François Hollande à La Courneuve
En déplacement à La Courneuve le 20 octobre, François Hollande a officialisé la création prochaine d’une agence de développement économique des territoires. France entrepreneur aura pour mission à partir de janvier 2016 d’accompagner les créateurs d’entreprise dans les territoires fragiles de la politique de la ville comme des zones de revitalisation rurale afin de pérenniser leur activité. Davantage qu’une superstructure nationale, l’agence devra mutualiser les réseaux existants.
Le développement économique doit être partout, sinon il ne sera nulle part, parce qu’on ne peut avoir une France disparate, incohérente, qui serait un puzzle dont on ne verrait pas l’unité. »
Huit mois après une annonce qui avait surpris les élus locaux mais les avait aussi intrigué tant elle était sibylline, l’agence de développement économique des territoires va donc bien être créée. C’est à nouveau François Hollande lui-même qui est venu la présenter le 20 octobre à La Courneuve à l’occasion d’un déplacement dédié.
France entrepreneur, puisque c’est ainsi que sera baptisée l’agence, interviendra prioritairement auprès des créateurs d’entreprise implantés dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.
La raison ? « Dans les quartiers de la politique de la ville, signe de vitalité, il y a deux fois plus de créations d'entreprises qu’ailleurs. Mais au bout de trois ans, il y a aussi trois fois plus de créateurs qui déposent le bilan qu’ailleurs… », a rappelé le chef de l’Etat, y voyant non « pas un défaut de talent, mais un manque d’appui, d’accompagnement du créateur qui provoque, hélas, cet échec ».
L’un des objectifs assignés par François Hollande à la future agence sera d’ailleurs de « multiplier par quatre le nombre de ces créateurs issus de ces territoires pour atteindre 20% au lieu de 4% aujourd’hui ».
Les prérogatives régionales épargnées
Alors que le rapport préfigurant l’agence n’a jamais fait l’objet d’une présentation officielle, le chef de l’Etat dit avoir fait sienne les préconisations de leurs auteurs, et notamment de la présidente de région Marie-Guite Dufay((Celle-ci étant en campagne pour présider la future région Bourgogne-Franche-Comté, ce qui explique probablement la discrétion de la remise du rapport.)). Telle cette idée d’une agence dont le credo – « Accompagner les créateurs d’entreprise dans les territoires fragiles » – s’appliquera aussi aux territoires en déprise économique en milieu rural, principalement les zones de revitalisation rurale (ZRR).
Nul doute que la présidente de région aura aussi pesé de son expérience pour obtenir que l’agence ne vienne qu’a minima marcher sur les plates-bandes des régions et de leurs responsabilités, tout juste renforcées par la loi Notre sur le développement économique. Ainsi, « cette agence offrira aux régions, indispensables pour le développement économique, un interlocuteur national unique », les a rassuré François Hollande.
La structure même de France entrepreneurs ne devrait pas non plus les inquiéter, le chef de l’Etat évoquant « une structure nationale légère : il ne s’agit pas d’ajouter de l’administration à l’administration, une trentaine de personnes s’appuiera sur des organisme professionnels, les chambres de commerce, les chambres de métiers, les experts comptables ».
Une structure souple pour mutualiser l'existant
Pas d’organisme d’Etat tentaculaire à craindre donc pour les 13 nouvelles grandes régions d’autant que France entrepreneurs s’appuiera sur de l’existant, et notamment l’association pour la création d’entreprise (APCE), « reprenant son personnel existant ainsi que certains de ses outils comme son site internet » pour « éviter la création d’une structure supplémentaire et pour optimiser au mieux les coûts de fonctionnement » a ainsi indiqué la Caisse des dépôts.
« Elle va mutualiser, fédérer les moyens de l’Etat, de la Caisse des dépôts », a précisé François Hollande, l’Etat et la CDC co-détenant l’agence à parité. Et visera davantage à mutualiser les moyens existants qu’à créer une superstructure puisqu’elle « demandera à tous lesgrands réseaux qui soutiennent la création d’entreprise – l’Adie, les boutiques de gestion, France active, Initiatives France, le réseau entreprendre, de travailler ensemble », a insisté le locataire de l’Elysée.
« Un ensemblier qui va servir à coordonner au niveau national les actions locales au service des entrepreneurs et en faveur du développement économique des territoires », confirmait le patron de la CDC, Pierre-René Lemas.
Des effets secondaires attendus sur l'emploi
Au-delà de l’amorçage des entreprise, l’agence aura comme objectif prioritaire d’« accompagner les entreprises tout au long du développement, pas simplement au moment de la création, mais là où se font les choix, l’investissement, l’embauche, l’exportation », a insisté le chef de l’Etat, reprenant là aussi une des idées fortes du rapport co-rédigé par Marie-Guite Dufay et l’entrepreneur Abderzak Sifer.
« Des rendez-vous de bilan toutes les années de la vie de l’entreprise seront mis en œuvre des 2016 », tandis que l’ordre des experts-comptables sera mis à contribution : « 8000 experts se sont manifestés pour aider les créateurs à monter leurs plans de financement », a assuré le chef de l’Etat.
Sans surprise, l’exécutif attend de France entrepreneurs un retour sur investissement sur l’emploi. « L’agence accompagnera le créateur dans la démarche d’embauche. D’ici 2017, 10 000 entrepreneurs qui ont le potentiel pour créer de emplois, et qui sont pour l’instant réticents à le faire, seront identifiés et appuyés pour leur premier recrutement », a précisé François Hollande.
Enfin, l’agence aura aussi pour mission de « former les entrepreneurs aux nouvelles technologies » et lancera pour ce faire « un appel à projet dès février pour financer les formations numériques tournées vers l’entrepreneuriat ».
Un budget initial de 110 millions d'euros
Question moyens, l’Elysée annonce une enveloppe globale de 110 millions d’euros composée :
- d’une dotation de 60 millions d’euros qui financeront l’action des grands réseaux associatifs ;
- et de 50 millions d’euros issus du programme d’investissement d’avenir pour apporter les fonds propres nécessaires aux projets des créateurs.
Enfin l’agence, « pour assurer l’accompagnement d’autres chefs d’entreprise », sera dotée d’« un comité d’orientation stratégique qui épaulera les salariés de l’agence », a précisé le chef de l’Etat. Comité qui sera présidé par l’entrepreneur montpelliérain Mohed Altrad, président du groupe éponyme.