Et si « on » en faisait plus pour les quartiers ? L’appel de France urbaine et de l’ADCF à l’Etat

Aurélien Hélias
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utilité sociale - 08/04/2018 12h:10

Enfin une approche réaliste!! Il faut passer au actes!merci Mr Borloo,cela urge! urge!

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gilloum57 - 10/04/2018 10h:54

Faire plus pour les quartiers!!!!! Quand l'ETAT DE DROIT aura repris ces quartiers, il sera largement temps d'investir dans les cités!! Regardez les belles voitures qui circulent dans les ZONES DE NON DROIT, alors pourquoi donner de l'argent? Faites un travail de fond, récupérez ces véhicules achetés avec "la drogue" et vous aurez les moyens de vos ambitions. cordialement

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Et si « on » en faisait plus pour les quartiers ? L’appel de France urbaine et de l’ADCF à l’Etat

Jean-Louis Borloo le 6 avril à Dijon lors des journées de France urbaine

© France urbaine

Appuyés par Jean-Louis Borloo, missionné par le chef de l’Etat pour un renouveau de la politique de la ville, les deux associations d’élus ont présenté le 6 avril à Dijon leur « Pacte » dans lequel métropoles et intercommunalités souhaitent s’engager sur trois dossiers prioritaires – éducation, santé, police / justice – pourvu que l’Etat fasse de même. L’ex-ministre de la Ville demande lui un « big bang » institutionnel et des moyens financiers massifs.

A l’heure où plusieurs maires de banlieues ne cachent plus leur ras-le-bol vis-à-vis de l’inefficience de la politique de la ville et de l’abandon supposé de l’Etat, ne comptez pas sur France Urbaine et l’AdCF pour se joindre aux gémonies médiatiques. Les deux associations d’élus urbains s’inscrivent en faux contre le procès intenté à une politique qui, à les entendre, n’a pas « démérité. De véritables reconquêtes ont eu lieu » vantent-ils dans leur « Pacte de Dijon » dévoilé dans la cité Bourguignonne ce 5 avril à l’occasion des Journées de France urbaine. Et les deux associations d’élus d’insister sur ces défis remportés, au rang desquels « l’intégration socio-économique et même culturelle de nombreuses familles ou personnes accueillies un temps dans ces quartiers. Il convient de penser ce que seraient devenus ces territoires sans les considérables efforts qui ont été accomplis par les pouvoirs publics et leurs partenaires. »

Pour une politique de la ville clairement intercommunale

Pour autant, l’AdCF et France Urbaine ne se font pas d’illusions sur l’« essoufflement » de la politique de la ville aujourd’hui confrontée à d’immenses défis tels que le « repli communautaire et confessionnel. » Alors, que faire ? Dans leur manifeste commun, leurs présidents Jean-Luc Rigaut et Jean-Luc Moudenc affirment que les intercommunalités qu’ils représentent – devenues des « autorités organisatrices des politiques locales de l’habitat, des mobilités et du développement économique » – s’engagent à « prendre leurs pleines responsabilités, aux côtés des maires, dans la résorption des fractures urbaines et sociales. » « La politique de la ville jusqu’à maintenant, était communale. Nous affirmons, à travers ce manifeste, que les grandes et petites intercommunalités, que la politique de la ville sera alors une politique intercommunale » a, de son côté, insité le patron de France urbaine, Jean-Luc Moudenc, en conférence de presse.

En retour, ils attendent « un même engagement de l’Etat sur les responsabilités majeures qui sont les siennes, notamment dans les grands services publics fondamentaux que sont l’Education, la sécurité et la justice, la santé.» « Que l’Etat se recentre sur sa mission essentielle : sécurité publique, justice partout. Ces quartiers ont besoin en priorité de la protection de la Nation », décryptait pour sa part Jean-Louis Borloo, lui aussi présent à Dijon.

Illettrisme et "illectronisme" : deux maux, deux défis des quartiers

Dans le texte cosigné par les différentes parties ce 6 avril, s’en suit une déclinaison des « responsabilités premières des agglomérations et métropoles où l’Etat doit nous accompagner. » Par exemple dans le domaine de l’emploi : « nous nous engageons à renforcer l’accès à l’emploi des populations les plus éloignées des marchés du travail » ainsi qu’à « saisir les opportunités de la transformation numérique de l’économie afin d’en faire une seconde chance pour les décrocheurs précoces du parcours scolaire » si l’Etat et ses services s’engagent à « initier et mettre en œuvre un grand plan national de lutte contre l’illettrisme et l’illectronisme », un néologisme qui renvoie au manque ou à l’absence de connaissance des clés nécessaires à l'utilisation des ressources électroniques.

Les deux défis sont chers à Jean-Louis Borloo : « Le pays de Voltaire est en 23e position sur les 25 de l’OCDE sur l’illettrisme. Celui-ci est deux fois et demi plus grave dans nos quartiers. C’est le premier obstacle à la mobilité géographique et professionnelle », a-t-il déploré. Quant au numérique, l’ex-ministre de la Ville plaide devant les patrons de grandes villes et d’EPCI, pour que « nos quartiers soient, pour le compte de vos agglomérations, les quartiers de l’excellence numérique ».

Réhabiliter le statut des travailleurs sociaux et des instituteurs

Les collectivités urbaines pourraient aussi « favoriser les innovations pédagogiques via les projets éducatifs territoriaux (PEDT) » et « rapprocher les acteurs de l’éducation des acteurs de l’insertion sociale et de la formation professionnelle via les missions locales comme les CCAS ou les PLIE », liste le manifeste. En la matière, Jean-Louis Borloo se veut plus véhément encore : « En dix ans, on a transformé les travailleurs sociaux en chasseurs de subventions! C’est quoi cette folie des appels à projets en matière sociale ? ». Et l’ancien maire de Valenciennes de plaider la cause de ces travailleurs sociaux, « extraordinaire armée de la République ».

Dans leur manifeste, France urbaine et l’ADCF insistent pour que l’Education nationale réforme en profondeur sa politique de ressources humaines afin de désigner davantage d’instituteurs et de professeurs expérimentés dans les quartiers, ainsi que le système d’orientation, en plus de développer la mixité scolaire et impulser un plan de décrochage scolaire.

Réinventer l'Anru et simplifier les procédures

Idem en matière de logement et de renouvellement urbain : en échange d’une simplification de la tuyauterie administrative et financière de l’Anru ainsi que du lancement « sans délai » des chantiers d’ores et déjà programmés, les collectivités urbaines promettent de « modifier l’équilibre social de l’habitat par des politiques de peuplement adaptées. »

« Il faut simplifier la tuyauterie administrative et financière de l’Anru, qui est un excellent exemple de la centralisation rampante qui ne date pas d’aujourd’hui et qui vient considérablement ralentir les procédures », est ainsi venu témoigner le maire (PS) de Rouen, Yvon Robert. Message plus que partagé par l’ex-édile de Valenciennes : « L’Anru est devenu un outil complexe, il faut une réorganisation d’une forme de service d’un Etat impécunieux », a plaidé Jean-Louis Borloo. « Il faut que la France se dote d’un grand outil pour la qualité urbaine. Une sorte de fondation qui bénéficierait de l’ensemble des outils du début de la rénovation urbaine » et « qui puisse récupérer toute la qualité urbaine de nos quartiers », a-t-il lancé.

Les intercos "chefs de file de la cohésion sociale et territoriale" ?

On l’aura compris : l’idée du pacte signé à Dijon, soutenu par l'ex-ministre, est de clarifier les responsabilités entre le bloc urbain et l’Etat ainsi que d’écrire noir sur blanc leurs engagements prioritaires respectifs en faveur des quartiers. « C’est trop facile d’être dans la position commode de dire que l’Etat est responsable de tout et les collectivités locales victimes de tout, est venu concéder le maire (Divers gauche, ex-PS) d’Evry Francis Chouat. L’Etat agit en tuyaux d’orgues, l’éducation nationale d’un côté, la cohésion sociale de l’autre, les administrations d’une troisième côté et les collectivités aussi sont émiettées. Il y a aujourd’hui un élément nouveau : l’ensemble du territoire national est maillé par des métropoles, des communautés d’agglomération, des communautés urbaines : nous sommes devenus de fait les chefs de file de la cohésion sociale et territoriale. Il faut que l’Etat consente à nous donner le stylo », .

Si besoin était, le manifeste résume en conclusion : « rien ne se fera sans l’action des agglomérations et métropoles, rien ne se fera sans l’action de l’Etat. Le défi est de taille : c’est la cohésion urbaine, sociale, territoriale et nationale qui est en jeu. » En somme, il s'agit de signer « un pacte d’engagement pour la cohésion urbaine et sociale » et d'engager « une action publique à haute intensité », selon les mots du président de l’ADCF, Jean-Luc Rigaut, présent pour l'occasion à l'évènement de France Urbaine.

Quel trésor de guerre pour le "général Patton des quartiers" ?

Si l’idée devrait être reprise dans les préconisations de Jean-Louis Borloo annoncées pour courant avril, celui-ci devrait aller bien plus loin encore et esquisser, selon ses mots, un « big bang institutionnel » qui toucherait donc l’Anru en premier lieu. « Il faut totalement changer de méthode, il faut un général Patton, une équipe de haut niveau, un programme organisé, un suivi, une organisation extérieure… »

Mais celui qui assure ne pas vouloir endosser à moyen terme l’uniforme de ce « général » de la politique de la ville n’en reste pas là pour autant. Après avoir évoqué les quelque 48 milliards déjà dépenses en faveur de la politique de la ville, l’ex-ministre se veut clair : « On a fait que la moitié du boulot, il y en a autant à remettre ».

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