Faut-il transmettre aux élus locaux les infos du renseignement sur les fichés « S » radicalisés ?

Aurélien Hélias
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elvis 45 - 20/06/2018 13h:49

que de précautions pour des individus qui n'ont dans la tête que de détruire la France, que d'élus qui se mobilisent pour les défendre bien plus que défendre les Français eux mêmes, alors que ce sont ces mêmes Français qui votent pour eux, ce n'est rien d'autre qu'une trahison, j'espère q'un jour la facture des trahisons arrivera pour tous ces traitres

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RB - 20/06/2018 13h:57

Globalement, Des personnes sont fichés sans qu'elles en aient connaissance. Les maires pourraient avoir accès à ce fichier et prendre des mesures négatives à l'égard des ces personnes. Quels recours ont ces personnes contre ces mesures ? Et surtout, où l'état de droit dans tout cela ?

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Faut-il transmettre aux élus locaux les infos du renseignement sur les fichés « S » radicalisés ?

Prévention de la radicalisation

© Adobe/sk-design

Depuis quelques années, une poignée d’élus militent pour avoir accès aux fichiers du Renseignement. Il y a deux semaines, Emmanuel Macron faisait un geste en leur direction, avant finalement de se raviser. Cette épineuse question soulève beaucoup d’interrogations, tant chez les élus que chez les spécialistes.

C’est au milieu de son long discours sur les banlieues, le 22 mai dernier, qu’Emmanuel Macron a ouvert une brèche. Évoquant les « polémiques » mais aussi les inquiétudes « légitimes » de certains élus, le Président de la République avait en effet promis la mise en place d’un « protocole très clair » d’échange entre les préfets et les maires autour des personnes recensées au Fichier des signalements pour la prévention et la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT).

Ce fichier regroupe les noms de 20 000 personnes. Des radicaux religieux susceptibles de mener une attaque terroriste. Ces derniers sont classés dans trois catégories selon le degré de dangerosité : les « pris en compte » (11600 personnes), les « en veille » (3500 personnes) et les « clôturés » (4600 personnes). Un geste présidentiel qui répondait aux demandes récurrentes de certains élus depuis les attentats de 2015. Que ce soit le maire LR d’Evreux, Guy Lefranc, ou celui PS d’Aulnay-sous-Bois, Bruno Beschizza, ces édiles plaident en effet pour avoir « le droit de savoir » ce qui se passe sur leur communes « pour mieux protéger leur population ».

Savoir... et après ?

Un point de vue qui est loin de faire l’unanimité au sein des élus locaux. Gaël Perdriau, maire LR de Saint-Etienne, préside également la commission sécurité de l’association France Urbaine. « À l’association, nous considérons que la surveillance des individus supposés dangereux fait partie des missions régaliennes de l’État et non celles des polices municipales. Les maires n’ont pas les moyens de surveiller - ni le droit d’ailleurs - des habitants de la ville pour présumer de projets terroristes … Soyons clairs : quand bien même je saurai que Monsieur X, habitant dans telle rue, est fiché au FSPRT, que voulez-vous que je fasse de cette information ? ».

[caption id="attachment_76019" align="alignright" width="240"] Virginie Gautron, pénaliste et maître de conférence à l’Université de Nantes[/caption]

Un point de vue pragmatique qui rejoint celui de Virginie Gautron, pénaliste et maître de conférence à l’Université de Nantes, spécialiste des fichiers du Renseignement. « Cela pourrait même être totalement contre-productif pour les maires, car ils pourraient être mis en cause par leur population s’il venait à arriver quelque chose… Les gens se diront : ‘le maire savait mais il n’a rien fait’. Et ce alors que les élus locaux n’ont pas les moyens d’agir » pointe la chercheuse.

Mais elle estime surtout que cette transmission plus large des informations pourrait causer des torts, tant au travail des agents du renseignement qui surveillent ces individus, qu’à la notion de vivre-ensemble. « Certains élus pourraient en effet en faire un très mauvais usage. Ils pourraient mettre la puce à l’oreille aux personnes fichées et ruiner le travail de surveillance, mais aussi discriminer ces personnes dans l’accès à un logement social par exemple, et ce alors que pour certaines, il n’y a aucune preuve d’un engagement terroriste », plaide la juriste.

Vérification avant l’embauche ?

Dans ce sens, Virginie Gautron estime d’ailleurs que la validation par la préfecture des CV avant l’embauche des agents municipaux contreviendrait au droit. « Dans quelle mesure, pourra-t-on justifier un refus de recrutement sur la base de comportements – comme ne pas serrer la main aux femmes- qui ne sont pas, en l’état actuel du droit, des infractions ? » interroge-t-elle.

[caption id="attachment_63222" align="alignleft" width="300"] Gaël Perdriau (à g.), Jean-Luc Moudenc (France urbaine), Bernard Cazeneuve, alors ministre de l'Intérieur, et François Rebsamen signaient en juillet 2016 un partenariat pour prévenir la radicalisation.[/caption]

Une position que, sur ce point précis, rejette le maire de Saint-Etienne. Pour lui, ce lien avec le préfet avant embauche, à défaut de transmission des noms de tous les fichés de la commune, serait en revanche le « bon niveau de coopération » avec les services de l’État. « Avec le fichier FSPRT, on parle de personnes radicalisées qui sont susceptibles de passer à l’acte ! C’est suffisamment sérieux pour que les Renseignements estiment nécessaire de faire un suivi. Moi je ne prendrai pas le risque de recruter quelqu’un présent dans ce fichier. C’est, à mes yeux, un argument suffisant et non victimisant » assume Gaël Perdriau qui espère donc que « ce dialogue pré-embauche » avec le préfet sera retenu dans le futur dispositif gouvernemental.

En effet, quelques jours après son discours offensif, le chef de l’État est revenu sur son ambition initiale d’ouvrir le fichier FSPRT aux maires, pour revenir à une position plus consensuelle de transmission au « cas par cas des informations », sans que l’on ne sache pour le moment les contours exacts de cette future coopération.

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