée par le gouvernement.
M. Valls a conclu ce chapitre en soulignant l'« évidence » d'une disparition, déjà évoquée par son prédécesseur, Jean-Marc Ayrault, des conseils généraux à l'horizon 2020, "ici sans doute plus qu'ailleurs".
Dans un registre plus consensuel, M. Valls a affirmé son ambition de construire une métropole "dynamique, mais aussi solidaire", "innovante et inclusive". "Le Grand Paris ne se construira pas en ‘’clusters’’ (pôles économiques) spécialisés", a déclaré le ministre, se démarquant de la vision portée par Christian Blanc sous la présidence de M. Sarkozy.
Un nouveau comité interministériel sur le Grand Paris sera réuni au premier semestre 2015, afin de traiter les enjeux sociaux, culturels, sportifs et de transition énergétique.
Quant à l'article 12 réécrit, il sera examiné lors de la discussion sur le projet de loi de nouvelle organisation de la République (Notre), qui devrait avoir lieu début décembre au Sénat.
Les décisions du comité interministériel
Le comité interministériel s’est également prononcé sur la mobilité, l’aménagement et le logement et le développement économique.
Mobilité
Dans le cadre du Nouveau Grand Paris des transports, 32,5 milliards d’euros seront investis par l’Etat, le conseil régional et les autres collectivités locales, ce qui devrait générer 15 000 emplois par an durant les travaux de construction des nouvelles lignes du Grand Paris Express (200 km de lignes et 69 gares) et de modernisation du réseau existant.
La région Ile-de-France disposera d’une recette affectée de 140 M€ par an et l’Etat apportera, pour la période du contrat de plan 2015-2020, 1,4 Md€.
Logement
- Sans attendre, l’Etat propose de nouveaux outils d’aménagement afin de dépasser les 70 000 nouveaux logements par an.
- Plus de 40 grandes opérations d’aménagement sont identifiés sur des territoires à fort potentiel de création de logement.
- La création d’une opération d’intérêt national multi-sites permettra, en concertation avec les collectivités, de débloquer des situations complexes.
- L’Agence foncière et technique de la région Ile-de-France sera transformée en Grand Paris aménagement. Elle associera mieux les collectivités locales.
- Au printemps 2015 sera créé l’Etablissement public foncier unique d’Ile-de-France, fusion des 4 établissements existants.
- Une aide aux maires bâtisseurs sera débattu dans le cadre de la loi de finances 2015.
Développement économique
- Les 7 pôles de compétitivités seront mieux utilisés.
- L’accessibilité des aéroports et gares TGV sera améliorée.
- L’implantation d’entreprises étrangères sera facilitée.
- Une marque Grand Paris sera développée, grâce à un système de gouvernance économique cohérent.
- La candidature du Grand Paris à l'Exposition universelle 2025 sera soutenue.