Deux suffrages déclarés nuls à l’issue du scrutin ne l’étaient pas pour la haute juridiction qui a dû déterminer sans ambiguïté l’intention des électeurs.
Cet arrêt du Conseil d’Etat du 10 décembre 2008, « Elections municipales de Langon » (n° 317731) constitue un nouveau témoignage de la subtile analyse à laquelle le juge administratif doit procéder pour déterminer si des bulletins de vote sont entachés de nullité.
Les circonstances du litige
Par un jugement du 29 mai 2008, le tribunal administratif de Nantes, à la suite d’une protestation électorale, a annulé l’élection d’un conseiller à l’issue des opérations électorales qui se sont déroulées le 16 mars 2008 pour l’élection des conseillers municipaux dans la commune de Langon (Vendée) et proclamé élue la requérante. Pour réformer le résultat des opérations électorales litigieuses, le tribunal administratif a déclaré trois suffrages nuls dans l’unique bureau de vote de la commune de Langon, commune de moins de 3 500 habitants.
Le droit applicable
Aux termes de l’article L.66 du Code électoral, « les bulletins blancs, ceux ne contenant pas une désignation suffisante ou dans lesquels les votants se sont fait connaître, les bulletins trouvés dans l’urne sans enveloppe ou dans des enveloppes non réglementaires, les bulletins écrits sur papier de couleur, les bulletins ou enveloppes portant des signes intérieurs ou extérieurs de reconnaissance, les bulletins ou enveloppes portant des mentions injurieuses pour les candidats ou pour des tiers n’entrent pas en compte dans le résultat du dépouillement (…) ».
L’appréciation de la validité des bulletins par le Conseil d’Etat
Il résulte de l’instruction qu’un des suffrages déclarés nuls par le bureau de vote était exprimé en joignant dans la même enveloppe, au bulletin d’une des listes candidates, celui de l’autre liste entièrement rayé ; or l’adjonction de ce dernier bulletin, qui n’était pas nécessaire à la manifestation de la volonté de l’électeur, doit être regardée comme un signe de reconnaissance et, dès lors, ce suffrage a été déclaré nul à bon droit par le bureau de vote.
En revanche, sur deux autres bulletins déclarés nuls par le bureau de vote, les électeurs avaient rayé les noms de certains des candidats et ajouté ceux de candidats de l’autre liste, le nombre total de noms restant égal à celui des sièges à pourvoir ; ces bulletins permettaient de déterminer sans ambiguïté l’intention des électeurs et ne portaient aucun signe de reconnaissance au sens des dispositions de l’article L.66 du Code électoral. Par voie de conséquence, ces deux suffrages doivent, par suite, être comptabilisés comme valides, la circonstance que le bureau de vote se serait trompé de bonne foi étant sans influence sur ce décompte.
Les conséquences sur l’élection
Il y a dès lors lieu d’ajouter aux suffrages recueillis par la requérante seulement deux unités pour un total de 287 voix ; ce total demeure toutefois supérieur au nombre des suffrages recueillis par le dernier élu proclamé par le bureau de vote, et la requérante demeure donc à juste titre désignée par le tribunal administratif.
Commentaire
Il n’est ainsi pas aisé de déterminer quand un bulletin peut être considéré comme nul. Sont ainsi valables un bulletin accompagné d’une circulaire recommandant le vote pour la même liste (CE 7 déc. 1977, El. mun. de Jussy-Champagne Rec. T p. 838), des bulletins multiples de la même liste placés dans une même enveloppe, l’ensemble ne comptant cependant que pour un seul suffrage (CE 15 juill. 1960, El. mun. de Barlieu Rec. T p. 1008), un bulletin avec un trait de crayon entourant les noms conservés alors que les autres noms sont rayés (CE 12 févr. 1964, El. mun. de Bonneuil-sur-Marne : Rec. p. 101). En revanche, ont été déclarés nuls comme affectés d’un signe de reconnaissance : un bulletin avec un nom entouré au crayon dans la liste, par ailleurs non modifiée (CE 12 févr. 1964, El. mun. de Bonneuil-sur-Marne Rec. p. 101), des bulletins présentant un trou d’épingle au-dessus de la lettre « i » figurant dans le nom d’un candidat (CE 1er févr. 1980, El. cant. de Belgodère : Rec. T. p. 736).
Lebrun - 18/06/2017 19h:53
Lors du dépouillement de ce jour le maire de ma commune voulait comptabiliser un bulletin partiellement déchiré(déchirure sur 3cm environ sur deux côtés). Je m'y suis opposée considérant que le bulletin était nul. Fallait-il le considérer comme valable ou pas ?
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