Tirelires
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Furieuse d’avoir vu l’Assemblée nationale repousser un amendement accroissant la part de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) revenant aux régions, l’Association des régions de France pointe du doigt « deux poids deux mesures dans le traitement des collectivités locales ». Et l’ARF d’énumérer les mesures fiscales ou de dotations favorables aux autres échelons de collectivités…
Il aura suffi d’un micro-évènement lors de la discussion le 13 novembre du projet de loi de finances pour 2015 pour susciter la colère de l’Association des régions de France. En cause : l’abandon d’un amendement du député Joël Giraud (Radical, Hautes-Alpes) préconisant d’attribuer à terme 70% du produit de la cotisation sur la valeur ajoutée (CVAE) aux seules régions, le reste (30%) étant alors fléché aux communes et aux intercommunalités. Mais devant l’opposition de la rapporteure générale, le député-maire de L'Argentière-la-Bessée a finalement accepté de retirer son amendement.
Car Valérie Rabault a pointé du doigt les conséquences d’un tel amendement pour les autres niveaux de collectivités : « Comme je vous l’ai déjà fait remarquer en commission, vous proposez, monsieur Giraud, ni plus ni moins que de supprimer les départements ! […] Vous suggérez en effet de leur enlever une grande partie de leurs ressources, puisqu’ils perçoivent aujourd’hui 48,5% du produit de la CVAE », a-t-elle rappelé.
Un rejet « incompréhensible » pour l’ARF
Et si le secrétaire d’Etat au budget Christian Eckert n’a pas nié que le Premier ministre avait promis au congrès des régions de France d’accorder aux régions « une fiscalité dynamique et adaptée à leurs missions », il a préféré renvoyer le projet à une « prochaine loi de finances ». « Le gouvernement souhaite associer les élus à la réflexion sur la répartition des ressources fiscales, qui dépendra aussi de l’avenir que le Parlement réservera aux départements […] Il me paraît prématuré de prendre une décision à ce stade, car celle-ci aurait les conséquences que vient d’évoquer votre rapporteure générale », a justifié le ministre pour se déclarer défavorable à l’amendement.
Autant d’arguments qui ne convainquent pas l’ARF qui déplorait dès le lendemain, dans un communiqué, l’abandon de cette disposition qui aurait permis aux régions de toucher 40% de la CVAE en 2015, 55% en 2016 pour atteindre 70% dès 2017.
Martelant à nouveau que « les régions sont les plus pénalisées par la baisse des dotations de l’Etat étant donné qu’elles ne disposent d’aucun levier fiscal pour compenser en tout ou partie cette perte de ressources », l’ARF juge « incompréhensible de constater que tous les autres échelons de collectivités ont obtenu des mesures compensatoires et/ou de nouvelles ressources fiscales » dans le PLF 2015.
Tous pourvus sauf les régions ?
Et l’association d’énumérer ces dispositions favorables aux autres niveaux d’administration locale, quitte à mélanger fiscalité octroyée par l’Etat, dotations, fonds de soutien et hausses « automatiques » des fiscalités locales :
- « la revalorisation de 0,9% calée sur l’inflation des bases de la fiscalité locale (taxe d’habitation, taxes foncières) va se traduire par une hausse du produit fiscal non négligeable (450 millions d'euros environ) pour le bloc communal et les départements ;
- la péréquation verticale a été renforcée (dotation solidarité urbaine, dotation solidarité rurale) pour partie avec les ressources des régions (allocations compensatrices) ;
- un fonds de soutien à l’investissement local a été mis en place mais il exclut les régions de ses bénéficiaires ;
- la majoration exceptionnelle des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) des départements a été pérennisée ;
- enfin, 140 millions d'euros de fiscalité nouvelle (sur les entreprises) ont été débloqués dans le cadre du Grand Paris ».
Et contrairement au secrétaire d’Etat au budget, l’ARF juge que le PLF 2015 « constitue la dernière opportunité pour les doter d’un portefeuille de ressources fiscales leur permettant d’être encore plus efficaces ». Il faudra pourtant attendre une autre loi de finances.
Or, même le second projet de loi de finances rectificative pour 2014 présenté en Conseil des ministres dès le 12 novembre ne semble pouvoir accueillir un amendement en ce sens, tant l'exécutif conditionne le débat et l'adoption d'une telle mesure à l'adoption du projet de loi NOTR sur les compétences des régions. Un texte dont l'adoption ne se fera pas, au mieux, avant mars 2015.