L'agglomération parisienne
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La Métropole du Grand Paris sera officiellement créée le 1er janvier 2016. Une dizaine de contrats de développement territorial (CDT) sont déjà signés incluant des projets d’aménagements et de constructions autour des futures gares. Plusieurs problèmes doivent cependant être réglés en 2015 qui sera une année « capitale ».
Stabilisation institutionnelle de l’EPCI, financement des investissements dans un contexte budgétaire contraint, simplification des outils d’aménagement et des circuits de décision… Ces trois dossiers sont au cœur du vaste chantier dont les aspects ont été abordés, le 4 décembre, lors d’un débat sur la future Métropole organisé dans le cadre du SIMI.
La stabilisation institutionnelle et politique
Coprésidée par le préfet de la région Ile-de-France et le président de Paris Métropole((Le nouveau président sera élu le 19 décembre et succédera à Daniel Guiraud, lire article.)), la Mission de préfiguration du Grand Paris((Site de la Mission)) est en pleine discussion avec le gouvernement et les parlementaires.
Objectif, traduire dans les prochaines semaines, sous la forme d’un amendement au projet de loi relatif à la nouvelle organisation territoriale de la République (Notre), la modification de l’article 12 de la loi Maptam du 27 janvier 2014.
Le conseil des élus de Paris Métropole a en effet acté, le 14 novembre, la traduction législative de sa résolution du 8 octobre qui bouleverse l’économie générale de cet article 12. La résolution prévoit notamment la mise en place d’une architecture institutionnelle à trois niveaux : communes, territoires et métropole. Elle dote les territoires et la métropole du statut d’EPCI, de compétences définies et de ressources garanties pour les exercer.
Les élus de la mission de préfiguration demandent aussi une montée en puissance progressive dans la constitution de la métropole jusqu’en 2020 afin de prendre le temps de définir l’intérêt métropolitain et un partage de la fiscalité entre métropole et territoires.
Je fais confiance aux élus pour que, dès l’an prochain, l’activité économique prime sur la construction politique.”
François Lucas, directeur de la Mission de préfiguration du Grand Paris
Le temps presse pour inscrire ces évolutions dans la loi puisque le Sénat entamera, le 16 décembre, la discussion générale sur le projet de loi "Notre"((Le projet de loi "Notre")). « Nous préfigurons une loi que l’on va réécrire en partie dans les six prochains mois !, a résumé François Lucas, directeur de la Mission. Nous préfigurons ce qui n’existe pas encore sur le plan institutionnel -une Métropole créée en janvier 2016-, alors que de nombreux projets d’acquisitions foncières et d’aménagement sont d’ores et déjà lancés. C’est un peu normal car le législateur a privilégié les projets en différant les questions relatives à la gouvernance politique ».
Un écueil doit cependant être évité : « Qu’il ne passe rien d’ici à janvier 2016, a averti François Lucas. Mais je fais confiance aux élus pour que, dès l’an prochain, l’activité économique prime sur la construction politique ».
Le conseil métropolitain pléthorique (225 élus !) ne facilitera pas la tâche. Mais François Lucas reste confiant : « Je n’ai qu’un souhait : que la loi “Notre” soit votée au printemps 2015 et les territoires installés à l’été sans conflit entre les élus ».
La Mission de préfiguration remettra en janvier 2016 au président de la Métropole plusieurs rapports « qui permettront aux élus de définir l’intérêt métropolitain, de préparer le pacte financier et fiscal avec les territoires et les communes, et d’engager dix à quinze projets ». Elle achèvera ses travaux au plus tard le 31 juin 2016.
Le financement des investissements
Avec la stabilisation institutionnelle de la Métropole, c’est le deuxième défi à relever pour le Grand Paris. Philippe Yvin, président du directoire de la Société du Grand Paris (SGP), a résumé l’enjeu : « 2015 sera une année charnière au terme de laquelle je souhaite que soient engagés l’ensemble des investissements », a-t-il lancé (32,5 milliards d’euros sont prévus pour le volet mobilité financés par l’Etat, la région et les collectivités).
« La priorité, c’est que la Métropole se développe sur ses quatre piliers : les transports -avec le Grand Paris express et le plan de mobilisation régional-, le développement économique, la création de logements, et la gouvernance, même si celle-ci ne sera pas parfaite et mettra quelque temps à se stabiliser », a souligné Philippe Yvin.
Les élus ne doivent pas sacrifier leur budget d’investissement. Nous sommes à leurs côtés pour soutenir leurs projets même si les délais d’amortissement avoisinent 20 à 40 ans.”
Catherine Pérennet, directrice régionale Ile-de-France de la Caisse des dépôts
La conclusion de contrats de développement territorial (CDT) autour des 69 gares qui desserviront les 200 kilomètres du métro automatique, à l’horizon 2030, est essentielle. Elle nécessite de fédérer élus locaux, aménageurs, promoteurs, bailleurs dans un contexte financier tendu pour les collectivités.
«Les élus locaux devront faire preuve de courage car dans les prochaines années il sera très difficile d’être un maire bâtisseur vu la contraction des ressources », a souligné Gilles Bouvelot, directeur général de l’Etablissement public foncier d’Ile-de-France. « Les élus ne doivent pas sacrifier leur budget d’investissement. Nous sommes à leurs côtés pour soutenir leurs projets même si les délais d’amortissement avoisinent 20 à 40 ans », a affirmé Catherine Pérennet, directrice régionale Ile-de-France de la Caisse des dépôts.
Une dizaine de CDT ont été signés entre 2013 et 2014 et la SGP a identifié une trentaine de projets. La Caisse visite actuellement un à un l’ensemble des maires des 124 communes du Grand Paris pour étudier la faisabilité des projets.
« La Caisse est également le “front office” de la Banque européenne d’investissement (BEI) qui cofinance des programmes, a indiqué Catherine Pérennet. Nous allons aussi mobiliser des fonds souverains sur les projets du Grand Paris. Après une année 2014 difficile pour la Métropole, liée à la réforme territoriale et aux élections municipales, 2015 doit être l’année des investissements ! »
La simplification des outils et des circuits de décision
C’est le troisième problème du Grand Paris. « Les établissements publics de l’Etat doivent coordonner leur action et être au service des collectivités et de leurs projets », a estimé Philippe Yvin. Dans cet esprit, la SGP et l’EPF Ile-de-France ont signé, le 4 décembre, un partenariat((Lire le communiqué)) pour coordonner, accélérer et rationaliser leurs interventions foncières dans le cadre de la réalisation du Grand Paris Express.
Gilles Bouvelot a aussi indiqué que « le conseil d’administration de l’établissement public foncier unique sera créé par décret prochainement, et la structure sera opérationnelle fin 2015 ». En juin dernier, il avait remis au gouvernement un rapport portant sur la fusion des EPF de l’Etat en Ile-de-France d’ici au 31 décembre 2015. Objectifs : simplifier et de mieux coordonner l’action de l’Etat et des collectivités locales dans la maîtrise du foncier pour créer des logements. Et accompagner les projets d’aménagement des collectivités notamment aux abords des futures gares du Grand Paris, en facilitant la réservation des emprises foncières nécessaires et en luttant ainsi contre les risques de spéculation.
Le Grand Paris pourrait pâtir d’une dispersion des outils opérationnels d’aménagement, de la taille trop petites des offices HLM, du grand nombre et de la dispersion des SEM locales.”
Philippe Yvin, président du directoire de la Société du Grand Paris
« Des terrains, il y en a. Ce ne sont plus des friches industrielles mais des tissus complexes parfois déjà occupés. Ce qui manque, ce sont les droits à construire, autrement dit l’adoption des plans locaux d’urbanisme » par les futurs territoires, a également souligné Gilles Bouvelot. Et leur compatibilité avec le Scot métropolitain. « Il faut éviter de perdre deux ou trois ans de procédures, a insisté François Lucas. C’est pourquoi nous avons décidé de ne pas soumettre à enquête publique le plan métropolitain pour l’hébergement et l’habitat qui doit être lancé rapidement. »
Faciliter la maîtrise foncière, raccourcir et alléger certaines procédures d’urbanisme, la simplification passe aussi par une mutualisation des outils d’ingénierie, une unification des guichets d’aides aux entreprises et une structuration des acteurs.
« Le Grand Paris pourrait pâtir d’une dispersion des outils opérationnels d’aménagement, de la taille trop petites des offices HLM, du grand nombre et de la dispersion des SEM locales. Ils faut des outils puissants et coordonnés pour développer la Métropole », a estimé Philippe Yvin.
« N’allons pas recréer au niveau métropolitain des outils qui existent déjà au sein des communes et des EPCI, a cependant prévenu François Lucas. Tout l’enjeu sera de coordonner des acteurs publics et privés à l’échelle d’une métropole de 12 millions d’habitants sur des projets macro mais aussi des réalisations infra-communales. »